Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 1/01/1969 en qualité de directeur d'exploitation.
Il est placé en arrêt de travail pour maladie du 18/03 au 20/08/2006, puis déclaré apte à la reprise par le médecin du travail sous réserve de limiter ses trajets à une durée maximale de 3 h 30.
Il fait l’objet d’un nouvel arrêt de travail.
A l'issue des deux visites médicales de reprise, il a été déclaré "inapte à tout poste de l'entreprise, apte à un poste de responsabilité type sédentaire ou avec peu de déplacements (notamment pas de déplacement lointain en voiture) dans une autre entreprise".
Après avoir refusé deux propositions de reclassement qu'il jugeait non conformes aux préconisations du médecin du travail et diminuant de façon injustifiée sa position hiérarchique dans la société, M. X... a pris acte de la rupture du contrat de travail le 13/08/2007 au motif que l’employeur ne lui avait pas présenté de propositions de reclassement conformes aux préconisation de la médecine du travail dans le délai d’un mois suivant le second examen médical.
Il saisit la juridiction prud'homale afin que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La Cour d’appel puis la Cour de cassation déboutent le salarié de sa demande.
Les deux cours constatent qu’au terme du mois pendant lequel l’employeur a l’obligation de proposer un reclassement du salarié déclaré inapte, l’employeur avait procédé à la reprise du paiement des salaires.
Le pourvoi est donc rejeté.
Extrait de l'arrêt
Et attendu qu'après avoir relevé que l'employeur avait sollicité les entreprises du groupe auquel il appartenait, la cour d'appel, qui a constaté que le salarié avait également refusé la seconde proposition, conforme aux préconisations du médecin du travail, au sein d'une autre société et qu'il refusait toute proposition, a, par une décision motivée, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Commentaire de LégiSocial
Dans cette affaire, le salarié avait argumenté sa demande en invoquant l’article L 1226-4 du Code du travail qui prévoit que « Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. ».
Pour débouter le salarié de sa demande, les juges relèvent les faits suivants :
Premièrement : recherche dans le délai d’un mois
L’employeur avait entrepris des recherches en sollicitant les autres entreprises du groupe sur les postes éventuellement disponibles.
Deuxièmement : reprise du paiement des salaires
L’employeur avait bel et bien repris le paiement des salaires au terme du délai d’un mois.
Troisièmement : proposition conforme aux prescriptions de la médecine du travail
L’employeur avait proposé 2 mois et demi après la déclaration d’inaptitude, un poste de reclassement conforme aux préconisations de la médecine du travail, poste que le salarié avait refusé.
La prise d’acte émise produisait donc en l’espèce les effets d’une démission.
Rappelons en effet que la prise d’acte de rupture du contrat de travail produit :
- Les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse lorsque les griefs invoqués sont reconnus ;
- Les effets d’une démission dans le cas contraire.
Il convient de modérer toute conclusion hâtive selon laquelle le fait de reprendre le paiement des salaires suffirait.
En effet, si passé le délai d’un mois, l’employeur n’entreprend aucune recherche de reclassement et se « contente » d’effectuer le paiement des salaires, le salarié pourrait éventuellement prendre acte de la rupture de son contrat de travail.
Les juges pourraient alors considérer que le salarié reste un peu trop longtemps dans l’expectative, mais le « délai d’attente » sera alors apprécié… au cas par cas par les tribunaux !
Pour terminer, profitons de cette affaire pour rappeler que l’article L 1226-4 invoqué dans la présente affaire a été tout récemment modifié par la loi du 22/03/2012 (LOI n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives).
Article L1226-4
Modifié par LOI n°2012-387 du 22 mars 2012 - art. 47
Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.
Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail.
En cas de licenciement, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l'indemnité mentionnée à l'article L. 1234-9. Par dérogation à l'article L. 1234-5, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice.
Cet article du Code du travail concerne les salariés déclarés inaptes au travail, pour un motif non professionnel.
Il est stipulé que le salarié licencié est :
- Dispensé dorénavant de tout préavis ;
- Que la période de préavis est néanmoins prise en compte pour le calcul de l’indemnité de licenciement ;
- Que l’inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d’une indemnité compensatrice.