Pour mettre un salarié à la retraite, l’employeur doit prouver que le droit à la retraite à taux plein est ouvert

Jurisprudence
Retraite

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Contexte de l'affaire

Un salarié, engagé le 5 septembre 1968, se voit notifié le 16 avril 2002, sa mise à la retraite par son employeur, avec effet au 1er août 2002.

Ayant été déclaré définitivement inapte par le médecin du travail à l'issue d'examens de reprise en date des 6 et 21 mai 2002, le salarié a, le 16 juin 2006, saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment au paiement de sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

Dans un premier temps, la cour d’appel déboute le salarié de sa demande, retenant le fait que le salarié soutenait par simple affirmation, et sans le démontrer, qu’il ne qu'il ne pouvait à la date de sa mise à la retraite bénéficier d'une retraite à taux plein.

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour rejeter la demande de requalification de sa mise à la retraite d'office en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le salarié soutient par simple affirmation et sans le démontrer qu'il ne pouvait à la date de sa mise à la retraite bénéficier d'une retraite à taux plein ; 

  

La Cour de cassation ne partage pas du tout le même avis, et décide de casser et d’annuler l’arrêt de la cour d’appel dans toutes ses dispositions.

Les juges rappellent que, dans le cadre de la procédure de la mise à la retraite, il appartient à l’employeur de rapporter la preuve que le droit à la retraite à taux plein du salarié concerné est bien ouvert.

Les deux parties sont donc renvoyées devant une nouvelle cour d’appel.  

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartient à l'employeur, qui se prévaut de la possibilité donnée à l'entreprise de rompre le contrat de travail d'un salarié qui peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein de rapporter la preuve de ce que les conditions de sa mise à la retraite sont remplies, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 janvier 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Cour de cassation du , pourvoi n°13-14944

Commentaire de LégiSocial

Et si nous évoquions, une fois n’est pas coutume, la mise à la retraite du salarié ?

Mise à la retraite avant 60 ans

La mise à la retraite avant 60 ans n’est plus envisageable depuis le 1er janvier 2008.

Extrait du document d'information synthétique URSSAF établi à la date du 20/01/14

Mises à la retraite avant 60 ans

Les conventions et accords collectifs signés ou étendus avant l’entrée en vigueur de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2007 et prévoyant la possibilité d’une mise à la retraite d’office avant 60 ans cessent de produire leurs effets au plus tard le 31 décembre 2007.
Les indemnités versées à ce titre bénéficient du régime social favorable des indemnités de mise à la retraite.
En revanche, elles sont assujetties, à la charge de l’employeur, à la contribution assise sur les préretraites d’entreprise prévue à l’article L.137-10 du code de la Sécurité sociale dont le taux est fixé à 24,35 % au 1er novembre 2012.
Les indemnités versées à compter du 11 octobre 2007 aux salariés mis à la retraite avant 60 ans doivent être soumises à la contribution assise sur les indemnités de mise à la retraite au taux de 25 % et non plus à la contribution « préretraite » de 24,35 % .

  

Mise à la retraite avant 65 ans et après 60 ans :

La mise à la retraite avant 65 ans n’est plus envisageable depuis le 1er janvier 2010. 

Extrait du document d'information synthétique URSSAF établi à la date du 20/01/14

Mises à la retraite entre 60 et 65 ans

Les accords prévoyant la possibilité d’une mise à la retraite d’office entre 60 et 65 cessent de produire leurs effets au 31 décembre 2009. Jusqu’à cette date, les mises à la retraite entre 60 et 65 ans restent possibles et les indemnités versées dans ce cadre sont soumises au régime social des indemnités de mise à la retraite.
La loi de financement pour 2007, avait également prévu qu’à la suite d’un accord collectif conclu avant l’entrée en vigueur de la loi et ayant prolongé ses effets jusqu’au 31 décembre 2009, les indemnités versées au salarié dont le départ à la retraite avec l’accord de l’employeur interviendrait entre le 1er janvier 2010 et le 1er janvier 2014 seraient exonérées d’impôt sur le revenu et de cotisations de sécurité sociale dans les limites applicables aux indemnités de licenciement, ces indemnités restant soumises dans leur intégralité à la CSG et à la CRDS.
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2008 supprime ce régime social et fiscal de faveur :
Ces indemnités seront soumises au régime social et fiscal des indemnités de départ volontaire à la retraite et seront donc assujetties intégralement aux cotisations de sécurité sociale, à la CSG et à la CRDS et soumises à l’impôt sur le revenu pour leur fraction dépassant 3 050 euros.

