Contexte de l'affaire
L’affaire concerne une salariée engagée le 14/03/2006 par une grande banque française, en qualité d’assistante commerciale.
Ses fonctions consistent à accueillir et orienter la clientèle, dont elle devait identifier les besoins pour lui donner, notamment en prenant en compte la procédure du traitement du risque, une réponse adaptée.
Son contrat de travail stipule l’obligation d’accomplir, conformément à l'article 10 de la convention collective, une période de stage de six mois.
L’employeur met fin à son stage le 29/08/2006, soit plus de 5 mois après l’embauche.
La salariée décide de saisir la juridiction prud'homale de diverses demandes en paiement de sommes à titre notamment de dommages-intérêts et d'indemnités de rupture.
La cour d’appel déboute la salariée de sa demande, estimant que la période d’essai de 6 mois, conforme aux dispositions conventionnelles, n’était pas excessive.
Extrait de l’arrêt
attendu que pour débouter la salariée de ses demandes, l'arrêt retient que la période de stage de six mois prévue pour les agents de catégorie A à E, par l'article 10 de la convention collective …, n'apparaît pas excessive dès lors qu'eu égard à la définition du poste de la salariée, les fonctions qu'elle devait remplir nécessitaient, pour être évaluées dans leur efficacité, une appréciation dans la durée, l'évaluation à mi-parcours permettant à l'employeur de vérifier que la salariée était apte à tenir compte des observations qui lui étaient faites sur la qualité de son travail et à la salariée de rectifier ses carences professionnelles afin d'obtenir sa titularisation ;
La Cour de cassation n’est pas du même avis.
Les juges s’appuyant sur la convention OIT 158 de 1982, estiment de leur côté, qu’une période d’essai de 6 mois n’est pas raisonnable, au regard de la finalité de la période d’essai.
La Cour casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, et remet en conséquence, la cause et les parties devant une nouvelle cour d’appel
Extrait de l’arrêt
Vu les principes posés par la convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur le licenciement adoptée à Genève le 22 juin 1982 et entrée en vigueur en France le 16 mars 1990 et la dérogation prévue en son article 2 paragraphe 2 b) ; (…)
Qu'en statuant ainsi, alors qu'est déraisonnable, au regard de la finalité de la période d'essai et de l'exclusion des règles du licenciement durant cette période, une période d'essai dont la durée est de six mois, la cour d'appel a violé la Convention internationale susvisée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Commentaire de LégiSocial
La loi LMMT (Loi de Modernisation du Marché du Travail) du 25/06/2008 (Jo du 26/06/2008) a modifié les conditions de la période d’essai.
Il existe désormais une période d’essai « légale ».
Utilité de la période d’essai
Comme l’indique le code du travail (article L 1221-20), la période d’essai a une double fonction :
- Pour l’employeur, c’est une période pendant laquelle il va tester les performances de son salarié ;
- Pour le salarié, c’est une période pendant laquelle il va tester son poste de travail, l’entreprise et les conditions de travail.
Durée de la période d’essai depuis la loi
La loi LMMT du 25 juin 2008 fixe une période d’essai légale.
Elle concerne donc tous les salariés depuis le 27 juin 2008.
Elle dépend du statut du salarié et peut être renouvelée une fois seulement.
Les durées maximales sont :
Catégories personnel | Durée initiale maximum |
---|---|
Ouvrier et employé | 2 mois |
TAM | 3 mois |
Cadres | 4 mois |
Périodes d’essai prévues par des accords collectifs avant la loi
Lors de la promulgation de la loi LMMT, le législateur a prévu les cas particuliers d’entreprises déjà soumises à des périodes d’essais réglementées.
L’article L 1221-22 du Code du travail donne les cas d’exception permettant de fixer des périodes d’essai différentes des périodes d’essai légales.
Dans l’affaire concernée, lorsque la période d’essai conventionnelle a une durée plus longue que la période d’essai légale, son application n’est possible que si l’accord de branche a été réalisé avant la promulgation de la loi.
Situation | Conclusion |
---|---|
L’accord collectif prévoit une période d’essai plus courte. | L’accord a été signé APRES LMMT : l’accord s’applique. |
L’accord de branche prévoit une période d’essai plus longue | Cet accord s’applique s’il a été réalisé AVANT LMMT |
Il semblerait, compte tenu du présent arrêt, que la Cour de cassation fixe néanmoins une « certaine limite » à ne pas dépasser !
Une période d’essai de 6 mois semble ne pas être dans la « norme » de l’acceptable.
Rappelons enfin que la Cour de cassation a récemment décidée, qu’une période d’essai de 1 an était trop longue, pour un salarié cadre.
Si vous voulez retrouver cet arrêt, vous le pouvez en cliquant ici.
Lire aussi : Période d'essai pour un cadre : un an, c'est… trop long ! Jurisprudence
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