Mise à disposition d'un véhicule par un tiers et avantage en nature : La question de la preuve

Jurisprudence
Paie Avantages en nature

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Contexte de l'affaire


Cour de cassation - 9 janvier 2025 - Pourvoi n° 22-15.766

Extrait de l'arrêt : 

Il résulte de l'article L. 242-1, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, que les avantages en nature attribués en contrepartie ou à l'occasion du travail sont compris dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale.

5. En application de l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002 modifié, relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations sociales, lorsque l'employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou assimilé un véhicule, l'avantage en nature constitué par l'utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de l'employeur, sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d'un forfait annuel en pourcentage du coût d'achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule en location ou en location avec option d'achat, toutes taxes comprises.

6. Il résulte de ces textes que la mise à la disposition permanente, par l'employeur, au profit de ses salariés, d'un véhicule pouvant être utilisé pour leurs déplacements privés, permettant ainsi aux bénéficiaires de faire l'économie de frais de transport qu'ils devraient normalement assumer, constitue, en principe, un avantage en nature.

7. La circonstance selon laquelle le véhicule est mis à la disposition permanente de salariés par l'intermédiaire d'un tiers ne saurait faire obstacle à la constatation de l'existence d'un avantage en nature, lorsque l'attribution de cet avantage résulte de l'appartenance des salariés à l'entreprise.

8. L'administration de la preuve de cet avantage en nature doit être gouvernée par les règles générales applicables en cette matière.

9. Ainsi, s'il incombe d'abord à l'URSSAF d'établir, notamment par le procès-verbal des agents de contrôle qui fait foi jusqu'à preuve contraire, la mise à disposition permanente, par l'employeur, d'un véhicule au profit de ses salariés, il appartient ensuite à l'employeur de démontrer que cette mise à disposition, fût-ce par l'intermédiaire d'un tiers, est exclusive de tout avantage en nature.

10. L'employeur doit, par conséquent, rapporter la preuve qu'il prend exclusivement en charge le coût afférent aux kilomètres parcourus par ses salariés dans le cadre de leurs déplacements professionnels, sans aucune participation au coût de l'usage personnel du véhicule par ces derniers.

11. Si, conformément à l'article 1358 du code civil, cette preuve peut être rapportée par tout moyen, elle ne peut cependant résulter des seules facturations établies par le tiers qui met les véhicules à disposition des salariés, lesquelles doivent être corroborées par d'autres éléments de preuve.

12. L'arrêt relève, par motifs adoptés, qu'une partie du personnel de la société cotisante bénéficie de la mise à disposition permanente d'un véhicule automobile fourni par l'association des utilisateurs de véhicules, dont les adhérents sont les cadres et les employés, techniciens et agents de maîtrise du groupe [3]. Il constate que ceux-ci sont tenus de verser une cotisation à l'association qui perçoit de la société cotisante des indemnités kilométriques qu'elle lui facture au titre des déplacements professionnels de ses salariés. Il retient que la société cotisante, à laquelle il appartient de démontrer que les sommes qu'elle verse au titre des indemnités kilométriques sont utilisées conformément à leur objet, ne justifie pas du nombre de kilomètres parcourus par chacun des salariés à titre professionnel. Il en déduit que la prise en charge par la société cotisante, en contrepartie de la mise à disposition de ces véhicules, des sommes remboursées à l'association au titre des indemnités kilométriques fait réaliser une économie à ses salariés utilisateurs des véhicules et constitue dès lors un avantage en nature soumis à cotisations sociales.

13. De ces constatations et énonciations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, la cour d'appel, ayant estimé que les éléments de preuve apportés par la société cotisante étaient insuffisants à démontrer qu'elle prenait exclusivement en charge les déplacements professionnels effectués par ses salariés, a exactement déduit que l'URSSAF était fondée à procéder au redressement de ce chef.


Cour de cassation - 9 janvier 2025 -Pourvoi n° 21-25.916

Extrait de l'arrêt : 

4. Il résulte de l'article L. 242-1, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, que les avantages en nature attribués en contrepartie ou à l'occasion du travail sont compris dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale.

5. En application de l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002 modifié, relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations sociales, lorsque l'employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou assimilé un véhicule, l'avantage en nature constitué par l'utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de l'employeur, sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d'un forfait annuel en pourcentage du coût d'achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule en location ou en location avec option d'achat, toutes taxes comprises.

6. Il résulte de ces textes que la mise à la disposition permanente, par l'employeur, au profit de ses salariés, d'un véhicule pouvant être utilisé pour leurs déplacements privés, permettant ainsi aux bénéficiaires de faire l'économie de frais de transport qu'ils devraient normalement assumer, constitue, en principe, un avantage en nature.

