Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé en qualité de bus sur des lignes régulières de transport public de personnes dont la distance ne dépasse pas 50 kilomètres.
Dans cette société est applicable la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950.
Le salarié saisit la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment sur le non-respect de la durée maximale quotidienne de travail.
Dans un premier temps, la cour d’appel déboute le salarié de sa demande, estimant que ce dernier n’établissait pas s’être conformé à la réglementation applicable en matière de durée du travail dans le secteur du transport routier pour arguer d’un dépassement du maximum de son temps de travail effectif.
La Cour de cassation n’est pas du même avis, estimant qu’en matière du respect des garanties européennes sur les durées maximales du travail, la charge de la preuve incombe alors à l’employeur.
Charge à ce dernier de prouver que le salarié avait bénéficié du respect de la durée maximale quotidienne.
L’arrêt de la cour d’appel est donc cassé et annulé dans toutes ces dispositions, et les deux parties renvoyées devant une nouvelle cour d’appel.
Extrait de l’arrêt
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en indemnisation au titre du dépassement de la durée maximale quotidienne de travail, l'arrêt retient qu'il n'établit pas s'être conformé aux articles 2, 3 et 4 du décret n° 2003-1242 du 22 décembre 2003 pour arguer d'un dépassement du maximum de son temps de travail effectif journalier ;
Attendu cependant que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;(…) PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Commentaire de LégiSocial
Confirmation de jurisprudence
Le présent arrêt confirme celui rendu récemment par la Cour de cassation.
Extrait de l’arrêt
Mais attendu que les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail relatives à la répartition de la charge de la preuve des heures de travail effectuées entre l'employeur et le salarié ne sont applicables ni à la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne ni à la preuve de ceux prévus par les articles L. 3121-34 et L. 3121-35 du code du travail, qui incombe à l'employeur ; que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 20 février 2013
N° de pourvoi: 11-28811
Profitons de l’affaire présente, pour rappeler quelques notions importantes concernant les durées maximales du travail.
La durée maximale quotidienne
Le code du travail prévoit des durées maximales du temps de travail effectif.
La règle
Le code du travail fixe la durée maximale quotidienne à 10 heures.
Article L3121-34
La durée quotidienne du travail effectif par salarié ne peut excéder dix heures, sauf dérogations accordées dans des conditions déterminées par décret.
Les dérogations possibles
Cette durée peut être dépassée dans des cas prévus par décret.
L’article D 3121-15 du Code du travail prévoit des cas de dérogations limités et pour un surcroît d’activité, qui sont :
- Travaux urgents dans le sens des engagements pris par l’entreprise, de la nature des travaux (sécurité) ;
- Travaux saisonniers ;
- Travaux impliquant une activité accrue pendant certains jours de l’année (jours fériés par exemple, fêtes de Noël, etc.)
Article D3121-15
Créé par Décret n°2008-244 du 7 mars 2008 - art. (V)
Le dépassement de la durée quotidienne maximale du travail effectif, prévue à l'article L. 3121-34, peut être autorisé dans les cas où un surcroît temporaire d'activité est imposé, notamment pour l'un des motifs suivants :
1° Travaux devant être exécutés dans un délai déterminé en raison de leur nature, des charges imposées à l'entreprise ou des engagements contractés par celle-ci ;
2° Travaux saisonniers ;
3° Travaux impliquant une activité accrue pendant certains jours de la semaine, du mois ou de l'année.
Enfin la durée du travail quotidien peut être dépassée (en respectant la limite absolue de 12 heures) en cas de :
- Convention ;
- Accord collectif étendu ;
- Accord collectif d’entreprise ou d’établissement.
Article D3121-19
Créé par Décret n°2008-244 du 7 mars 2008 - art. (V)
Une convention ou un accord collectif de travail étendu ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement peut prévoir le dépassement de la durée maximale quotidienne de travail à condition que ce dépassement n'ait pas pour effet de porter cette durée à plus de douze heures.
A qui s’adresser pour bénéficier de la dérogation ?
Une instruction de la DGT du 29/07/2010 précise que la dérogation à la durée maximale quotidienne peut être obtenue auprès de l’inspection du travail.
Instruction DGT 2010-06 du 29/07/2010
Durée maximale quotidienne pour les mineurs
- Activité pendant les vacances scolaires
La durée maximale est fixée à 7 h par jour.
Article D4153-3
Créé par Décret n°2008-244 du 7 mars 2008 - art. (V)
La durée du travail du mineur ne peut excéder trente-cinq heures par semaine ni sept heures par jour.
