Contexte de l'affaire
L’affaire concerne une salariée engagée en CDD, désigné déléguée syndicale le 19 octobre 2011.
Le terme de son contrat est fixé au 27 octobre 2011.
Considérant que le contrat ne pouvant prendre fin sans avoir sollicité l’accord de l’inspection du travail, la salariée saisit la juridiction prud’homale.
Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison à la salariée.
Mais ce n’est pas l’avis de la Cour de cassation, précisant au passage que la salariée doit avoir bénéficié du statut protecteur au moins 1 mois avant l’échéance du terme du contrat, ce qui correspond au délai de saisine de l'inspection du travail prévu par l'article L. 2421-8 du code du travail, ce qui n’était pas le cas en l'espèce.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour rejeter les demandes de la salariée tendant à la nullité du licenciement et à sa réintégration, l'arrêt énonce qu'elle revendique la protection bénéficiant aux délégués syndicaux à raison de sa désignation le 19 octobre 2011 ; que si la rupture du contrat de travail d'un délégué syndical est en principe nulle dès lors qu'elle n'a pas été précédée de la saisine de l'inspection du travail, encore faut-il que le salarié bénéficie du statut protecteur au moins un mois avant le terme du contrat, ce qui correspond au délai de saisine de l'inspection du travail prévu par l'article L. 2421-8 du code du travail, tel n'étant pas le cas en l'espèce ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'elle avait ordonné la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, sans rechercher si la lettre du syndicat notifiant la désignation de la salariée comme déléguée syndicale n'avait pas été reçue par l'employeur ou si celui-ci n'avait pas eu connaissance de l'imminence de la désignation de la salariée comme déléguée syndicale, avant l'envoi de la lettre du 27 octobre 2011 notifiant la rupture du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'ils requalifient les contrats de travail en contrat à durée indéterminée, les arrêts rendus le 28 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence
Commentaire de LégiSocial
Comme cela est le cas en cas de licenciement, l’arrivée au terme d’un contrat CDD oblige les employeurs à observer des règles particulières.
Demande autorisation inspection du travail
Lorsqu’un contrat CDD concerne un salarié protégé, l’employeur doit obligatoirement obtenir l’autorisation de l’inspection du travail pour mettre fin au contrat.
Cette demande doit être formulée 1 mois avant l’arrivée du terme, et l’inspection du travail statue avant la date du terme du contrat.
Nous noterons que cette obligation s’impose à l’employeur, même si le renouvellement est impossible.
Une affaire récemment abordée par la Cour de cassation le confirme.
Cour de cassation du 23/10/2012 arrêt 11-19210
Nous avons consacré une actualité à ce sujet, que vous pouvez retrouver en cliquant ici.
Lire aussi : Savez-vous gérer la fin de contrat CDD d'un salarié… protégé ? Actualité
Un récent arrêt de la Cour de cassation apporte un éclairage important au sujet de la fin de contrat CDD concernant un salarié protégé. Cet arrêt nous a semblé suffisamment ...
Article L2421-8
L'arrivée du terme du contrat de travail à durée déterminée n'entraîne sa rupture qu'après constatation par l'inspecteur du travail, saisi en application de l'article L. 2412-1, que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire.
L'employeur saisit l'inspecteur du travail un mois avant l'arrivée du terme.
L'inspecteur du travail statue avant la date du terme du contrat.
Quelle que soit la durée du contrat CDD !
La demande d’autorisation doit être respectée, quelle que soit la durée du contrat, y compris pour un contrat de… 3 jours ! (ce qui contredit quelque peu l’arrêt que nous abordons aujourd’hui).
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu que selon l'article L. 436-2 du Code du travail, lorsque le salarié, membre du comité d'entreprise, est titulaire d'un contrat à durée déterminée, l'arrivée du terme du contrat n'entraîne la cessation du lien contractuel qu'après constatation par l'inspecteur du Travail saisi dans les conditions de l'article L. 436-1 du même Code, que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire ; que cette obligation s'impose à l'employeur quelle que soit la durée du contrat à durée déterminée ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident.
Cour de cassation 11/12/2001 N° de pourvoi: 99-43799
Pas de demande d’autorisation
L’employeur n’a pas l’obligation de saisir l’inspection du travail, lorsque le salarié fait acte de candidature moins de 1 mois avant le terme du contrat.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu qu'il résulte des articles L. 425-2 et L. 436-2 du Code du travail, que lorsque le salarié fait acte de candidature moins d'un mois avant l'expiration du contrat à durée déterminée, l'arrivée du terme de ce contrat entraine la cessation du lien contractuel sans que l'employeur soit tenu de saisir l'inspecteur du travail, cette formalité ne lui étant imposée que lorsque le salarié est protégé avant le point de départ du délai d'un mois ; qu'il appartient seulement au salarié qui s'estime victime d'une discrimination d'établir la disparité de situation qu'il allègue et à l'employeur de s'expliquer sur les raisons de celle-ci ; d'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal d'instance a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Cour de cassation du 28/05/2003 N° de pourvoi: 02-60006
Mesure discriminatoire
Lorsque l’autorisation est demandée à l’inspecteur du travail, ce dernier vérifie si le salarié ne fait pas l’objet d’une mesure discriminatoire
Article L2421-8
L'arrivée du terme du contrat de travail à durée déterminée n'entraîne sa rupture qu'après constatation par l'inspecteur du travail, saisi en application de l'article L. 2412-1, que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire. (…)
Consultation du comité d’entreprise ?
