Contexte de l'affaire
Une salariée est engagée le 7 mars 1988 par une association de sauvegarde de l’enfance, des adultes et des adolescents.
Elle y occupe en dernier lieu les fonctions de moniteur d’atelier.
En arrêt-maladie à compter du 4 janvier 2007, elle a, à l'issue d'une visite médicale en date du 13 juin 2007, été déclarée par le médecin du travail inapte à la reprise de son poste.
Suite à une visite auprès de son médecin traitant, une prolongation d’arrêt de travail est prononcée.
Au bout de 6 mois d’arrêt supplémentaire, son employeur procède à son licenciement par lettre du 4 décembre 2007 pour absence prolongée entraînant une désorganisation du service et la nécessité de la remplacer définitivement.
La salariée saisit la juridiction prud’homale, estimant son licenciement sans cause réelle et sérieuse, compte tenu du fait qu’une inaptitude avait été prononcée par la médecine du travail et que la procédure dans cette situation particulière devait être respectée.
La cour d’appel, dans un premier temps, donne raison à la salariée.
Les juges de la Cour de cassation confirment l’arrêt et rejettent le pourvoi.
Extrait de l’arrêt
Et attendu qu'ayant constaté que l'employeur, sans demander l'organisation d'une seconde visite, avait licencié la salariée le 4 décembre 2007 pour un motif autre que l'inaptitude, la cour d'appel, sans être tenue de procéder à une recherche que ses énonciations rendaient inopérante, a, tirant les conséquences légales de cette méconnaissance des dispositions d'ordre public des articles L. 1226-2 et R. 4624-31 du code du travail excluant de s'en tenir aux motifs énoncés par la lettre de licenciement, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Commentaire de LégiSocial
C’est un arrêt important que rend en l’espèce la Cour de cassation.
On peut en conclure que lorsque le salarié est déclaré inapte « a priori », c’est-à-dire à l’issue de la 1ère visite médicale, la procédure en cas d’inaptitude (notamment l’obligation de faire passer au salarié une 2ème visite médicale) doit être observée.
Cela interdit le licenciement motivé par des absences pour maladie ayant pour effet de perturber le fonctionnement de l’entreprise.
A l’occasion de cette affaire, ce sont bien deux procédures de licenciement différentes qui « s’entrechoquent » !
Licenciement non disciplinaire en raison de la maladie
La prolongation ou répétitions d’arrêts de maladie peuvent amener à un licenciement.
Il est important de signaler que ce n’est pas l’état de santé du salarié qui est à prendre en compte (voir article L 1132-1 précité), mais le fait que l’entreprise se trouve dans l’obligation d’employer régulièrement un salarié remplaçant le salarié en arrêt de travail.
Un arrêt de la Cour de cassation du 26 janvier 2011 indique que le « remplaçant » doit bénéficier de la même durée de travail au risque que le licenciement du salarié malade ne soit reconnu sans cause réelle et sérieuse.
Licenciement pour inaptitude
Le licenciement est prononcé:
- Au terme de 2 visites médicales (ou d’une seule s’il y a constatation d’une situation de danger) ;
- De la reconnaissance d’inaptitude par le médecin du travail ;
- De l’impossibilité de reclassement dans l’entreprise.
Inaptitude prononcée par… le bon médecin
Seul le médecin du travail est habilité à prononcer l’inaptitude du salarié au travail.
La Cour de cassation indique que seule la médecine du travail est compétente pour prononcer l’inaptitude au travail du salarié, non le médecin traitant.
Cour de cassation 12/10/2011 pourvoi 10.15549
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Lire aussi : Licenciement suite à une inaptitude déclarée par… le médecin traitant ! Jurisprudence
L’affaire concerne un salarié engagé le 30/07/2004 en qualité de technicien de surveillance. Le 29/06/2006, il remet à son employeur un certificat de son médecin-traitant attestant que son état de ...
Obligation de reclassement
C’est à partir de la 2ème visite médicale (délai de 2 semaines entre chaque visite) auprès de la médecine du travail que l’obligation de reclassement pèse sur l’employeur.
Dans le cas où le maintien du salarié entraîne un danger immédiat, l’inaptitude est prononcée au terme d’une seule visite médicale.
Article R4624-31
Créé par Décret n°2008-244 du 7 mars 2008 - art. (V)
Sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail qu'après avoir réalisé :
1° Une étude de ce poste ;
2° Une étude des conditions de travail dans l'entreprise ;
3° Deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires
Si l’employeur a anticipé les recherches de reclassement, par exemple en commençant au terme de la 1ère visite médicale, ces recherches doivent néanmoins être poursuivies après la 2ème visite médicale auprès de la médecine du travail.
Ne sera par exemple pas prise en compte, l’offre de reclassement intervenu antérieurement à la seconde visite médicale.
Cour de cassation du 28/10/2009 pourvoi 08-42804
Rechercher les possibilités de reclassement… dans tous les cas !
L’employeur doit rechercher toutes les possibilités de reclassement, même si :
- Une inaptitude totale à tout emploi dans l’entreprise a été prononcée ;
Cour de cassation 26/11/2008, pourvoi 07-41284
Cour de cassation 7/07/2004 pourvoi 02-43141
- Le salarié est classé en invalidité 2ème catégorie ;
Cour de cassation du 9/07/2008 pourvoi 07-41318
- Le salarié déclare, avant que l’employeur fasse toute proposition de reclassement, qu’il n’acceptera aucune offre, l’employeur devra respecter ses obligations en matière de reclassement.
Cour de cassation du 16/09/2009 pourvoi 08-42212