Contexte de l'affaire
Une salariée est engagée le 5 août 2002 en qualité de consultant senior, avec une période d'essai de 3 mois.
Son contrat stipule une obligation de non-concurrence d'une durée de 12 mois à compter de la cessation effective des fonctions.
L’employeur met fin le 9 septembre 2002 à la période d'essai.
La salariée saisit la juridiction prud’homale d’une demande de dommages-intérêts, relevant que la clause de non-concurrence prévue dans son contrat de travail n’est pas licite, au motif qu’aucune contrepartie financière n’y est prévue.
La cour d’appel déboute la salariée de sa demande, relevant que cette dernière n’avait pas respecté ses obligations contractuelles en continuant d’entretenir des contacts avec une société concurrente après rupture du contrat de travail.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes de dommages-intérêts, l'arrêt a retenu qu'elle n'avait pas respecté ses obligations contractuelles, en continuant d'entretenir des contacts avec une société concurrente après la rupture du contrat de travail, alors qu'elle était astreinte à une obligation de non-concurrence que l'employeur n'avait pas levée ;
Mais sans surprise, la Cour de cassation n’est pas du même avis, rappelant une fois encore que la clause de non-concurrence est frappée de nullité lorsqu’aucune contrepartie financière n’est prévue.
Extrait de l’arrêt :
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la clause de non-concurrence était dépourvue de contrepartie financière, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre de l'obligation de non-concurrence dirigée à l'encontre de la société H…, l'arrêt rendu le 11 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Commentaire de LégiSocial
La clause de non-concurrence contient de nombreuses particularités que nous allons rappeler…
Principe et objectif
La clause de non-concurrence a pour but d'interdire au salarié, après la rupture de son contrat, l'exercice d'une activité qui porterait préjudice à son ancien employeur.
Conditions de validité ?
Afin que la clause soit licite, 5 conditions doivent être cumulativement respectées.
Ainsi la clause de non-concurrence doit :
- Être insérée clairement dans le contrat de travail (sauf dispositions conventionnelles contraires) ;
- Respecter les dispositions conventionnelles si celles-ci sont plus favorables ;
- Nécessairement être justifiée par l'intérêt de l'entreprise et ne pas empêcher le salarié de retrouver un emploi ;
- Être limitée dans le temps, dans l’espace et dans l’objet ;
- Comporter une contrepartie financière.
Que se passe-t-il à la rupture du contrat de travail ?
Cas numéro 1 :
L’employeur peut « lever » la clause de non-concurrence lors du départ de son salarié (en pratique, cela se produit assez souvent).
Aucune contrepartie financière n’est alors réglée et le salarié n’est en aucune façon liée par la clause.
Cette renonciation doit nécessairement être prononcée dans le délai prévu par la Convention collective ou le contrat de travail.
Cas numéro 2 :
Si l’employeur ne libère pas le salarié de sa clause de non-concurrence, il doit alors régler au salarié les sommes prévues par la clause, au titre de contrepartie financière.
Ces sommes sont considérées comme des salaires, soumises à toutes les cotisations sociales et imposables au titre de l’impôt sur le revenu.
L’employeur doit aussi régler les congés payés correspondant, en pratique beaucoup d’entreprise ajoutent une ligne supplémentaire calculée à 10% de la contrepartie financière en paiement des congés payés dus.
Date de paiement de l’indemnité
Elle est versée dés le départ effectif du salarié en cas de dispense de préavis.
Cour de Cassation du 15/07/1998 arrêt 96-40866
Il n’est pas possible de prévoir le versement d’une indemnité au-delà de la période concernée par la clause de non concurrence.
Si cela était le cas, la clause de non concurrence serait nulle.
Régime fiscal et social de l’indemnité
Comme nous l’avons indiqué précédemment, la compensation financière versée au titre de la clause de non concurrence a valeur de salaire.
Elle est donc :
- Soumise aux cotisations sociales, y compris la CSG et la CRDS ;
- Imposable au titre de l’impôt sur le revenu.
Selon la circulaire ARRCO-AGIRC du 7/11/2007 (circulaire 2007-19), l’indemnité doit être considérée comme une « somme isolée ».
Il est conseillé sur le bulletin de salaire de faire apparaître l’indemnité sur une ligne isolée, en incluant l’indemnité de congés payés correspondante ou en prévoyant une autre ligne pour l’indemnité de congés payés correspondante.
Sur le calcul de l’indemnité de congés payés : arrêt de la Cour de cassation
Arrêt de la Cour de cassation, Chambre sociale, rendu le 23/06/2010, pourvoi 08-70233
Enfin, l’indemnité doit apparaître sur l’attestation Pôle emploi dans le cadre 7.1 (salaires des 12 derniers mois) ou 7.2 (primes et indemnités de périodicité différente).