Rappel d’heures supplémentaires : la charge de la preuve ne repose pas sur le seul salarié

Jurisprudence
Heures supplémentaires

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Contexte de l'affaire

La présente affaire concerne un salarié engagé le 20 décembre 2006 en qualité de maçon et exerçant en dernier lieu les fonctions de chef de chantier.

Licencié le 3 mai 2010 pour faute grave, il saisit la juridiction prud'homale de diverses demandes notamment au titre des heures supplémentaires qu’il prétend avoir effectuées et non payées par son employeur. 

Dans un premier temps, la cour d’appel déboute le salarié de sa demande, estimant que les documents produits par le salarié étaient insuffisamment précis pour permettre à l'employeur de les discuter.

En outre, ces documents ne couvraient qu'une faible partie de la période. 

Pour information, le salarié présentait les éléments suivants :

  • Des fiches hebdomadaires de pointage ;
  • Ainsi que des fiches « d'heures au mois » pour l'année 2008 et le mois de septembre 2009 ;
  • Et 2 attestations d'anciens collègues affirmant qu'il effectuait des heures supplémentaires au cours des mois de novembre et décembre 2008 et de janvier à mars 2009. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour rejeter la demande du salarié en paiement d'un rappel d'heures supplémentaires, l'arrêt, après avoir relevé que l'intéressé produisait des fiches hebdomadaires de pointage, des fiches « d'heures au mois » pour l'année 2008 et le mois de septembre 2009, et deux attestations d'anciens collègues affirmant qu'il effectuait des heures supplémentaires au cours des mois de novembre et décembre 2008 et de janvier à mars 2009, retient que ces documents, qui ne couvrent qu'une faible partie de la période, sont insuffisamment précis pour permettre à l'employeur de les discuter utilement ;

Ce n’est pas l’avis de la Cour de cassation qui casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, renvoyant les deux parties devant une nouvelle cour d’appel. 

La Cour considère en l’espèce que le salarié avait suffisamment étayé sa demande en produisant des documents auxquels l’employeur pouvait répondre.

Il n’était donc pas licite que la cour d’appel fasse peser la charge de la preuve des horaires effectués sur le seul salarié. 

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié avait produit des documents auxquels l'employeur pouvait répondre, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve des horaires effectués sur le seul salarié, a violé le texte susvisé ; (…)

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes en paiement d'un rappel de salaire pour heures supplémentaires, congés payés afférents et pour la période du 1er au 14 avril 2010, d'une indemnité pour travail dissimulé et de dommages-intérêts pour non-exécution de bonne foi du contrat de travail, l'arrêt rendu le 30 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ; 

Cour de cassation du , pourvoi n°13-26469

Commentaire de LégiSocial

La Cour de cassation s’est prononcée de nombreuses fois sur les preuves apportées par le salarié pour obtenir le paiement d’heures supplémentaires effectuées et non réglées.

Nous profitons de l’affaire présente pour rappeler quelques arrêts… 

Le relevé des heures supplémentaires par un salarié constitue un document recevable

Dans cette affaire, une salariée cadre avait pris acte de la rupture de son contrat de travail reprochant à son employeur de lui imposer une modification de ses fonctions.

A l’occasion de sa saisine du Conseil de prud’hommes, elle avait demandé le paiement d’heures supplémentaires produisant un simple récapitulatif.

Déboutée par la cour d’appel, elle avait obtenu gain de cause auprès de la Cour de cassation.  

Arrêt de la Cour de cassation du 16 mars 2011 Pourvoi W 09-67.836

Arrêt 674 F-D

 Retrouver cet arrêt en détails, en cliquant ici. 

Un relevé imprécis d’heures supplémentaires établi par le salarié ne permet pas d’en obtenir le paiement

Dans cette affaire, un salarié démissionnaire saisit la juridiction prud’homale (presque 5 ans après son départ de l’entreprise) en vue d’obtenir le paiement d’heures supplémentaires. 

Les documents présentés par le salarié ont été considérés imprécis par la Cour de cassation qui le déboute de sa demande. 

Arrêt de la Cour de cassation du 16 juin 2011 Pourvoi  09-69250 D 

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Un relevé informatisé des entrées ou sortie suffit à prouver que les heures supplémentaires sont dues !

Une gestionnaire de paie saisit la juridiction prud’homale d’un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires. 

A l’appui de sa demande, la salariée produit un journal de pointage informatique indiquant les heures d’entrée et de sortie de l’entreprise sans discontinuité. 

Après avoir été déboutée par la cour d’appel, elle obtient gain de cause par la Cour de cassation, le document informatique produit ayant été considéré recevable et attestant que la salariée avait bien effectuée des heures supplémentaires, et qu’un rappel de salaire s’imposait dans cette affaire. 

Arrêt de la Cour de cassation du 19/09/2012, pourvoi 11-18546 

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