Le Conseil d’État considère que dans l’hypothèse de l’arrivée du terme du contrat, l’employeur n’est pas contraint de consulter au préalable le comité d’entreprise.
Conseil d'Etat, 7 / 9 SSR, du 10 juin 1992, 94626
Et si le contrat est conclu sans terme précis ?
Date de la saisine
Lorsque le motif de recours est un contrat de remplacement, la saisine de l’inspection de travail doit se faire à partir du moment où l’employeur est informé de la fin de l’absence du salarié remplacé, à la reprise de son poste ou à la rupture du contrat.
Extrait de l'arrêt:
Et attendu, ensuite, que le contrat à durée déterminée ne comportant pas de terme précis, l'employeur n'avait à saisir l'autorité administrative qu'à compter du jour où le salarié remplacé faisait connaître son intention de mettre fin à son contrat de travail ;
Cour de cassation du 20/06/2000 N° de pourvoi: 97-41363
Concrètement, le terme du contrat peut intervenir alors que la procédure d’autorisation est en cours.
Poursuite du contrat au-delà du terme
Le CDD qui se poursuit alors au-delà du terme ne doit pourtant pas être requalifié en contrat CDI (à la différence avec ce qui est prévu légalement par l’article L 1243-11).
Extrait de l'arrêt:
que la cour d'appel qui a constaté que le contrat à durée déterminée ne s'était poursuivi, au-delà du 4 août 1989, qu'en raison de la nécessité pour l'employeur de respecter la procédure protectrice des salariés protégés, a exactement décidé que le contrat était resté à durée déterminée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Cour de cassation du 20/06/2000 N° de pourvoi: 97-41363
Article L1243-11
Lorsque la relation contractuelle de travail se poursuit après l'échéance du terme du contrat à durée déterminée, celui-ci devient un contrat à durée indéterminée.
Le salarié conserve l'ancienneté qu'il avait acquise au terme du contrat de travail à durée déterminée.
La durée du contrat de travail à durée déterminée est déduite de la période d'essai éventuellement prévue dans le nouveau contrat de travail
Poursuite du contrat au-delà du terme et autorisation refusée
Dans ce cas, le contrat CDD est requalifié en contrat CDI, le contrat est réputé s’être poursuivi au-delà du terme.
Le CDD qui se poursuit alors au-delà du terme ne doit pourtant pas être requalifié en contrat CDI (à la différence avec ce qui est prévu légalement par l’article L 1243-11).
Extrait de l'arrêt:
Et attendu ensuite que l'arrêt a relevé que, par courrier du 12 novembre 2002, l'employeur avait saisi l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de non-renouvellement du contrat de travail de Mme X..., que ce dernier avait refusée le 27 novembre 2002 ; qu'il en résulte qu'en raison de la décision de refus de l'inspecteur du travail, la relation de travail est devenue à durée indéterminée en application de l'article L. 122-3-10 du code du travail ; que, par ce motif, substitué à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ; que le moyen n'est pas fondé ;
Cour de cassation du 27/09/2007 N° de pourvoi: 06-41086
Les sanctions
Absence de saisine inspection du travail
Si l’employeur ne remplit pas son obligation, il peut alors être condamné à verser au salarié les sommes suivantes :
- Une indemnité au titre de la violation du statut protecteur, correspondant aux salaires que le salarié aurait perçu entre le lendemain du terme du contrat et l’expiration de la période de protection ;
- Une indemnité au titre du défaut de saisine de l’inspection du travail (valeur estimée par les juges).
Nota :
Si le salarié retrouve un emploi pendant la période de protection concernée par l’indemnité au titre de la violation du statut protecteur, les salaires éventuellement perçus chez le nouvel employeur ne viennent pas en déduction de l’indemnité.
On considère que l’indemnité au titre de la violation du statut protecteur a la qualité d’indemnité « forfaitaire ».
Mesure discriminatoire
Lorsque l’inspecteur du travail constate que le non-renouvellement à son terme du CDD constitue une mesure discriminatoire, le contrat doit être requalifié en CDI.
Cour de cassation du 27/09/2007 N° de pourvoi: 06-41086