7. La circonstance selon laquelle le véhicule est mis à la disposition permanente de salariés par l'intermédiaire d'un tiers ne saurait faire obstacle à la constatation de l'existence d'un avantage en nature, lorsque l'attribution de cet avantage résulte de l'appartenance des salariés à l'entreprise.

8. L'administration de la preuve de cet avantage en nature doit être gouvernée par les règles générales applicables en cette matière.

9. Ainsi, s'il incombe d'abord à l'URSSAF d'établir, notamment par le procès-verbal des agents de contrôle qui fait foi jusqu'à preuve contraire, la mise à disposition permanente, par l'employeur, d'un véhicule au profit de ses salariés, il appartient ensuite à l'employeur de démontrer que cette mise à disposition, fût-ce par l'intermédiaire d'un tiers, est exclusive de tout avantage en nature.

10. L'employeur doit, par conséquent, rapporter la preuve qu'il prend exclusivement en charge le coût afférent aux kilomètres parcourus par ses salariés dans le cadre de leurs déplacements professionnels, sans aucune participation au coût de l'usage personnel du véhicule par ces derniers.

11. Si, conformément à l'article 1358 du code civil, cette preuve peut être rapportée par tout moyen, elle ne peut cependant résulter des seules facturations établies par le tiers qui met les véhicules à disposition des salariés, lesquelles doivent être corroborées par d'autres éléments de preuve.

12. L'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que l'intervention d'un tiers dans la mise à disposition d'un véhicule au profit d'un salarié n'exclut pas par elle-même l'existence d'un avantage en nature. Il constate que les véhicules mis à disposition des salariés de la société par l'association des utilisateurs de véhicules, en raison de la relation de travail avec l'employeur, sont utilisés par les salariés tant pour leurs besoins professionnels que personnels. Il retient qu'il incombe à l'employeur de démontrer que les salariés ne bénéficient pas d'un avantage résultant d'une prise en charge de l'usage privé des véhicules par l'employeur. Après avoir relevé que l'employeur contribue au financement de l'association qui met les véhicules à disposition des salariés en réglant les factures que celle-ci a établies, mentionnant l'identité du salarié, son numéro d'adhérent, la marque et le type de véhicule, le nombre de kilomètres parcourus à titre professionnel, la valeur unitaire de l'indemnité kilométrique et le décompte TTC, l'arrêt retient que l'employeur n'établit pas que les factures qu'il règle à l'association couvrent exclusivement des frais professionnels non soumis à cotisations pour chacun des salariés concernés.

13. De ces constatations et énonciations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, la cour d'appel, ayant estimé que les éléments de preuve apportés par la société cotisante étaient insuffisants à démontrer qu'elle prenait exclusivement en charge les déplacements professionnels effectués par ses salariés, a exactement déduit, sans inverser la charge de la preuve, que l'URSSAF était fondée à procéder au redressement sur la base d'une évaluation forfaitaire de l'avantage procuré aux salariés, minorée du montant de la redevance réglée annuellement par ceux-ci.

Cour de cassation du , pourvoi n°22-15.766 pourvoi n°21-25.916

Commentaire de LégiSocial

L’affaire en bref

Dans deux affaires jugées le 9 janvier 2025, la Cour de cassation a examiné la situation de salariés bénéficiant d’une mise à disposition permanente de véhicules par l’intermédiaire d’une association d’utilisateurs. L’URSSAF avait procédé à des redressements, estimant que cette mise à disposition constituait un avantage en nature soumis à cotisations sociales. Les cours d’appel avaient confirmé ces redressements, au motif que les employeurs ne justifiaient pas que les frais pris en charge étaient strictement limités à un usage professionnel.

La décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation a rappelé que la mise à disposition permanente d’un véhicule permettant un usage privé constitue un avantage en nature. Cette qualification s’applique même lorsque la mise à disposition est effectuée via un tiers, dès lors qu’elle est liée à l’appartenance du salarié à l’entreprise.

Elle a également précisé que l’employeur doit prouver que les frais pris en charge concernent exclusivement les déplacements professionnels. La simple production des factures établies par le tiers est insuffisante. En effet, ces documents doivent être complétés par d’autres éléments de preuve. En l’absence de justificatifs suffisants, la Cour a confirmé les redressements.

Impact en paie

Cette décision se révèle plus ferme que des précédentes décisions concernant l'apport de la preuve pour déterminer l'existence ou non d'un avantage en nature "véhicule".

Les employeurs doivent ainsi être en mesure de démontrer de manière précise et étayée que les frais pris en charge concernent uniquement les déplacements professionnels. À défaut, il y a avantage en nature et donc réintégration dans la base de cotisations selon les règles d'évaluation en vigueur.