Contexte de l'affaire
Cette affaire concernent 9 salariés d’une enseigne de prêt-à-porter ayant ouvert ses magasins un dimanche, en application du régime dérogatoire dénommé « les dimanches du maire ».
En compensation de ce travail dominical, l’employeur avait attribué aux salariés mensualisés :
- Un repos compensateur équivalent ;
- Plus une rémunération des heures de travail réalisées le dimanche avec majoration de 50%.
Estimant ces compensations non conformes aux dispositions légales, les 9 salariés saisissent la juridiction prud’homale.
Extrait de l’arrêt :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, des procès-verbaux de l'inspection du travail, fondement de la poursuite, et des pièces de procédure que la société (…) a, sur autorisation donnée par le maire en application de l'article L. 3132-26 du code du travail, ouvert le dimanche 4 juillet 2010 deux établissements de commerce de détail aux enseignes (…) ; que les neuf salariés employés par ces établissements en qualité de vendeurs ont, d'une part, bénéficié d'un repos compensateur le 14 juillet 2010, d'autre part, perçu une rémunération calculée selon un taux horaire majoré de 50% ; qu'au vu de procès-verbaux de l'inspection du travail relevant, notamment, que ce mode de rémunération n'était pas conforme aux prescriptions de l'article L. 3132-27 dudit code, la société (…) a été citée devant le tribunal de police du chef d'emploi dérogatoire non conforme de salarié le dimanche ; que le premier juge ayant relaxé la prévenue, le ministère public a relevé appel de la décision ;
Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris, l'arrêt énonce que le travail accompli le dimanche 4 juillet 2010 ayant été récupéré par l'octroi, le 14 juillet, d'un repos compensateur équivalent en temps, c'est à juste titre que le tribunal a jugé que les heures ainsi travaillées avaient été rémunérées une première fois à 100% au titre du salaire de base mensualisé, puis une seconde fois à 150% au titre de la majoration portée sur les fiches de paie, soit globalement à hauteur de 250% correspondant à plus du double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente ;
Dans un premier temps, la cour d’appel déboute les salariés de leur demande.
Elle estime en effet, qu’étant mensualisés ils perçoivent déjà d’une rémunération à hauteur de 100%.
Une majoration de 150% accordée en sus, au titre du travail le dimanche, porterait la majoration totale à 250%, donc bien au-delà de l'obligation légale.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris, l'arrêt énonce que le travail accompli le dimanche 4 juillet 2010 ayant été récupéré par l'octroi, le 14 juillet, d'un repos compensateur équivalent en temps, c'est à juste titre que le tribunal a jugé que les heures ainsi travaillées avaient été rémunérées une première fois à 100% au titre du salaire de base mensualisé, puis une seconde fois à 150% au titre de la majoration portée sur les fiches de paie, soit globalement à hauteur de 250% correspondant à plus du double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente
Mais la Cour de cassation n'est pas du même avis, elle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel.
Elle rappelle que la contrepartie prévue par le code du travail est totalement indépendante de la rémunération mensuelle versée au titre de la mensualisation, et que cette dernière n’a pas à être prise en compte pour déterminer si l’obligation légalement prévue est respectée ou pas.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle ne pouvait faire dépendre la rémunération du travail accompli dans le cadre d'une dérogation au repos dominical de celle, mensualisée, normalement versée aux salariés, la cour d'appel a méconnu les texte et principe ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 19 mars 2013, mais en ses seules dispositions relatives à la rémunération des neuf salariés employés en qualité de vendeurs, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Commentaire de LégiSocial
Profitons de l’affaire présente pour rappeler quelques notions importantes concernant la dérogation au repos dominical dans le cadre d’une dérogation dite « les dimanches du maire » dans les commerces de détail.
Préambule
Les établissements de commerce de détail où le repos hebdomadaire a lieu normalement le dimanche peuvent supprimer ce repos les dimanches désignés, pour chaque commerce, par décision du maire (ou par le Préfet à Paris).
Le nombre de dimanches est majoré depuis la loi Macron
Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, JO du 7 août 2015
Le nombre de dimanches est porté de 5 à 12, à partir de 2016.
Il est en outre précisé que :
- La décision du maire devra intervenir après avis du conseil municipal ;
- Et que lorsque le nombre des dimanches excède 5, la décision du maire est prise après avis conforme de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune est membre. A défaut de délibération dans un délai de 2 mois suivant sa saisine, cet avis est réputé favorable.
De façon dérogatoire, le maire (ou à Paris, le préfet) peut désigner 9 dimanches durant lesquels, dans les établissements de commerce de détail, le repos hebdomadaire est supprimé.
Cette disposition entre en vigueur à compter de la promulgation de la loi au JO, plus précisément à compter du 8 août 2015.
Cas particulier des commerces de détail alimentaire de plus de 400m²
Au sein des commerces de détail alimentaire dont la surface excède 400m², existe un régime particulier selon lequel :
- Lorsque les jours fériés sont travaillés (à l'exception du 1er mai) ;
- Alors ils sont déduits par l'établissement des dimanches du maire dans la limite de 3.
En outre, dans ces établissements, la rémunération devra être majorée d'au moins 30% par rapport à la rémunération normalement due pour une durée équivalente.
