Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé en qualité de directeur général le 15 mars 2002.
Son contrat de travail comporte une clause de non-concurrence, pour laquelle son employeur lui verse une contrepartie tous les mois, à hauteur de 304,90 €.
Il est licencié pour faute grave.
Lors de la rupture, l’entreprise lève la clause de non-concurrence, et s’estime fondée à réclamer le remboursement des sommes versées en cours d’exécution du contrat de travail.
Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison à l’employeur estimant qu’aucune clause de nullité n’affecte la clause de non-concurrence, le remboursement demandé par l’entreprise est donc fondé.
Mais la Cour de cassation n’est pas du même avis.
Les juges rappellent que la contrepartie financière prévue par une clause de non-concurrence ne peut être versée qu’après la rupture du contrat.
Son versement en cours d’exécution du contrat la rend nulle.
Extrait de l’arrêt :
Attendu, d'une part, que le montant de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence qui a pour objet d'indemniser le salarié tenu, après rupture du contrat de travail, d'une obligation limitant ses possibilités d'exercer un autre emploi, ne peut dépendre uniquement de la durée d'exécution du contrat ni son paiement intervenir avant la rupture et d'autre part, que le paiement pendant la période d'exécution du contrat de travail de la contrepartie financière prévue par une clause de non-concurrence nulle, qui s'analyse en un complément de salaire, n'est pas dénué de cause ;
Attendu que pour condamner le salarié à rembourser une certaine somme au titre de la clause de non-concurrence, l'arrêt retient qu'aucune cause de nullité n'affecte cette clause assortie d'une contrepartie financière sous la forme du versement d'une indemnité mensuelle et que l'employeur ayant renoncé à l'application de cette clause, il en résulte que le salarié n'a jamais été soumis à une obligation de non-concurrence ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la clause de non-concurrence qui prévoyait le versement d'une indemnité avant la rupture du contrat de travail était nulle et que l'employeur ne pouvait obtenir la restitution des sommes versées au titre d'une clause nulle, lesquelles constituaient un complément de salaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. X... à payer à la société L… la somme de 19 818, 50 euros en remboursement des sommes versées au titre de la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 15 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Commentaire de LégiSocial
Le présent arrêt de la Cour de cassation n’est pas surprenant, les juges persistant dans leur position au sujet de la clause de non-concurrence.
Objet de nombreux contentieux, la clause de non-concurrence contient de nombreux aspects que nous vous rappelons brièvement.
Principe et objectif
La clause de non-concurrence a pour but d'interdire au salarié, après la rupture de son contrat, l'exercice d'une activité qui porterait préjudice à son ancien employeur.
Les 5 Conditions à remplir
Afin que la clause de non-concurrence soit reconnue valide, il convient de respect les 5 conditions cumulatives suivantes :
- La clause doit être insérée clairement dans le contrat de travail (sauf dispositions conventionnelles contraires) ;
- Elle doit respecter les dispositions conventionnelles si celles-ci sont plus favorables ;
- Elle doit nécessairement être justifiée par l'intérêt de l'entreprise et ne pas empêcher le salarié de retrouver un emploi ;
- La clause de non-concurrence doit être limitée dans le temps, dans l’espace et dans l’objet ;
- La clause de non-concurrence doit comporter une contrepartie financière.
2 situations différentes lors de la rupture du contrat de travail
Première situation:
L’employeur peut « lever » la clause de non-concurrence lors du départ de son salarié (en pratique, cela se produit assez souvent).
Aucune contrepartie financière n’est alors réglée et le salarié n’est en aucune façon liée par la clause.
Cette renonciation doit nécessairement être prononcée dans le délai prévu par la Convention collective ou le contrat de travail.
Seconde situation :
Si l’employeur ne libère pas le salarié de sa clause de non-concurrence, il doit alors régler au salarié les sommes prévues par la clause, au titre de contrepartie financière.
Ces sommes sont considérées comme des salaires, soumises à toutes les cotisations sociales et imposables au titre de l’impôt sur le revenu.
L’employeur doit aussi régler les congés payés correspondant, en pratique beaucoup d’entreprise ajoutent une ligne supplémentaire calculée à 10% de la contrepartie financière en paiement des congés payés dus.