Heures supplémentaires : la charge de la preuve ne repose pas sur le seul salarié

Jurisprudence
Paie Heures supplémentaires

Une cour d’appel ne saurait débouter un salarié de sa demande de rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires, faisant peser la charge de la preuve sur le seul salarié.

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé en qualité de directeur général par une association, suivant contrat de travail du 29 mars 2013.

Licencié le 8 octobre 2014, le salarié saisit le 27 novembre 2014 la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail. 

Il réclame à cette occasion un rappel de salaires au titre d’heures supplémentaires.

La cour d'appel de Nancy, par arrêt du 23 septembre 2021, déboute le salarié de sa demande, estimant à cette occasion que :

  • Le salarié produisait deux tableaux indiquant le quantum des heures qu'il dit avoir accomplies d'avril 2013 à septembre 2014 ;
  • Constant à cette occasion que ces tableaux n'indiquent ni les horaires de travail ni les temps de pause journaliers ;
  • En concluant que le salarié ne fournissait pas d'éléments suffisamment précis à l’appui de sa demande.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d'appel de Nancy, et renvoie les parties devant la cour d'appel d'Amiens.

Elle indique pour cela que :

  • Une cour d’appel ne saurait débouter un salarié de sa demande de rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires ;
  • Ayant été constaté que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre ;
  • Faisant ainsi peser la charge de la preuve sur le seul salarié

Extrait de l’arrêt :


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

4. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

5. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

6. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d' heures supplémentaires , il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

7. Pour débouter le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, l'arrêt relève qu'il produit deux tableaux indiquant le quantum des heures qu'il dit avoir accomplies d'avril 2013 à septembre 2014. Il constate que ces tableaux n'indiquent ni les horaires de travail ni les temps de pause journaliers. Il en conclut que le salarié ne fournit pas d'éléments suffisamment précis.

9. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [H] de sa demande au titre du paiement d'heures supplémentaires outre congés payés afférents et de sa demande au titre de l'indemnité de travail dissimulé, en ce qu'il condamne M. [H] aux dépens et en ce qu'il statue sur les indemnités de procédure, l'arrêt rendu le 23 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Cour de cassation du , pourvoi n°22-23047

Commentaire de LégiSocial

Il est de jurisprudence constante que la Cour de cassation rappelle à la cour d’appel qu’elle ne saurait faire peser la charge de la preuve sur le salarié, en matière d’heures supplémentaires.

2 autres arrêts à ce sujet sont à retrouver sur notre site :

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Références

Rappel d’heures supplémentaires : la charge de la preuve ne repose pas sur le seul salarié

Cour de cassation du 25 mars 2015, pourvoi n°13-26469

Rappel d’heures supplémentaires : la charge de la preuve ne doit pas reposer sur le seul salarié

Cour de cassation du 10 mai 2023, pourvoi n°21-20509