La règle du volontariat
A compter du 8 août 2015, la règle du volontariat s’applique au régime « des dimanches du maire ».
Concrètement, seuls les salariés volontaires ayant donné leur accord par écrit pourront travailler le dimanche.
Ce nouveau régime prend place au sein du nouvel article L 3132-27-1 instauré au sein du code du travail.
Cette règle du volontariat implique aussi que l’éventuel refus du salarié de travailler un dimanche :
- Ne doit donner lieu à aucune mesure discriminatoire ;
- Ne constitue ni une faute, ni un motif de licenciement,
- Et ne peut être invoqué pour motiver un refus d'embauche.
Article L3132-27-1
Créé par LOI n°2015-990 du 6 août 2015 - art. 253
Le premier alinéa de l'article L. 3132-25-4 est applicable aux salariés privés du repos dominical en application de l'article L. 3132-26.
Article L3132-25-4
Modifié par LOI n°2015-990 du 6 août 2015 - art. 247
Pour l'application des articles L. 3132-20, L. 3132-24, L. 3132-25, L. 3132-25-1 et L. 3132-25-6, seuls les salariés volontaires ayant donné leur accord par écrit à leur employeur peuvent travailler le dimanche. Une entreprise ne peut prendre en considération le refus d'une personne de travailler le dimanche pour refuser de l'embaucher. Le salarié qui refuse de travailler le dimanche ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail. Le refus de travailler le dimanche pour un salarié ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement. (…)
Article L3132-26
Modifié par LOI n°2015-990 du 6 août 2015 - art. 250 (V)
Dans les établissements de commerce de détail où le repos hebdomadaire a lieu normalement le dimanche, ce repos peut être supprimé les dimanches désignés, pour chaque commerce de détail, par décision du maire prise après avis du conseil municipal. Le nombre de ces dimanches ne peut excéder douze par an. La liste des dimanches est arrêtée avant le 31 décembre, pour l'année suivante.
Lorsque le nombre de ces dimanches excède cinq, la décision du maire est prise après avis conforme de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune est membre. A défaut de délibération dans un délai de deux mois suivant sa saisine, cet avis est réputé favorable. (…)
Pour les commerces de détail alimentaire dont la surface de vente est supérieure au seuil mentionné au premier alinéa de l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, lorsque les jours fériés mentionnés à l'article L. 3133-1, à l'exception du 3°, sont travaillés, ils sont déduits par l'établissement des dimanches désignés par le maire au titre du présent article, dans la limite de trois.
A Paris, la décision mentionnée aux trois premiers alinéas est prise par le préfet de Paris.
Dépôt de la liste
La liste des dimanches devra être arrêtée avant le 31 décembre pour l’année suivante.
Article L3132-26
Modifié par LOI n°2015-990 du 6 août 2015 - art. 250 (V)
Dans les établissements de commerce de détail où le repos hebdomadaire a lieu normalement le dimanche, ce repos peut être supprimé les dimanches désignés, pour chaque commerce de détail, par décision du maire prise après avis du conseil municipal. Le nombre de ces dimanches ne peut excéder douze par an. La liste des dimanches est arrêtée avant le 31 décembre, pour l'année suivante.
Lorsque le nombre de ces dimanches excède cinq, la décision du maire est prise après avis conforme de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune est membre. A défaut de délibération dans un délai de deux mois suivant sa saisine, cet avis est réputé favorable.
Pour les commerces de détail alimentaire dont la surface de vente est supérieure au seuil mentionné au premier alinéa de l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, lorsque les jours fériés mentionnés à l'article L. 3133-1, à l'exception du 3°, sont travaillés, ils sont déduits par l'établissement des dimanches désignés par le maire au titre du présent article, dans la limite de trois.
A Paris, la décision mentionnée aux trois premiers alinéas est prise par le préfet de Paris.
Scrutins nationaux et locaux
Un nouvel article du code du travail, L 3132-26-1 indique que lorsque le repos dominical a été supprimé le jour d'un scrutin national ou local, l'employeur prend toute mesure nécessaire pour permettre aux salariés d'exercer personnellement leur droit de vote.
Article L3132-26-1
Créé par LOI n°2015-990 du 6 août 2015 - art. 252
Lorsque le repos dominical a été supprimé le jour d'un scrutin national ou local, l'employeur prend toute mesure nécessaire pour permettre aux salariés d'exercer personnellement leur droit de vote.
Compensation et rémunération
La loi Macron ne modifie pas les conditions :
- Le salarié perçoit alors une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente ;
- Ainsi qu'un repos compensateur équivalent en temps.
Article L3132-27
Modifié par LOI n°2009-974 du 10 août 2009 - art. 1
Chaque salarié privé de repos dominical perçoit une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente, ainsi qu'un repos compensateur équivalent en temps.
L'arrêté pris en application de l'article L. 3132-26 détermine les conditions dans lesquelles ce repos est accordé, soit collectivement, soit par roulement dans la quinzaine qui précède ou suit la suppression du repos.
Si le repos dominical est supprimé un dimanche précédant une fête légale, le repos compensateur est donné le jour de cette fête.