CDD requalifiés : les allocations chômage ne diminuent le rappel de salaire

Jurisprudence
CDD

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé par une grande chaîne de télévision, en qualité de chef opérateur son-vidéo, dans le cadre de 769 contrats CDD successifs.

L’entreprise cesse de faire appel au salarié, à l'issue d'un contrat à durée déterminée expirant le 5 avril 2009.

Le salarié décide de saisir la juridiction prud'homale de demandes tendant à la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée et au paiement de sommes liées à cette requalification ainsi qu'à la rupture. 

Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison au salarié, estimant que le salarié en l’espèce se tenait effectivement et constamment à la disposition de son employeur.

Extrait de l’arrêt :

Attendu qu'ayant constaté que le salarié se tenait effectivement et constamment à disposition de l'employeur, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision ;

L’employeur se pourvoit en cassation, estimant que les rappels de salaire qu’il se trouve contraint à verser au salarié devaient être diminués du montant des allocations chômage par le salarié pendant les périodes pendant lesquelles le salarié n’exerçait pas son activité dans l’entreprise. 

Tout en confirmant l’arrêt de la Cour d’appel de Paris, du 26 novembre 2014, la Cour de cassation précise que le calcul des rappels de salaires n’est pas affecté par les sommes qui ont pu être versées au salarié par l'organisme compétent au titre de l'assurance chômage.

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu que le calcul des rappels de salaire consécutifs à la requalification de contrats à durée déterminée successifs en contrat à durée indéterminée, qui s'effectue selon les conditions contractuelles fixant les obligations de l'employeur telles qu'elles résultent de cette requalification, n'est pas affecté par les sommes qui ont pu être versées au salarié par l'organisme compétent au titre de l'assurance chômage ;

Cour de cassation du , pourvoi n°15-11396

Commentaire de LégiSocial

La présente affaire concerne le recrutement d’un salarié sous contrat CDD, l’occasion de rappeler les 4 cas de recours au contrat CDD interdits. 

Recours numéro 1 : remplacement salariés grévistes

En aucun cas, l’employeur ne peut recourir à un salarié dans le cadre d’un CDD pour pallier la gêne qu’occasionnerait la grève de salariés au sein de l’entreprise.

Article L1242-6 

Outre les cas prévus à l'article L. 1242-5, il est interdit de conclure un contrat de travail à durée déterminée :

1° Pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu à la suite d'un conflit collectif de travail ; (…)

Recours numéro 2 : effectuer des travaux dangereux

Sont concernés les travaux dangereux pour lesquels une surveillance médicale spéciale est obligatoire. 

Article L1242-6 

Outre les cas prévus à l'article L. 1242-5, il est interdit de conclure un contrat de travail à durée déterminée : (…)

2° Pour effectuer certains travaux particulièrement dangereux figurant sur une liste établie par voie réglementaire, dans les conditions prévues à l'article L. 4154-1.

L'autorité administrative peut exceptionnellement autoriser une dérogation à cette interdiction dans des conditions déterminées par voie réglementaire.

La liste des travaux dangereux est fixée par un arrêté du 11/07/1977.

Arrêté du 11 juillet 1977 FIXANT LA LISTE DES TRAVAUX NECESSITANT UNE SURVEILLANCE MEDICALE SPECIALE.

Article 1

Pour les travaux énumérés au présent article, le ou les médecins chargés de la surveillance médicale du personnel effectuant d'une façon habituelle lesdits travaux consacreront à cette surveillance un temps calculé sur la base d'une heure [*nombre*] par mois pour dix salariés :

1. Les travaux comportant la préparation, l'emploi, la manipulation ou l'exposition aux agents suivants : Fluor et ses composés ; Chlore ; Brome ; Iode ; Phosphore et composés, notamment les esters phosphoriques, pyrophosphoriques, thiophosphoriques, ainsi que les autres composés organiques du phosphore ; Arsenic et ses composés ; Sulfure de carbone ; Oxychlorure de carbone ; Acide chromique, chromates, bichromates alcalins, à l'exception de leurs solutions aqueuses diluées ; Bioxyde de manganèse ; Plomb et ses composés ; Mercure et ses composés ; Glucine et ses sels ; Benzène et homologues ; Phénols et naphtols ; Dérivés halogénés, nitrés et aminés des hydrocarbures et de leurs dérivés ; Brais, goudrons et huiles minérales ; Rayons X et substances radioactives.

