Contexte de l'affaire
Cette affaire concerne un salarié, engagé en qualité de formateur par un très important organisme de formation, le 19 juin 1995.
A compter du 1er janvier 2001, il devient formateur itinérant.
Il décide de saisir la juridiction prud'homale de demandes en paiement d'une somme au titre des heures supplémentaires générées par ses déplacements dans les différents centres de formation au cours des années 2002 à 2006 et en paiement de dommages-intérêts.
Dans un premier temps, la Cour d’appel de Toulouse donne raison au salarié et condamne l’employeur à verser des rappels de salaire pour heures supplémentaires ainsi qu’au titre de repos compensateur.
Extrait de l’arrêt
Attendu que la cour d'appel a condamné X… à payer au salarié, au titre de ses temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail pour la période comprise entre le 20 janvier 2005 et le 10 février 2006, un rappel de salaire pour heures supplémentaires et repos compensateur calculé selon les mêmes principes que pour la période 2002-2004, à savoir sur la base d'un temps de travail effectif ;
Mais la Cour de cassation n’est pas du même avis, les juges cassent et annulent l’arrêt et renvoient les deux parties devant une nouvelle cour d’appel.
Extrait de l’arrêt
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence d'accord collectif ou d'engagement unilatéral de l'employeur, s'il appartient au juge de fixer le montant de la contrepartie due, il ne peut pour ce faire assimiler le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail à un temps de travail effectif, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Commentaire de LégiSocial
Le présent arrêt de la Cour de cassation nous permet de rappeler quelques principes importants qui concernent le temps de déplacement professionnel.
Rappel de la jurisprudence
Avant de donner la définition du temps de déplacement, il est bon d’avoir à l’esprit une jurisprudence de la cour de cassation de 2004.
Les juges avaient indiqué alors que :
- Si le temps de déplacement est supérieur aux temps normal, alors ce dépassement constitue du temps de travail.
La loi de 2005 met fin à cette position afin de donner une définition légale du temps de déplacement.
Les notions de base
C’est l’article 69 de la dite de « cohésion sociale » qui donne la définition du temps de déplacement comme suit :
Loi n°2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale
Article 69
Après le troisième alinéa de l'article L. 212-4 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif. Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il doit faire l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière, déterminée par convention ou accord collectif ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'ils existent. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail ne doit pas entraîner de perte de salaire. »
De ce fait, le code du travail indique :
Article L3121-4
Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif.
Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière. Cette contrepartie est déterminée par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'il en existe. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail n'entraîne aucune perte de salaire.
Conclusions
- Le temps de déplacement professionnel correspond au temps passé par le salarié pour se rendre de son domicile à son travail et vice versa ;
- Le temps de déplacement professionnel n’est pas du temps de travail effectif;
- Toutefois, lorsque le temps de déplacement dépasse le « temps normal », il doit faire l’objet d’une contrepartie.
Contrepartie
Le dépassement du temps de trajet habituel doit faire l’objet d’une contrepartie.
Cette contrepartie sous forme de repos ou financière est déterminée par :
- Convention ;
- Accord collectif ;
- À défaut par décision unilatérale de l’employeur prise après consultation du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, s’ils existent.
Ne pas confondre avec le temps de mission
La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail ne doit pas entraîner de perte de salaire.
Il s’agit en l’occurrence de temps de déplacement dans le cadre d’une mission, à rémunérer comme temps de travail effectif.
Article L3121-4
Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif.(...)
La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail n'entraîne aucune perte de salaire.