La clause de mobilité couvre tout le territoire national : elle est licite selon la Cour de cassation

Jurisprudence
Contrat de travail

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Contexte de l'affaire

Dans cette affaire, ce sont 4 salariés qui saisissent la juridiction prud’homale.

Ces 4 salariés sont engagés en qualité de de coordinateurs des opérations France. 

Leur contrat de travail prévoit une clause de mobilité ainsi libellée : « Compte-tenu de la nature de ses fonctions, M. prend l'engagement d'accepter tout changement de lieu de travail nécessité par l'intérêt ou le fonctionnement de l'entreprise dans la limite géographique du territoire français sans que ce changement constitue une modification du contrat de travail ».

Extrait de l’arrêt :

« Compte-tenu de la nature de ses fonctions, M. prend l'engagement d'accepter tout changement de lieu de travail nécessité par l'intérêt ou le fonctionnement de l'entreprise dans la limite géographique du territoire français sans que ce changement constitue une modification du contrat de travail » 

Exerçant leur activité en Meurthe-et-Moselle, ils sont licenciés pour avoir refusé leur mutation à Paris.

Mais les salariés saisissent la juridiction prud'homale, estimant la clause de mobilité non applicable car insuffisamment précise. 

Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison au salarié, estimant que la seule mention du « territoire français » ne pouvait suffire à rendre précise la clause de mobilité contenue dans le contrat de travail.

Pour les juges de la cour d’appel, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.  

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, les arrêts retiennent que la seule mention du « territoire français » ne peut suffire à rendre précise la clause de mobilité puisque n'excluant pas les « DOM-TOM », que cette clause ne comporte aucune précision sur sa zone géographique d'application et ne permet pas au salarié, au moment de la signature du contrat, de savoir si elle concerne les établissements existants ou également ceux à venir ; 

Ce n’est pas l’avis de la Cour de cassation qui casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, renvoyant les deux parties devant une nouvelle cour d’appel.

La clause de mobilité était suffisamment précise et ne conférer pas à l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée.

Extrait de l'arrêt:

Qu'en statuant ainsi, alors que la clause de mobilité définissait de façon précise sa zone géographique d'application et ne conférait pas à l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS : 
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils disent les licenciements dépourvus de cause réelle et sérieuse et condamnent la société E… au paiement de diverses sommes à ce titre, les arrêts rendus le 12 décembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ; 

Cour de cassation du , pourvoi n°13-11906 pourvoi n°13-11907 pourvoi n°13-11908 pourvoi n°13-11909

Commentaire de LégiSocial

La clause de mobilité est à l’origine de nombreux contentieux, raison pour laquelle nous en rappelons les principes et surtout les conditions de validité. 

Principe et objectif

Cette clause permet à l’employeur de se réserver la possibilité de modifier le lieu de travail du salarié et cela sans son accord.

  • La mutation du salarié = modification des modalités d’exécution du contrat de travail ;
  • Le refus du salarié= sanction disciplinaire qui peut aller jusqu’au licenciement pour faute grave. 

Conditions de validité ?

On peut dénombrer 7 conditions de validité  à respecter :

1/Sur le contrat de travail : 

Elle doit être expressément indiquée sur le contrat de travail (sauf dispositions conventionnelles contraires).

2/La zone géographique précise : 

La clause doit préciser la zone géographique de mobilité en sachant qu’aucune disposition légale ne limite la distance ou l’éloignement qui peut être imposé au salarié.

Le salarié peut donc voir sa clause de mobilité porter sur un département, une région, toute la France, et pourquoi pas sur plusieurs pays.

 3/Le respect de la convention collective :

Avant d’insérer une telle clause dans un contrat de travail, l’employeur doit veiller au respect des procédures prévues par la convention collective dont il dépend.

 4/Changement unilatéral impossible :

L’employeur ne peut sans l’accord du salarié modifier la zone géographique concernée par la clause.

Cette modification unilatérale serait alors interprétée comme la modification du contrat de travail sans l’accord du salarié, qui pourrait conduire par exemple à une prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié. 

5/Rupture automatique du contrat :

L’employeur ne peut en aucun cas prévoir la rupture automatique du contrat en cas de refus du salarié de se soumettre à cette clause de son contrat de travail.

Cour de cassation 19/05/2004 n° 02-43252 D

  

 6/Clause conforme aux intérêts légitimes de l’entreprise : 

Elle doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise et être proportionnée au but recherché et aux activités du salarié.

Dans le cas contraire, le salarié serait en droit de refuser la mutation.

Son refus ne pourrait en aucun cas être considéré comme un motif permettant un licenciement.

7/ Un délai de prévenance doit être respecté. 

Si la convention collective en prévoit un bien entendu, sachant qu’il n’existe pas de délai minimum légal. 

La clause de mobilité ne doit pas être confondue avec la clause prévoyant des déplacements professionnels.

Ainsi, la clause prévoyant la réalisation du travail dans un lieu différent du lieu d’affectation en fonction des nécessités de l’entreprise ne doit pas être assimilée à une clause de mobilité.

Cour de cassation du 27/05/1998 n° 96-40.929P