Contexte de l'affaire
L’affaire concerne un salarié engagé le 30/10/2003 en qualité de responsable division fonctionnel et applicatifs.
Il est licencié pour faute grave, après une mise à pied disciplinaire pour avoir dénigré sa supérieure hiérarchique dans un courriel adressé à un collègue.
Précisons que ce mail a été adressé en dehors des heures du travail, via la messagerie personnelle du salarié à un collègue de travail (sur sa messagerie personnelle également).
Le salarié saisit le Conseil des prud’hommes, estimant que le licenciement pour faute grave a été motivé pour un fait relevant de la sphère privée.
Dans un premier temps, la Cour d’appel déboute le salarié de sa demande et confirme le licenciement.
Les juges de la Cour de Cassation ne sont pas du même avis.
Ils cassent et annulent le jugement et renvoient les 2 parties devant une nouvelle Cour d’appel.
Extrait du jugement :
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que l'envoi du courriel litigieux par le salarié, de sa messagerie personnelle et en dehors du temps et du lieu de travail, à l'adresse électronique personnelle d'un collègue de travail, ce qui conférait à ce message un caractère purement privé, ne constituait pas un manquement à son obligation de loyauté envers son employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE (…) l'arrêt rendu le 9 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Commentaire de LégiSocial
Ce n’est pas la première fois que la Cour de cassation se penche sur les mails échangés par des salariés et qui motivent parfois la rupture du contrat de travail pour faute.
Dans le présent jugement, les juges estiment que cet échange relève de la sphère privée et ne permet pas de prononcer le licenciement pour faute grave.
Contrairement au jugement rendu par la Cour d’appel, les juges ne considèrent pas que le mail adressé par le salarié soit à l’origine d’un trouble au sein de l’entreprise.
Extrait du jugement :
Attendu que pour retenir l'existence d'une faute grave et le débouter de sa demande d'indemnités au titre de son licenciement, l'arrêt retient que le courriel litigieux n'était pas étranger à l'activité professionnelle du salarié puisqu'il mettait en scène sa supérieure hiérarchique et qu'il avait été envoyé à un autre salarié de l'entreprise sans requérir de sa part une attitude de discrétion, si bien que son auteur était responsable du trouble manifeste que ce "factum" avait causé dans l'entreprise, et que l'intempérance démesurée des propos excédait largement ce qu'autorise la liberté d'expression et de critique reconnue à un salarié et caractérisait un manquement particulièrement indélicat à l'obligation professionnelle de loyauté, comportement d'autant moins admissible qu'il émanait d'un cadre porteur de l'image et du crédit de l'entreprise ;
Il faut en effet retenir le principe suivant :
Un salarié ne peut pas être licencié pour des faits relevant de la sphère privée, sauf à prouver qu’ils soient à l’origine d’un trouble au sein de l’entreprise.
Rappelons que cet échange de mails, ayant pour objectif de critiquer son supérieur hiérarchique, avait conduit la Cour de cassation à confirmer le licenciement pour faute dans une affaire précédente, que vous pouvez retrouver en cliquant ici
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Dans cette affaire, l’échange de courriels avait eu lieu sur le lieu et pendant les heures de travail, ce qui en donnait un caractère suffisamment grave pour motiver le licenciement.
La rupture d’un contrat de travail CDD avait également été confirmée par la Cour de cassation dans un jugement récent, que vous pouvez retrouver en cliquant ici
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La prudence est de mise dans les échanges de mails critiquant un supérieur hiérarchique !