- Autres mineurs
La durée maximale est fixée à 8 h par jour.
Article L3162-1
Les jeunes travailleurs ne peuvent être employés à un travail effectif excédant huit heures par jour et trente-cinq heures par semaine.
A titre exceptionnel, des dérogations à ces dispositions peuvent être accordées dans la limite de cinq heures par semaine par l'inspecteur du travail après avis conforme du médecin du travail de l'établissement.
La durée du travail des intéressés ne peut en aucun cas être supérieure à la durée quotidienne ou hebdomadaire normale du travail des adultes employés dans l'établissement.
La durée maximale hebdomadaire
De la même façon, le code du travail limite la durée du travail qui peut être réalisé sur une semaine.
Durée hebdomadaire maximale « absolue »
La durée maximale « absolue » est fixée par le code du travail à 48 h.
Article L3121-35
Au cours d'une même semaine, la durée du travail ne peut dépasser quarante-huit heures. (...)
Durée hebdomadaire maximale sur une période de 12 semaines (durée "relative")
La durée maximale sur une période de 12 semaines consécutives est fixée à 44h.
Article L3121-36
La durée hebdomadaire de travail calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives ne peut dépasser quarante-quatre heures. (...)
Les dérogations possibles
Des dérogations sont possibles mais ne peuvent avoir pour effet :
- De porter la durée maximale « absolue » au-delà de 60h par semaine.
Article L3121-35
(...) En cas de circonstances exceptionnelles, certaines entreprises peuvent être autorisées à dépasser pendant une période limitée le plafond de quarante-huit heures, sans toutefois que ce dépassement puisse avoir pour effet de porter la durée du travail à plus de soixante heures par semaine.
- De porter la durée maximale « moyenne» au-delà de 46h par semaine sur 12 semaines consécutives.
Cette durée maximale « moyenne » peut être toutefois dépassée dans certains secteurs et pour des régions particulières ou au sein de certaines entreprises.
Article L3121-36
(...) Un décret pris après conclusion d'une convention ou d'un accord collectif de branche peut prévoir que cette durée hebdomadaire calculée sur une période de douze semaines consécutives ne peut dépasser quarante-six heures.
A titre exceptionnel dans certains secteurs, dans certaines régions ou dans certaines entreprises, des dérogations applicables à des périodes déterminées peuvent être apportées à la limite de quarante-six heures.
A qui s’adresser pour les dérogations ?
Une instruction de la DGT du 29/07/2010 précise quelles sont les autorités à contacter pour demander une dérogation à la durée du travail.
Demandes de dérogation à la durée maximale hebdomadaire : DIRECCTE (Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi)
Instruction DGT 2010-06 du 29/07/2010
Rappelons que DIRECCTE est l’organisme nouvellement crée et qui est né de la fusion de :
- DDTEFP et DRTEFP (Direction Départementale et Régionale de l’Emploi et de la Formation Professionnelle)
- DDI (Divisions de Développement Industriel)
- DRIRE (Direction Régionale de l'Industrie, de la Recherche et de l'Environnement.)
- DRCCRF (Direction Régionales de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes)
- DRT (Direction Régionale du Tourisme)
- DRCA (Directions Régionales du Commerce et de l’Artisanat)
- DRCE (Directions Régionales du Commerce Extérieur)
- RIE (Chargés de mission Régionaux d’Intelligence Économique)
Les DIRECCTE sont constituées de 3 pôles :
- Pôle 3E « Entreprise-Emploi-Économie »
- Pôle T « politique du travail »
- Pôle C « Concurrence, consommation et répression des fraudes »
Pour les mineurs
- Activité pendant les vacances scolaires
La durée maximale est fixée à 35 h par semaine.
Article D4153-3
Créé par Décret n°2008-244 du 7 mars 2008 - art. (V)
La durée du travail du mineur ne peut excéder trente-cinq heures par semaine ni sept heures par jour.
- Autres mineurs
La durée maximale est fixée à 35 h par semaine (sauf dérogations).
Article L3162-1
Les jeunes travailleurs ne peuvent être employés à un travail effectif excédant huit heures par jour et trente-cinq heures par semaine.
A titre exceptionnel, des dérogations à ces dispositions peuvent être accordées dans la limite de cinq heures par semaine par l'inspecteur du travail après avis conforme du médecin du travail de l'établissement.
La durée du travail des intéressés ne peut en aucun cas être supérieure à la durée quotidienne ou hebdomadaire normale du travail des adultes employés dans l'établissement.