Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 29 octobre 1985 en qualité de chef de jeux de table aux jeux traditionnels.
Il fait l’objet d'un avertissement délivré le 13 février 2011 pour avoir proféré des injures à caractère raciste et menacé un collègue de travail.
Le salarié saisit la juridiction prud’homale, estimant que les faits qui lui étaient reprochés s’étaient déroulés hors temps et lieu de travail, et relevaient de ce fait de la sphère privée.
L’employeur de son côté, considérait que ces faits avaient un lien direct avec le travail, le salarié qui en avait été victime en était ressorti profondément choqué.
Un extrait de l’arrêt vous donne quelques exemples des injures et insultes prononcés par le salarié incriminé, au travers de l’avertissement notifié par son employeur.
Extrait de l’arrêt :
(…) a été sanctionné d'un avertissement le 13 février 2011 pour les motifs suivants : " Nous avons été informés d'une altercation qui s'est produite dans l'enceinte de (…) le 9 Février 2011. Cette altercation est intervenue de façon fortuite alors que vous croisiez Mr (…) et un autre employé./ Après les avoir salué et qu'ils vous aient répondu, vous êtes revenu sur vos pas et vous avez très durement invectivé Mr A... en lui disant : " Ne commence pas à reprendre du poil de la bête... Tu t'étais calmé et je t'ai à l'oeil... Tu nous a déjà mis le bordel avec les arabes et les comoriens, crois bien que je ne vais pas te faire. Baisse les yeux ou je t'emplâtre... Tu es un incompétent irresponsable... J'aurai ta peau ! "/ Vous avez ajouté en partant : Tu peux te plaindre a B... et prendre Mr C...pour témoin, rien à foutre "/ L'outrance de vos propos a suscité une indignation profonde de la part de Mr A... qui a compris qu'au-delà des propos injurieux, vous le menaciez dans son intégrité physique. Mr A... a été naturellement très choqué par la virulence de vos propos et leur brutalité. "
Dans un premier temps, la Cour d'appel de Chambéry, dans son arrêt du 27 février 2014, déboute le salarié de sa demande.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel et rejette le pourvoi formé par le salarié.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu qu'appréciant souverainement, sans dénaturation, les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a retenu que les insultes et menaces proférées par le salarié au cours d'une altercation intervenue sur la voie publique devant plusieurs membres du personnel visaient le comportement et les compétences de M. A... , salarié de l'entreprise, a pu décider que ce comportement se rattachait à la vie professionnelle de l'entreprise et justifiait l'avertissement délivré au salarié ; que le moyen, qui manque en fait en sa dernière branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Commentaire de LégiSocial
Rappelons quelques notions concernant les sanctions prononcées par l’employeur, notamment le délai légal pour les prononcer et la prescription de faits anciens.
Délai pour sanctionner des faits fautifs
Le code du travail donne une règle très précise concernant le délai pendant lequel l’employeur pourra prononcer une sanction vis-à-vis de son salarié.
Ainsi, un délai de 2 mois est possible, à partir du moment où l’employeur a connaissance des faits pour prononcer une sanction (blâme, avertissement ou licenciement éventuellement).
Article L1332-4
Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.
Prescription des sanctions
De la même façon, un employeur ne peut prononcer une nouvelle sanction en rappelant des sanctions antérieures au-delà d’un délai de 3 ans.
Article L1332-5
Aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction.
Sanctions prononcées en raison de la vie privée du salarié
Seul un événement tiré de la vie privée ET responsable d’un trouble au sein de l’entreprise (ce que l’employeur met en avant dans la présente affaire) peut être invoqué pour une sanction.