Pas de reprise du travail : pas de salaire !

Jurisprudence
Maintien employeur pour maladie, accident du travail, maladie professionnelle

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé en qualité d'opérateur machine.

Victime d'un accident du travail le 22 décembre 2006, il est placé en arrêt de travail jusqu'au 31 mai 2009.

Au terme de son arrêt, le salarié ne se manifeste auprès de son employeur, et ne subit donc aucune visite médicale de reprise.

Ce n’est qu’un an plus qu’il saisit la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment à la résiliation judiciaire du contrat de travail et à la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes.

Il demande notamment un rappel de salaires au titre de la période postérieure à la fin de l’arrêt de travail, compte tenu de l’absence de visite médicale de reprise. 

Dans un premier temps, la Cour d'appel de Rennes dans son arrêt du 15 novembre 2013 donne raison au salarié, estimant que ce dernier pouvait prétendre au paiement des salaires à l’issue de son congé-maladie, sauf à l’employeur de justifier d’une cause l’exonérant du paiement de ses émoluments tels qu’une absence injustifiée.

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour condamner l'employeur à payer au salarié une somme à titre de rappel de salaire pour la période courant entre le 1er juin 2009 au 31 mai 2010, l'arrêt retient, par motifs adoptés, qu'il pouvait prétendre au paiement de ses salaires à l'issue de son congé-maladie sauf à l'employeur de justifier d'une cause l'exonérant du paiement de ses salaires tels que l'absence injustifiée de ce dernier ; 

Mais la Cour de cassation ne partage pas le même avis, elle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, renvoyant les deux parties devant la Cour d’appel de Rennes.

Elle indique en effet, que le contrat de travail était resté « suspendu » et qu’à ce titre le salarié ne pouvait prétendre au paiement des salaires pour la période allant du 1er juin 2009 jusqu’au 31 mai 2010.

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors qu'à défaut d'examen de reprise le contrat de travail était resté suspendu de sorte que le salarié ne pouvait prétendre au paiement de salaires, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; 
Et attendu que la cassation du chef de la condamnation de l'employeur à payer au salarié un rappel de salaires pour la période du 1er juin 2009 au 31 mai 2010 emporte par voie de conséquence la cassation des chefs de l'arrêt, visés par les autres moyens, prononçant la résiliation judiciaire du contrat de travail et la condamnation de l'employeur à payer au salarié une indemnité légale de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société (…)  à payer à M. X... les sommes de 15 051,72 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er juin 2009 au 31 mai 2010 et de 1 505,17 euros de congés payés afférents, prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail et condamne la société (…)  à payer à M. X... les sommes de 1 550,33 euros à titre d'indemnité de licenciement, de 2 508,62 euros et 250,86 euros à titre d'indemnités compensatrices de préavis et de congés payés afférents et de 12 500 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 15 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°14-10573

Commentaire de LégiSocial

Rappelons quelques informations importantes concernant la visite médicale de reprise, objet de la présente affaire. 

Obligation du salaire : se soumettre à une visite médicale de reprise

Tout arrêt de travail au titre de la maladie ou d’un accident non professionnel,  d’au moins 30 jours,  donne lieu à visite de reprise.

Article R4624-22

Modifié par Décret n°2012-135 du 30 janvier 2012 - art. 1

Le salarié bénéficie d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail :

1° Après un congé de maternité ;

2° Après une absence pour cause de maladie professionnelle ;

3° Après une absence d'au moins trente jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel.

A l’occasion de la reprise ou dans un délai de 8 jours

Cette visite de reprise doit avoir lieu à l’occasion de la reprise du travail ou dans un délai de 8 jours.

Article R4624-23

Modifié par Décret n°2012-135 du 30 janvier 2012 - art. 1

L'examen de reprise a pour objet :

1° De délivrer l'avis d'aptitude médicale du salarié à reprendre son poste ;

2° De préconiser l'aménagement, l'adaptation du poste ou le reclassement du salarié ;

3° D'examiner les propositions d'aménagement, d'adaptation du poste ou de reclassement faites par l'employeur à la suite des préconisations émises par le médecin du travail lors de la visite de préreprise.

Dès que l'employeur a connaissance de la date de la fin de l'arrêt de travail, il saisit le service de santé au travail qui organise l'examen de reprise dans un délai de huit jours à compter de la reprise du travail par le salarié.

A l’employeur d’organiser la visite médicale de reprise

C’est à l’employeur que revient la charge d’organiser la visite de reprise. 

Un arrêt de la Cour de cassation précise que cette organisation n’est possible que dans la mesure où l’employeur a été averti de la volonté de reprendre le travail par le salarié concerné. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour condamner l'employeur à payer au salarié des sommes à titre, d'une part, tant de rappel de salaire que d'indemnités de licenciement, de préavis et de congés payés, d'autre part, de dommages-intérêts pour défaut d'organisation d'une visite de reprise, l'arrêt retient que l'employeur n'avait pas saisi le médecin du travail pour qu'il convoque le salarié à un examen médical de reprise et que cet examen n'avait pas été organisé ; 
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le salarié avait cessé d'envoyer des arrêts de travail depuis le 31 mai 2007, qu'il n'avait pas répondu aux demandes de l'employeur de justifier de son absence et qu'il ne rapportait pas la preuve qu'il s'était mis à la disposition de celui-ci, la cour d'appel, dont il résultait de ses énonciations l'absence d'obligation pour l'employeur d'organiser la visite de reprise, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau ; 

Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 13 mai 2015 N° de pourvoi: 13-23606 
Non publié au bulletin