2. Les travaux suivants : Application des peintures et vernis par pulvérisation ; Travaux effectués dans l'air comprimé ; Emploi outils pneumatiques à main, transmettant des vibrations ; Travaux effectués dans les égouts ; Travaux effectués dans les abattoirs, travaux d'équarrissage ; Manipulation, chargement, déchargement, transport soit de peaux brutes, crins, soies et porcs, laine, os ou autres dépouilles animales, soit de sacs, enveloppes ou récipients contenant ou ayant contenu de telles dépouilles, à l'exclusion des os dégélatinés ou dégraissés et des déchets de tannerie chaulés ; Collecte et traitement des ordures ; Travaux exposant à de hautes températures, à des poussières ou émanations toxiques et concernant le traitement des minerais, la production des métaux et les verreries ; Travaux effectués dans les chambres frigorifiques ; Travaux exposant aux émanations d'oxyde de carbone dans les usines à gaz, la conduite des gazogènes, la fabrication synthétique de l'essence ou du méthanol ; Travaux exposant aux poussières de silice, d'amiante et d'ardoise (à l'exclusion des mines, minières et carrières) ; Travaux de polymérisation du chlorure de vinyle ; Travaux exposant au cadmium et composés ; Travaux exposant aux poussières de fer ; Travaux exposant aux substances hormonales ; Travaux exposant aux poussières de métaux durs (tantale, titane, tungstène et vanadium) ; Travaux exposant aux poussières d'antimoine ; Travaux exposant aux poussières de bois ; Travaux en équipes alternantes effectués de nuit en tout ou en partie ; Travaux d'opérateur sur standard téléphonique, sur machines mécanographiques, sur perforatrices, sur terminal à écran ou visionneuse en montage électronique ; Travaux de préparation, de conditionnement, de conservation et de distribution de denrées alimentaires ; Travaux exposant à un niveau de bruit supérieur à 85 décibels.

Recours numéro 3 : suite à un licenciement économique

Est concerné le recours à un contrat CDD afin de répondre à un accroissement temporaire d’activité après un licenciement économique, pendant une période de 6 mois à compter de la notification du licenciement en question. 

Toutefois, le code du travail (article L 1242-5) prévoit une dérogation dans 2 cas précis, permettant ainsi à l’employeur de recruter au moyen d’un CDD après un licenciement économique : 

  1. Recruter en CDD, pour un accroissement temporaire d’activité, avec un CDD d’une durée inférieure à 3 mois (renouvellement compris),
  2. Recruter un salarié en CDD pour une commande destinée à l’exportation. 

Pour ces deux cas précis, l’employeur doit obligatoirement veiller à informer et consulter le CE (Comité d’Entreprise) ou par défauts les DP (Délégués du Personnel). 

Article L1242-5

Dans les six mois suivant un licenciement pour motif économique, il est interdit de conclure un contrat de travail à durée déterminée au titre d'un accroissement temporaire de l'activité, y compris pour l'exécution d'une tâche occasionnelle, précisément définie et non durable, ne relevant pas de l'activité normale de l'entreprise. Cette interdiction porte sur les postes concernés par le licenciement dans l'établissement.

L'interdiction ne s'applique pas :

1° Lorsque la durée du contrat de travail n'est pas susceptible de renouvellement et n'excède pas trois mois ;

2° Lorsque le contrat est lié à la survenance dans l'entreprise, qu'il s'agisse de celle de l'entrepreneur principal ou de celle d'un sous-traitant, d'une commande exceptionnelle à l'exportation dont l'importance nécessite la mise en œuvre de moyens quantitativement ou qualitativement exorbitants de ceux que l'entreprise utilise ordinairement. Cette possibilité de recrutement est subordonnée à l'information et à la consultation préalables du comité d'entreprise, ou, à défaut, des délégués du personnel, s'il en existe.

Les dérogations prévues aux 1° et 2° n'exonèrent pas l'employeur de respecter la priorité de réembauche prévue à l'article L. 1233-45.

Recours numéro 4 : afin de pourvoir à un emploi durable

Le contrat CDD ne doit jamais pourvoir à un emploi durable, c’est d’ailleurs le cas de requalification abordé dans la présente affaire (le salarié devant se tenir à disposition de son employeur).