Contexte de l'affaire
Une salariée est engagée en qualité d'assistante, le 4 septembre 2006, par un cabinet d'expertise comptable et de commissariat aux comptes.
Après qu'elle a signalé des anomalies à son employeur en juillet 2009, elle a été licenciée une première fois le 31 août 2009. La cour d'appel a ordonné sa réintégration par arrêt du 21 mai 2014.
Le 4 juin 2015, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société et en paiement de diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire.
Licenciée le 27 juillet 2016, au motif notamment de son refus de réintégration, elle a demandé à la juridiction déjà saisie d'annuler ce licenciement et d'ordonner sa réintégration.
La cour d'appel de Paris, par arrêt du 24 février 2022, donne raison à la salariée.
Mais l’employeur décide de se pourvoir en cassation.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, sur cet aspect de l’affaire.
A cette occasion, la Cour de cassation confirme les points suivants :
Le salarié, dont le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite contre son employeur est annulé comme portant atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice.
Lorsqu’il en fait la demande :
- Le salarié doit être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent comportant le même niveau de rémunération, la même qualification et les mêmes perspectives de carrière que l'emploi précédemment occupé ;
- L'indemnité d'éviction due au salarié dont le licenciement est annulé est égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des revenus perçus durant cette période. Elle doit être calculée sur la base du salaire qu'aurait perçu le salarié s'il avait continué à travailler, pendant la période s'étant écoulée entre son licenciement et sa réintégration, au poste qu'il occupait au moment de la rupture du contrat de travail.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
9. Le salarié, dont le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite contre son employeur est annulé comme portant atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice, qui demande sa réintégration, doit être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent comportant le même niveau de rémunération, la même qualification et les mêmes perspectives de carrière que l'emploi précédemment occupé.
10. L'indemnité d'éviction due au salarié dont le licenciement est annulé est égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des revenus perçus durant cette période. Elle doit être calculée sur la base du salaire qu'aurait perçu le salarié s'il avait continué à travailler, pendant la période s'étant écoulée entre son licenciement et sa réintégration, au poste qu'il occupait au moment de la rupture du contrat de travail.
11. Les moyens, qui soutiennent le contraire, ne sont donc pas fondés.
Commentaire de LégiSocial
L’affaire présente aborde le licenciement devant être considéré comme nul, l’occasion pour nous de rappeler quelques principes importants concernant la nullité du licenciement.
Les informations ci-après proposées sont extraites d’une de nos fiches pratiques exclusivement consacrée à cette thématique :
Lire aussi : Quelles sont les conséquences d'un licenciement nul en 2024 ? Fiche pratique
Suite à une action prud’homale, un licenciement est parfois considéré « nul ». La présente fiche pratique vous éclaire à la fois sur les cas de nullités ainsi que sur les conséquences.
Les cas de nullité
Il existe de nombreux cas pour lesquels le juge peut prononcer la nullité du licenciement :
- Licenciement pour victimes de harcèlement, de discrimination ou personnes ayant relaté ou témoigné de tels agissements (articles L 1132-1 à L 1132-4, L 1152-2 et L 1152-3, L 1153-2 à L 1153-4 du Code du travail) ;
- Violation du principe d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (article L 1144-3 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé en méconnaissance du droit de grève (articles L 1132-2 et L 1132-4 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé pendant un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou maladie professionnelle (sauf faute grave sans rapport avec l’arrêt de travail) (articles L 1226-13, L 1226-9 et L 1226-18 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé en méconnaissance de la protection des représentants du personnel, représentants syndicaux (articles L 1132-1 à L 1132-4 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé en méconnaissance de la protection des femmes enceintes (articles L 1225-4 et L 1225-5 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé pour des opinions religieuses, syndicales, situation de famille (articles L 1132-1 à L 1132-4, du Code du travail).
Rappelons que la prise d’acte de rupture du contrat de travail par un salarié protégé produit les effets d’un licenciement nul.
Signalons également que la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l’employeur, notamment pour des faits de harcèlement moral produit alors les effets d’un licenciement nul.
Cour de cassation du 20/02/2013 pourvoi 11-26560