Nouveaux faits fautifs après entretien préalable : le sort du délai d’un mois pour sanctionner

Jurisprudence
Paie Indemnité de licenciement

Lorsque de nouveaux faits fautifs se produisent après l’entretien préalable, le délai d’un mois est décompté à compter de la convocation à un nouvel entretien préalable.

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Contexte de l'affaire

Une salariée est engagée, en qualité de médecin, par une Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines, à compter du 1er octobre 2003 et elle exerçait, depuis le 30 juin 2014, dans un centre de santé géré par la caisse régionale des mines du Sud-Est.


Après avoir été, par lettre remise en main propre le 1er octobre 2015, mise à pied à titre conservatoire et convoquée à un entretien préalable fixé au 14 octobre, la salariée a été licenciée, pour faute grave, par lettre du 1er décembre 2015.
Contestant ce licenciement, la salariée saisit la juridiction prud'homale le 15 décembre 2015.

La cour d'appel de Nîmes, par arrêt du 24 mai 2022, donne raison à la salariée, mais l’employeur décide de se pourvoir en cassation.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, et à l’occasion de cet arrêt permet de confirmer certains points, et notamment le fait que : 

Vu l'article L. 1332-2 du code du travail :

  • Il résulte de ce texte que le licenciement disciplinaire doit intervenir dans le délai d'un mois à compter de la date de l'entretien préalable. L'expiration de ce délai interdit à l'employeur de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable pour les mêmes faits ;
  • Lorsqu'en raison de la révélation de faits fautifs nouveaux postérieurement à cet entretien préalable, l'employeur adresse au salarié, dans le délai d'un mois à compter du premier entretien, une convocation à un nouvel entretien préalable, c'est à compter de la date de ce dernier que court le délai d'un mois qui lui est imparti pour notifier la sanction.

Extrait de l’arrêt :


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1332-2 du code du travail :

8. Il résulte de ce texte que le licenciement disciplinaire doit intervenir dans le délai d'un mois à compter de la date de l'entretien préalable. L'expiration de ce délai interdit à l'employeur de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable pour les mêmes faits.

9. Lorsqu'en raison de la révélation de faits fautifs nouveaux postérieurement à cet entretien préalable, l'employeur adresse au salarié, dans le délai d'un mois à compter du premier entretien, une convocation à un nouvel entretien préalable, c'est à compter de la date de ce dernier que court le délai d'un mois qui lui est imparti pour notifier la sanction.

10. Pour dire le licenciement fondé sur une faute grave, l'arrêt énonce d'abord que la salariée a été convoquée, par lettre du 21 septembre 2015, à un entretien fixé au 1er octobre 2015, conformément aux dispositions conventionnelles applicables, puis que, à l'issue de ce premier entretien, l'employeur lui a remis, en main propre, une lettre lui confirmant sa mise à pied conservatoire, notifiée verbalement le même jour, et la convoquant à un entretien préalable à une mesure de licenciement, fixé au 14 octobre 2015.

11. L'arrêt relève ensuite que, l'employeur a adressé à la salariée, par lettre du 18 novembre 2015, une nouvelle convocation à un second entretien préalable, fixé au 27 novembre 2015, au motif que, dans l'intervalle, de nouveaux faits fautifs de fausses facturations avaient été portés à sa connaissance par la caisse primaire d'assurance maladie.

12. Il retient enfin que la salariée a été régulièrement licenciée, pour faute grave, par lettre adressée le 1er décembre 2015, soit dans le délai d'un mois à compter du second entretien nécessité par la découverte des faits nouveaux.

13. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que la convocation au second entretien préalable était intervenue plus d'un mois après la date fixée le 14 octobre 2015 pour le premier entretien préalable et que l'employeur reprochait à la salariée, aux termes de la lettre de licenciement, non seulement les faits nouveaux portés à sa connaissance par la caisse primaire d'assurance maladie le 23 octobre 2015 mais également son attitude de dénigrement, irrespectueuse et agressive à l'égard de ses collègues visée par la première procédure de licenciement disciplinaire engagée le 1er octobre 2015, ce dont elle aurait dû déduire que ces faits objets du premier entretien préalable ne pouvaient plus justifier le licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Cour de cassation du , pourvoi n°22-19351

Commentaire de LégiSocial

L’affaire présente est assez remarquable, et une analyse approfondie des faits est éclairante selon nous.

Nous vous proposons le présent tableau permettant d’y voir plus clair :

Dates

Explications

21 septembre 2015

Convocation de la salariée au 1er entretien préalable

1er octobre 2015

Tenue du 1er entretien préalable

1er octobre 2015

L’employeur remet à la salariée, en main propre, une lettre lui confirmant sa mise à pied conservatoire, notifiée verbalement le même jour, et la convoquant à un entretien préalable à une mesure de licenciement, fixé au 14 octobre 2015.

18 novembre 2015

L'employeur adresse à la salariée, par lettre du 18 novembre 2015, une nouvelle convocation à un second entretien préalable, fixé au 27 novembre 2015, au motif que, dans l'intervalle, de nouveaux faits fautifs de fausses facturations avaient été portés à sa connaissance par la caisse primaire d'assurance maladie.

C’est à ce niveau que la Cour de cassation indique que :

  • La convocation au second entretien préalable était intervenue plus d'un mois après la date fixée le 14 octobre 2015 pour le premier entretien préalable ;
  • Et que l'employeur reprochait à la salariée, aux termes de la lettre de licenciement, non seulement les faits nouveaux portés à sa connaissance par la caisse primaire d'assurance maladie le 23 octobre 2015 mais également son attitude de dénigrement, irrespectueuse et agressive à l'égard de ses collègues visée par la première procédure de licenciement disciplinaire engagée le 1er octobre 2015 ;
  • Ce dont il se déduisait que ces faits objets du premier entretien préalable ne pouvaient plus justifier le licenciement

1er décembre 2015

Notification du licenciement pour faute grave par lettre

15 décembre 2015

Saisine prud’homale par la salariée.