  

Article L1237-5

Modifié par LOI n°2010-1330 du 9 novembre 2010 - art. 27

La mise à la retraite s'entend de la possibilité donnée à l'employeur de rompre le contrat de travail d'un salarié ayant atteint l'âge mentionné au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale sous réserve des septième à neuvième alinéas :

Un âge inférieur peut être fixé, dans la limite de celui prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, dès lors que le salarié peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein au sens du code de la sécurité sociale :

1° Dans le cadre d'une convention ou d'un accord collectif étendu conclu avant le 1er janvier 2008 fixant des contreparties en termes d'emploi ou de formation professionnelle ;

2° Pour les bénéficiaires d'une préretraite ayant pris effet avant le 1er janvier 2010 et mise en œuvre dans le cadre d'un accord professionnel mentionné à l'article L. 5123-6 ;

3° Dans le cadre d'une convention de préretraite progressive conclue antérieurement au 1er janvier 2005 ;

4° Dans le cadre du bénéfice de tout autre avantage de préretraite défini antérieurement à la date de publication de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites et ayant pris effet avant le 1er janvier 2010.(…)

NOTA:

Loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010, article 118 II : Les dispositions de l'article 27 sont applicables aux pensions prenant effet à compter du 1er juillet 2011

Mise à la retraite à partir de 65 ans jusqu’à 69 ans

Suite à la modification introduite par la LFSS 2012, les possibilités d’interroger son salarié afin de savoir s’il accepte sa mise à la retraite sont modifiées en tenant compte du nouveau calendrier.

L’employeur interroge son salarié lorsque celui-ci atteint l’âge légal du départ à la retraite, et si ce dernier souhaite poursuivre son activité, la mise à la retraite est alors impossible pendant toute une année supplémentaire. L’employeur pourra ensuite interroger son salarié pendant les 4 années suivantes (66 ans, 67 ans, 68 ans et enfin 69 ans)

  • Délais de prévenance et de réponse : délai de 3 mois à respecter par l’employeur avant la date d’anniversaire du salarié et 1 mois de délai pour la réponse du salarié.

Si le salarié refuse sa mise à la retraite, l’employeur doit alors respecter un délai d’un an avant de proposer à nouveau la mise à la retraite. 

L’employeur se base sur l’âge du salarié à la date de cessation effective du contrat de travail (préavis effectué éventuellement). 

Nouveau calendrier à respecter : 

Dates naissance

Loi LFSS 2012

Entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1951

65 ans et 4 mois

1952

65 ans et 9 mois

1953

66 ans et 2 mois

1954

66 ans et 7 mois

1955

67 ans

A compter du 1er janvier 1956

67 ans

Mise à la retraite à partir de 70 ans :

La LFSS 2012 ne modifie pas les conditions applicables en 2011. 

Ainsi, au 70ème  anniversaire du salarié, la mise à la retraite d’office par l’employeur sera possible sans avoir à demander l’accord du salarié. 

Contribution sur indemnité mise à la retraite

En application de la LFSS 2008 (article 16-VIII), l’employeur qui décide de mettre à la retraite son salarié doit verser une contribution patronale (c Sec Soc art L 137-12 nouveau).

Cette contribution a été par la suite reconduite de façon tacite et elle est toujours en vigueur en 2014.

Article L137-12

Modifié par LOI n°2011-1906 du 21 décembre 2011 - art. 12

Il est institué, à la charge de l'employeur et au profit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, une contribution sur les indemnités versées en cas de mise à la retraite d'un salarié à l'initiative de l'employeur.

Le taux de cette contribution est fixé à 50 % ; toutefois, ce taux est limité à 25 % sur les indemnités versées du 11 octobre 2007 au 31 décembre 2008.

Son taux est de :

  • 50% à partir du 01/01/2009 

Le régime de cette contribution est aligné sur celui de la taxe de 8% sur les contributions patronales de prévoyance complémentaire : les modalités de recouvrement ainsi que les règles de contrôle et de contentieux sont donc les mêmes (Code de sécurité sociale, art L 137-3 et L 137-4)

Extrait du document d'information synthétique URSSAF établi à la date du 20/01/14

Nouvelle contribution sur les indemnités de mise à la retraite

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 institue à la charge de l’employeur une contribution assise sur les indemnités versées en cas de mise à la retraite d’un salarié par l’employeur, que le salarié soit âgé de moins de 65 ans ou de 65 ans et plus.
Le taux de cette contribution est fixé à 25 % pour les indemnités de mise à la retraite versées entre le 11 octobre 2007 et le 31 décembre 2008 et à 50 % pour celles versées à partir de 2009.
La contribution est recouvrée et contrôlée par les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale selon les règles et garanties applicables à ces dernières.
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2008 impose également à l’employeur dont au moins un salarié ou assimilé est parti en préretraite ou a été placé en cessation anticipée d’activité au cours de l’année précédente, de produire à l’URSSAF, au plus tard le 31 janvier de chaque année, une déclaration mentionnant le nombre de salariés partis en préretraite ou placés en cessation anticipée d’activité au cours de l’année précédente, leur âge et le montant de l’avantage qui leur est alloué, le nombre de mises à la retraite d’office à l’initiative de l’employeur et le nombre de salariés âgés de 60 ans et plus licenciés au cours de l’année civile précédant la déclaration.
En cas de défaut de production de cette déclaration dans les délais, une pénalité de 600 fois le taux horaire du Smic est appliquée.
La circulaire ministérielle du 25 février 2008 indique que ces dispositions entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2009 au titre des préretraites, mises à la retraite d’office ou licenciements intervenus en 2008.

