Licenciement d’un salarié qui ne sait ni lire ni écrire : pas de procédure particulière !

Jurisprudence
Licenciement

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Cette affaire concerne un salarié engagé en qualité de manœuvre par contrat verbal du 2/11/2002. 

Licencié le 16/09/2008, il saisit la juridiction prud’homale pour contester la légitimité de son licenciement et demander diverses indemnités.

Le salarié indique dans cette affaire, que ne sachant ni lire ni écrire, la lettre de licenciement qui lui a été remise ne lui permettait pas d’avoir connaissance des raisons qui motivaient son licenciement.

Il ajoute également que la rupture de son contrat de travail s’est faite en l’absence de tout entretien préalable.

Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison au salarié. 

Elle relève que si l'employeur verse au débat une lettre motivée portant la mention "reçu en main propre ce jour", elle retient qu'il n'est pas suffisamment établi, en l'absence de l'entretien préalable prévu par la loi, que le salarié, qui ne sait ni lire ni écrire, a eu une connaissance précise du grief qui lui était imputé ;estiment que la lettre remise en main propre par l’employeur. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que, pour dire que le licenciement du salarié ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, après avoir relevé que si l'employeur verse au débat une lettre motivée portant la mention "reçu en main propre ce jour", retient qu'il n'est pas suffisamment établi, en l'absence de l'entretien préalable prévu par la loi, que le salarié, qui ne sait ni lire ni écrire, a eu une connaissance précise du grief qui lui était imputé ;

Les juges de la Cour de cassation ne sont pas du même avis, ils cassent et annulent l’arrêt de la cour d’appel et renvoient les 2 parties devant une nouvelle cour d’appel. 

Ils relèvent que l’absence d’entretien préalable :

  • N’a pas pour effet de priver la cause du licenciement de son caractère réel et sérieux ;
  • Constitue une irrégularité de procédure. 

La Cour de cassation ajoute que la loi n’impose pas de procédures particulières pour un licenciement prononcé à l’encontre d’un salarié illettré. 

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors d'une part que l'absence d'entretien préalable n'a pas pour effet de priver la cause du licenciement de son caractère réel et sérieux et, d'autre part, que la loi n'impose pas d'autre modalité de notification du licenciement que celle qui résulte de l'envoi d'une lettre recommandée énonçant les motifs de cette mesure, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Cour de cassation du , pourvoi n°11-20371

Cette affaire permet de proposer de nombreux commentaires car la situation est particulière.

Absence d’entretien préalable

La Cour de cassation relève que le licenciement a été prononcé en l’absence d’entretien préalable.

Elle considère que le non respect de cette procédure :

  • N’a pas pour effet de priver la cause du licenciement de son caractère réel et sérieux ;
  • Constitue une irrégularité de procédure. 

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors d'une part que l'absence d'entretien préalable n'a pas pour effet de priver la cause du licenciement de son caractère réel et sérieux

Les conséquences d’un licenciement irrégulier

Il existe 2 régimes concernant les sanctions pour non respect de la procédure légale :

 

Régime de « droit commun » applicable aux salariés ayant au moins d’ancienneté dans une entreprise de 11 salariés et plus :

  • Versement d’une indemnité égale au plus à 1 mois de salaire ;
  • Cette indemnité ne se cumule pas avec l’éventuelle indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 Régime applicable aux salariés ayant moins de 2 ans d’ancienneté ou au licenciement dans une entreprise de moins de 11 salariés :

  • Le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts (sans valeur « plancher » ou « plafond ») fixés en fonction du préjudice ;
  • Par exception, en cas de non respect des règles relatives au conseiller du salarié, l’indemnité de droit commun pour irrégularité de procédure de 1 mois de salaire maximum (et non l’indemnité calculée en fonction du préjudice subi) est due au salarié ;
  • En cas d’absence de cause réelle et sérieuse et d’irrégularité de procédure, le salarié perçoit les deux indemnisations. 

Pas d'information « orale »

Autre commentaire que nous pouvons ressortir de la présente affaire. 

La Cour de cassation ajoute que la loi n’impose pas de procédures particulières pour un licenciement prononcé à l’encontre d’un salarié illettré. 

Ainsi, si « nul n’est censé ignorer la loi », on pourrait avoir envie de dire « nul n’est censé ne savoir ni lire ni écrire » ?

Extrait de l’arrêt :

(…) et, d'autre part, que la loi n'impose pas d'autre modalité de notification du licenciement que celle qui résulte de l'envoi d'une lettre recommandée énonçant les motifs de cette mesure, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

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