Quand l’imitation d’une signature n’est pas une faute !

Jurisprudence
Licenciement

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Contexte de l'affaire

Cette affaire concerne une salariée engagée le 2/04/2002 en qualité de déléguée médicale.

Elle est licenciée pour faute grave le 20/12/2005 pour avoir signé des listes de présence aux réunions professionnelles qu'elle organisait, en lieu et place des médecins supposés être présents.

La salariée conteste son licenciement et décide de saisir le Conseil de prud’hommes.

Pour l’employeur, cela ne fait pas de doute, la falsification de signatures est bien une faute grave justifiant son licenciement.

Ce n’est pas l’avis de la Cour d’appel qui donne raison à la salariée.

L’employeur insiste sur sa position et décide de se pourvoir en cassation.

Les juges de la Cour de cassation confirment le jugement de la Cour d’appel et rejettent le pourvoi.

Mais attendu que la cour d'appel a constaté que si la salariée a signé les feuilles de présence en lieu et place de douze médecins, manquant ainsi à ses obligations professionnelles, elle l'a fait avec l'accord de dix des douze médecins qui étaient effectivement présents à la réunion et selon une pratique communément admise ; qu'elle a pu en déduire que les faits, constitutifs d'un manque de rigueur dans l'organisation matérielle des réunions, ne constituaient pas une faute grave, s'agissant d'une salariée ayant trois années d'ancienneté et n'ayant fait l'objet que d'un seul reproche d'insuffisance de résultats peu de temps avant ;

Et attendu qu'exerçant le pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, elle a décidé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa dernière branche, n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Les juges constatent en effet que la salariée a effectivement signé les feuilles de présence en lieu et place des 12 médecins.

Même si cela constitue un manquement à ses obligations professionnelles, elle l’avait fait avec l’accord de 10 d’entre eux effectivement présents à la réunion et selon une pratique « communément admise ».

Ils relèvent en outre, que la salariée n’avait fait l’objet que d’un seul reproche en 3 ans de présence pour une insuffisance de résultats.

Le licenciement était donc injustifié.

Cour de cassation du , pourvoi n°10-15058

Commentaire de LégiSocial

Même si le jugement de la Cour de cassation en l’espèce peut surprendre, il convient de rappeler qu’en cas de procédure prud’homale, il revient aux juges d’apprécier le caractère fondé ou pas d’une procédure de licenciement.

Le Code du travail indique d’ailleurs qu’en cas de doute, il profite alors au salarié (pardon à la salariée dans le cas présent !). 

Article L1235-1

En cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Il semble en l’espèce que les juges ont eu un « doute sérieux ».

Retenant le fait que cette pratique, même si elle plus que discutable, était en la circonstance « courante », que l’ancienneté de la salariée relativement importante (surtout sans qu’aucun reproche n’ait été prononcé auparavant), le licenciement ne reposait pas sur une faute grave et qu’il était même injustifié.