Contexte de l'affaire
La présente affaire concerne une salariée engagée le 1er septembre 1983, en qualité d'employée, affectée au service du personnel.
Après le transfert de son contrat de travail au sein d’une autre société, elle est promue, en 2004, au poste de responsable administratif du personnel.
Déclarée inapte à son poste, le 21 juin 2011, sans référence à un accident du travail ou une maladie professionnelle mais en raison d’une « inaptitude qui est relationnelle envers toute la hiérarchie au sein de l'entreprise ", elle est finalement licenciée le 8 septembre 2011.
La salariée décide de saisir la juridiction prud'homale, considérant que son employeur n’avait pas procédé à une recherche suffisamment approfondie de poste de reclassement, notamment au sein des filiales étrangères du groupe auquel appartient l’entreprise dans laquelle elle se trouve.
De son côté, l’employeur argumente en indiquant s’être rapproché de la médecine du travail, postérieurement à l’avis d’inaptitude, et que ce dernier avait confirmé l’impossibilité de reclassement, y compris dans des filiales étrangères en raison d’une inaptitude "relationnelle envers toute la hiérarchie au sein de l'entreprise".
Dans un premier temps, la cour d’appel déboute la salariée de sa demande.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, mettant en avant l’avis prononcé par le médecin du travail, postérieurement à l’avis d’inaptitude et à la suite d’une interrogation de l’employeur sur les possibilités de reclassement.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu que si l'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout poste dans l'entreprise ne dispense pas l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, de son obligation légale de recherche de reclassement au sein de cette entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel celle-ci appartient, les réponses apportées, postérieurement au constat régulier de l'inaptitude, par ce médecin sur les possibilités éventuelles de reclassement concourent à la justification par l'employeur de l'impossibilité de remplir cette obligation ;
Et attendu que la cour d'appel, procédant aux recherches prétendument omises, a fait ressortir l'impossibilité de reclasser la salariée au sein tant de l'entreprise que du groupe, y compris par la mise en oeuvre de mutations ou transformations de poste, ce au regard notamment des préconisations du médecin du travail interdisant de maintenir un lien avec certaines personnes ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Commentaire de LégiSocial
Cette affaire est pour nous l’occasion de rappeler l’allègement de l’obligation de reclassement par l’employeur suite à la publication de la loi Rebsamen du 17 août 2015, dont nous vous rappelons en détails le contenu.
Obligation de reclassement
Rappel des conditions en vigueur avant la loi
Selon les termes des articles L 1226-2 (inaptitude d’origine non professionnelle) ou L 1226-10 et L 1226-12 (inaptitude faisant suite à un accident du travail ou maladie professionnelle) du code du travail, nul employeur ne peut rompre le contrat de travail, en prononçant le licenciement, que s’il s'il justifie :
- Soit de son impossibilité de proposer un emploi ;
- Soit du refus par le salarié de l'emploi proposé.
Inaptitude d’origine non professionnelle :
Article L1226-2
Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.
Inaptitude d’origine professionnelle :
Article L1226-10
Modifié par LOI n°2012-387 du 22 mars 2012 - art. 43
Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.
Article L1226-12
Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.
L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions.
S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III.
Le nouveau régime depuis la loi Rebsamen
LOI n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, JO du 18 août 2015
L’article 26 de la loi complète l’article L 1226-12, permettant désormais à l’employeur de prononcer le licenciement sans obligation de reclassement, lorsque :
- L’inaptitude est d’origine professionnelle (consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle) ;
- Et que l’avis du médecin du travail mentionne expressément que tout maintien du salarié dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé.
Ces dispositions sont entrées en vigueur depuis le 19 août 2015.
Article L1226-12
Modifié par LOI n°2015-994 du 17 août 2015 - art. 26
Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.
L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. Il peut également rompre le contrat de travail si l'avis du médecin du travail mentionne expressément que tout maintien du salarié dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé.
S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III.