Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé en qualité de conseiller sportif le 3 novembre 2014.
Convoqué le 16 août 2017 à un entretien préalable en vue de son licenciement et mis à pied à titre conservatoire, le salarié, après avoir reçu de son employeur un courriel daté du 19 août 2017, a été licencié le 1er septembre 2017 pour faute grave.
Son employeur lui reprochant notamment d’avoir tenu des propos dénigrants et déplacés qui mettaient en cause l'honnêteté des dirigeants, un courriel avait été adressé durant la période mise à pied conservatoire indiquant que :
« Je te rappelle que tu es salarié de (…) et le lien de subordination qui nous lie. Le ton employé et les jugements définitifs que tu portes [sur] mon travail commencent à être définitivement de trop. Merci de faire preuve d'un minimum de respect. Je ne comprends pas ce qui t'arrive, tu as changé du tout au tout [...]. Tu es devenu très agressif et fais preuve de jugements moraux à notre égard qui sont tout à fait déplacés. Je te demanderai donc d'arrêter de colporter des rumeurs et autres dénigrements, notamment auprès de la clientèle, mais aussi de l'équipe (…) [...].
Le salarié saisit la juridiction prud'homale pour contester son licenciement et obtenir le paiement de diverses sommes.
La cour d'appel de Versailles, par arrêt du 10 février 2022, déboute le salarié de sa demande.
Mais le salarié insiste et décide de se pourvoir en cassation.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, rejetant à cette occasion le pourvoi formé par le salarié.
Elle indique que, dans l’affaire présente, qu’il avait été retenu que :
- Des propos dénigrants et déplacés mettaient en cause l'honnêteté des dirigeants ;
- Et que le salarié ne saurait justifier de tels propos en excipant de leur caractère fondé, qui n'était au demeurant pas démontré ;
- Il s’en déduisait qu'ils caractérisaient un abus de la liberté d'expression du salarié.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
12. La cour d'appel a constaté que le salarié avait indiqué à une collègue que ses employeurs n'étaient pas des gens sur qui on pouvait compter, qu'ils n'étaient là que pour leur profit, ne pensaient qu'à « choper un maximum d'adhérentes » et n'étaient que des vicieux qui ne tenaient pas leurs engagements par rapport à lui et qu'en somme si un jour ils pouvaient « la leur mettre bien profond » ils n'hésiteraient pas, puis que dans des courriels du 16 août 2017, il avait écrit : « C'est devenu une habitude pour vous de vivre dans le mensonge », « on m'a toujours dit de ne pas travailler avec vous, vu toutes les affaires dans lesquelles vous êtes mêlés et là je suis en train de me rendre compte à quel point vous pouvez être indifférents ».
13. Ayant ensuite retenu que ces propos dénigrants et déplacés mettaient en cause l'honnêteté des dirigeants et que le salarié ne saurait justifier de tels propos en excipant de leur caractère fondé, qui n'était au demeurant pas démontré, elle a pu en déduire qu'ils caractérisaient un abus de la liberté d'expression du salarié.
14. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Commentaire de LégiSocial
Il est fréquent que la Cour de cassation aborde la question de la « liberté d’expression ».
Voici un rappel de quelques arrêts que nous avons commentés sur notre site :
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