Le refus de mutation d’un salarié ne peut pas être sanctionné

Jurisprudence
Paie Licenciement

Ayant été constaté que l’employeur avait proposé à la salariée une mutation, ce dont il résultait que l'employeur ne pouvait sanctionner le refus de la salariée, permettant d’en déduire que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

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Contexte de l'affaire

Une salariée est engagée en qualité de directrice de crèche, à compter du 20 août 2012.


En congé de maternité du 17 août 2014 au 15 février 2015, puis en congés payés jusqu'au 17 avril 2015, la salariée a fait l'objet d'une dispense d'activité rémunérée à compter de cette date.

Le 24 mars 2015, le conseil général de Seine-Saint-Denis a informé l'employeur de ce que la dérogation accordée à la salariée, laquelle ne possède pas les diplômes requis par la réglementation sanitaire pour exercer ses fonctions de directrice de la crèche située au [Localité 3], était venue à échéance le 13 février 2015, sans possibilité de reconduction.

Par lettre du 5 mai 2015, l'employeur propose une mutation au poste de directrice d'une crèche située dans un autre lieu.
La salariée, qui avait refusé cette proposition par lettres des 29 mai et 17 juin 2015, est licenciée le 2 juillet 2015 en raison de son refus d'être mutée. 

Elle décide de saisir la juridiction prud’homale aux fins de contester son licenciement.

La cour d'appel de Paris, par arrêt du 22 septembre 2021, donne raison à la salariée. 

Mais l’employeur décide de se pourvoir en cassation.

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, rejetant le pourvoi formé par l’employeur.

A cette occasion, la Cour de cassation indique qu’il avait été constaté dans cette affaire que : 

  • L’employeur avait proposé à la salariée une mutation dans une société dont il était l'actionnaire majoritaire ;
  • Ce dont il résultait que l'employeur ne pouvait sanctionner le refus de la salariée;
  • Ce qui permettait d’en déduire que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse. 

Extrait de l’arrêt :



Réponse de la Cour

8. Un salarié ne peut accepter par avance un changement d'employeur.

9. La cour d'appel, qui a constaté que l'employeur avait proposé à la salariée une mutation dans une société dont il était l'actionnaire majoritaire, ce dont il résultait que l'employeur ne pouvait sanctionner le refus de la salariée, en a exactement déduit que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

10. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois principal et incident ; 

Cour de cassation du , pourvoi n°23-10326

Commentaire de LégiSocial

L’affaire présente qui évoque la « mutation » est l’occasion pour nous de rappeler des principes importants concernant la « clause de mobilité » parfois présente au sein des contrats de travail.

Les informations ci-après proposées sont extraites d’une de nos fiches pratiques consacrée à cette thématique : 

Principe et objectif

Cette clause permet à l’employeur de se réserver la possibilité de modifier le lieu de travail du salarié et cela sans son accord.

  • La mutation du salarié = modification des modalités d’exécution du contrat de travail ;
  • Le refus du salarié= sanction disciplinaire qui peut aller jusqu’au licenciement pour faute grave.

Conditions de validité ?

On peut dénombrer 7 conditions de validité à respecter afin que cette clause soit reconnue et porte ses effets : 

  1. Être indiquée sur le contrat de travail;
  2. Préciser une zone géographique ;
  3. Respecter les dispositions conventionnelles ;
  4. Ne pas faire l’objet d’un changement unilatéral ;
  5. Ne pas prévoir la rupture automatique du contrat ;
  6. Être conforme aux intérêts légitimes de l’entreprise ;
  7. Respecter un délai de prévenance.