Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé par une association d’accueil aux personnes âgées, le 20 décembre 2010, en qualité de directeur d'établissement.
Il est licencié pour faute lourde par lettre du 11 janvier 2011.
A l’appui de son licenciement, les faits suivants :
- Le salarié se fait octroyer une augmentation de sa rémunération de sujétion spéciale et de son coefficient ainsi qu'une prime exceptionnelle de 3 000 euros ;
- Il s’accorde des acomptes sur salaires de 15.000 €, sans prévoir les modalités de remboursement ;
- Et enfin qu’il fait bénéficier d'avantages anormaux 2 salariés, dont sa sœur qu'il avait engagée.
Mais le salarié décide de saisir la juridiction prud’homale.
Dans un premier temps la Cour d’appel de Lyon, dans son arrêt du 5 décembre 2013, confirme que le licenciement du salarié repose bien sur une faute lourde, l’intention de nuire du salarié étant caractérisée en l’espèce.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour décider que le licenciement repose sur une faute lourde et limiter la condamnation de l'employeur à payer au salarié une certaine somme à titre d'indemnité de congés payés, l'arrêt, après avoir constaté que celui-ci s'est fait octroyer une augmentation de sa rémunération de sujétion spéciale et de son coefficient ainsi qu'une prime exceptionnelle de 3 000 euros, qu'il s'est accordé des acomptes sur salaires de 15 000 euros sans prévoir les modalités de remboursement, qu'il a fait bénéficier d'avantages anormaux deux salariés, dont sa soeur qu'il avait engagée, retient que de telles dérives financières tant en sa faveur qu'au profit de proches, qui ont préjudicié gravement à l'association sur le plan financier, et l'obtention a posteriori de la garantie du président les 10 et 29 novembre 2010 alors que l'alerte écrite de l'expert-comptable est du 22 novembre 2010, caractérisent une intention de nuire du salarié ;
Ce n’est pas l’avis de la Cour de cassation qui casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, renvoyant les deux parties devant une nouvelle cour d’appel.
Elle rappelle que la faute lourde est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise.
Extrait de l’arrêt :
Attendu, cependant, que la faute lourde est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise ;
Qu'en se déterminant comme elle l'a fait, sans caractériser la volonté de nuire du salarié, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement repose sur une faute lourde et en ce qu'il limite la condamnation de l'employeur au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, l'arrêt rendu le 5 décembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Commentaire de LégiSocial
Ainsi que nous l’avions constaté dans une affaire précédente (arrêt de la Cour de cassation du 22 octobre 2015, pourvoi numéro 14-11291) et pour laquelle nous avons rédigé une actualité, ce ne sont pas les faits préjudiciables à l’entreprise qui permettent de retenir ou non la faute lourde en cas de licenciement.
C’est bien l’intention de nuire qui reste à prouver afin de justifier le recours à ce motif de licenciement.
En d’autres termes, sans remettre en question le fait que les actes du salarié étaient préjudiciables à l’entreprise, il convenait dans la présente affaire de démontrer qu’ils avaient été commis par le salarié dans une réelle intention de nuire à son employeur.
C’est d’ailleurs ce point que devra aborder la Cour d’appel de Grenoble à qui la présente affaire est renvoyée par la Cour de cassation.