Toutefois, les entreprises, qui effectuent leur déclaration annuelle en dématérialisée sous la norme DADS-U, sont dispensées de cette déclaration spécifique lorsque les données portant sur les préretraites, mises à la retraite d’office ou licenciements, sont renseignées dans la DADS. A cette fin, de nouveaux codes de motif de fin de période d’activité ont été créés.

Article L137-3

Modifié par LOI n°2011-1906 du 21 décembre 2011 - art. 12

Les contributions mentionnées au présent chapitre, sauf dispositions expresses contraires, sont recouvrées et contrôlées par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale, selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations à la charge des employeurs assises sur les gains et rémunérations de leurs salariés. Sont applicables les dispositions de l'article L. 133-3 et des chapitres 3 et 4 du titre IV du livre II dans leur rédaction en vigueur à la date de la publication de la dernière loi de financement de la sécurité sociale.

Les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales et les caisses générales de sécurité sociale sont habilitées à effectuer tout contrôle sur le versement de ces contributions dans les conditions fixées au chapitre 3 du titre IV du livre II dans sa rédaction en vigueur à la date de la publication de la dernière loi de financement de la sécurité sociale.

Toutefois, les contributions à la charge des employeurs relevant du régime agricole sont directement recouvrées et contrôlées par les caisses de mutualité sociale agricole, dans les conditions prévues par les articles 1032 à 1036, 1143 à 1143-6 et 1246 du livre VII du code rural, ainsi que par les décrets n° 50-1225 du 21 septembre 1950, n° 76-1282 du 29 décembre 1976, n° 79-707 du 8 août 1979 et n° 80-480 du 27 juin 1980, dans leur rédaction en vigueur à la date de la publication de la dernière loi de financement de la sécurité sociale.

Article L137-4

Modifié par LOI n°2011-1906 du 21 décembre 2011 - art. 12

Les différends nés de l'assujettissement aux contributions mentionnées au présent chapitre relèvent, sauf dispositions expresses contraires, du contentieux général de la sécurité sociale et sont réglés selon les dispositions applicables aux cotisations de sécurité sociale, conformément aux dispositions du chapitre 3 du titre III et des chapitres 2 et 4 du titre IV du livre Ier du présent code et, en outre, du chapitre 5 du titre II du livre VII du code rural et de la pêche maritime pour le régime agricole, dans leur rédaction en vigueur à la date de la publication de la dernière loi de financement de la sécurité sociale. Toutefois, les décisions rendues par les tribunaux de sécurité sociale jugeant de ces différends sont susceptibles d'appel quel que soit le montant du litige.

Apporter la preuve n’est pas toujours évident !

Même si la Cour de cassation considère dans le présent arrêt que c’est à l’employeur qu’il revient d’apporter la preuve que le salarié est en mesure de bénéficier d’une retraite à taux plein, convenons que cela n’est pas toujours chose facile ! 

A cet égard, il convient de se rapprocher d’un arrêt de la Cour de cassation du 13/05/2009, dans lequel il est stipulé que l’employeur qui s’adresse à la CARSAT pour obtenir le relevé de carrière, doit obtenir l’accord du salarié. 

Si le salarié oppose un refus, l’employeur devrait effectuer une saisine du juge des référés pour obtenir le relevé de carrière « sous astreinte ».

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour dire n'y avoir lieu à référé, l'arrêt retient que l'accord du 13 avril 2005 ne présente aucune disposition particulière imposant au salarié de justifier par des documents personnels de sa situation au regard de ses droits à retraite, que le relevé de carrière sollicité par l'employeur, en ce qu'il comporte des éléments relatifs aux salaires de l'intéressée, constitue à l'évidence un document confidentiel relevant de la

vie privée de celle-ci dont elle seule peut disposer et qu'en l'espèce, elle était bien fondée à en refuser la production, en l'absence de disposition particulière venant contredire la protection instituée par l'article 9 du code civil ;

Attendu cependant que l'employeur ayant la charge de rapporter la preuve que le salarié dont il envisage la mise à la retraite anticipée en application des stipulations d'une convention collective l'y autorisant remplit les conditions pour bénéficier d'une retraite à taux plein et cette preuve ne pouvant résulter que d'un relevé de carrière que le salarié est seul à pouvoir détenir, il existait un motif légitime d'ordonner la communication demandée ; Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 9 du code civil et, par refus d'application, l'article 145 du code de procédure civile ;

Vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Ordonne à Mme A… de communiquer à la société…, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, son relevé de carrière ; 

COUR DE CASSATION  Audience publique du 13 mai 2009 Pourvoi n° D 08-41.826