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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé le 1er septembre 1988 en qualité d'applicateur en orthoprothèse du 1er septembre 1998 au 4 septembre 2007.

Dans cette entreprise, une prime exceptionnelle lui est versée 2 fois par an, en juillet et décembre, depuis 1990.

Durant l’année 2007, la prime est à nouveau versée, mais le salarié sollicite le paiement pour la période de juillet à novembre 2007. 

De ce fait, le salarié saisit la juridiction prud’homale afin d’obtenir le paiement de la prime exceptionnelle, au motif que son versement constitue un usage.

Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison au salarié.

Mais les juges de la Cour de cassation ne sont pas du même avis.

Ils cassent et annulent l’arrêt de la cour d’appel et renvoient les deux parties devant une nouvelle cour d’appel. 

Les juges relèvent que le calcul de la prime n’avait pas le caractère de fixité, lui ôtant ainsi sa qualité d’usage. 

Extrait de l’arrêt

Attendu, cependant, que le paiement d'une prime est obligatoire pour l'employeur lorsque son versement résulte d'un usage répondant à des caractères de généralité, constance et fixité ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater la fixité des éléments de calcul de la prime exceptionnelle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société X… orthopédie au paiement de la somme de 13 533 euros au titre de la prime exceptionnelle du second semestre 2007, outre 1 353,30 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 16 décembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°11-12517

Commentaire de LégiSocial

Dans cette affaire, la prime exceptionnelle versée au salarié :

  • Variait d’une année à l’autre ;
  • Et les conditions d’attribution n’étaient pas précisées.

Extrait de l’arrêt 

1°) ALORS QUE le versement par l'employeur d'une prime n'acquiert la valeur contraignante d'un usage que si cette prime présente les caractères de constance, fixité et généralité dans l'entreprise ; qu'en retenant, pour condamner société X… Orthopédie à payer à M. X... une prime exceptionnelle sur le second trimestre 2007, que cette pratique constante, générale et fixe suivie par l'entreprise de verser aux salariés une prime exceptionnelle avait acquis la valeur contraignante de l'usage, tout en relevant que ses conditions d'attribution n'étaient pas précisées et que son montant variait suivant qu'elle était versée en juillet ou en décembre de l'année en cours, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que cette prime exceptionnelle ne revêtait aucun caractère de fixité et de constance, susceptible de la rendre obligatoire pour l'employeur, et a ainsi violé ensemble les articles L. 3211-1 et L. 1221-1 du code du travail et 1134 du Code civil ; 

2°) ALORS QUE le versement par l'employeur d'une prime n'acquiert la valeur contraignante d'un usage que si cette prime présente les caractères de constance, fixité et généralité dans l'entreprise ;qu'ayant constaté que la pratique suivie dans l'entreprise était de verser une prime exceptionnelle aux salariés récompensant leur esprit d'équipe et leur dynamisme, la cour d'appel ne pouvait condamner la société X…  Orthopédie à payer à M. X... une prime exceptionnelle sur le second trimestre 2007, en affirmant que cette pratique constante, générale et fixe avait acquis la valeur contraignante de l'usage, puisqu'il résultait de ses propres constatations que l'attribution de la prime exceptionnelle dépendait du mérite de chaque salarié et, donc, de critères qui, subjectifs et aléatoires, révélaient nécessairement l'absence de constance, de généralité et de fixité de cette prime ; qu'elle a ainsi violé les L. 3211-1 et L. 1221-1 du code du travail ;

Ce qui définit un usage

Profitons de cette affaire pour rappeler que 3 conditions doivent  cumulativement être respectées pour que l’on soit face à un usage. 

Ces 3 conditions sont :

 1 : FIXITE 

Fixité dans le montant ou la façon de calculer ou de déterminer l’avantage (exemple : 13ème mois, prime selon l’ancienneté dans l’entreprise, etc.).

2 : GENERALITÉ 

Applicable pour l’ensemble du personnel ou pour une catégorie (exemple pour les cadres uniquement mais en veillant à justifier la raison pour laquelle seuls certains salariés bénéficient de l’usage, au risque que cette attribution puisse être jugée de discriminatoire).

3 : CONTINUITÉ 

Pratique répétée (exemple une prime versée pendant 3 mois n’est pas considérée comme un usage.

 (Cour de cassation , arrêt du 20/10/1994)

Ce qui veut dire aussi, que si l’une (au moins) des 3 conditions n’est pas remplie, nous ne pouvons alors pas parler d’un « usage ».