Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 19 octobre 2009, en qualité de manager et coordinateur du département social.
Il est soumis à une période d’essai dont la durée est fixée à 4 mois.
Par courrier remis en main propre le 28 octobre 2009, l’employeur rompt le contrat en cours de période d'essai.
Le salarié saisit la juridiction prud'homale pour voir juger la rupture illicite et condamner l’employeur au paiement de diverses sommes.
Il met en effet en avant que son contrat de travail prévoit un délai de prévenance d’une semaine par mois écoulé.
De son côté, l’employeur se retranche vers les délais légalement prévus en matière de rupture de période d’essai.
Dans un premier temps, la cour d’appel déboute le salarié de sa demande, rappelant que le délai de prévenance indiqué sur la lettre de rupture respectait bien les dispositions légales.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire et de congés payés afférents, l'arrêt retient que le délai de prévenance mentionné dans le courrier de rupture, d'une durée de 48 heures est conforme aux dispositions de l'article L. 1221-25 du code du travail ;
Mais ce n’est pas l’avis de la Cour de cassation qui casse et annule l’arrêt de la cour d’appel sur ce point notamment.
Elle indique en effet que les stipulations contractuelles, qui prévoyaient un délai de prévenance d’une semaine pour une rupture du contrat intervenant dans les 4 premiers mois, devaient s’appliquer en lieu et place des dispositions légales compte tenu du fait qu’elles se trouvaient être plus favorables.
Extrait de l’arrêt :
Qu'en statuant ainsi, alors que les stipulations contractuelles prévoyaient un délai de prévenance d'une semaine pour une rupture du contrat de travail intervenant au cours des quatre premiers mois de la période d'essai, la cour d'appel, qui n'a pas appliqué au salarié ces dispositions plus favorables que la loi, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes au titre des heures supplémentaires, de rappel de salaire relatif au délai de prévenance, de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés et condamne celui-ci à payer à la société (…) la somme de 134 euros correspondant à l'indemnité compensatrice de congés payés indûment versée, l'arrêt rendu le 28 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Commentaire de LégiSocial
Profitons de l’affaire présente pour rappeler quelques notions importantes concernant la rupture de la période d’essai.
Rupture de la période d’essai
La rupture de la période d’essai peut intervenir sur l’initiative du salarié ou de l’employeur.
Cette rupture peut être prononcée sans avoir à alléguer de motif que ce soit l’employeur ou le salarié qui procède à cette rupture.
Cour de cassation du 25/03/1985 n° 83-44.938
Lorsque l’employeur procède à la rupture de la période d’essai, celle-ci doit être en relation avec les performances du salarié, et en aucun cas influencée par un évènement extérieur (baisse d’activité, suppression du poste, etc.).
La rupture risquerait alors d’être considérée comme abusive, et entrainerait le versement de dommages et intérêts.
A titre de rappel, un récent arrêt de la Cour de cassation concernant la rupture de la période d’essai pour ...manque de neige !
Cour de cassation du 15/12/2010 pourvoi K 09-42.773 n° arrêt 2536 F-D
La rupture de la période d’essai n’est soumise à aucun formalisme légal, mais certaines conventions collectives peuvent prévoir néanmoins l’information par lettre recommandée, et parfois l’obligation de motiver la rupture de la période d’essai.
La rupture de la période d’essai n’entraîne le versement d’aucune indemnité (à part l’éventuelle indemnité compensatrice de congés payés si le temps de présence est suffisant).
En revanche, l’employeur doit remettre au salarié (quelle que soit la partie qui est à l’initiative de la rupture) tous les documents prévus dans le cas d’une rupture du contrat de travail à savoir :
- Reçu pour solde de tout compte ;
- Attestation Pôle emploi (en 2 exemplaires dont 1 pour le salarié) ;
- Certificat de travail;
- Dernier bulletin de salaire avec son paiement.
Rupture de la période d’essai : formalisme obligatoire dans certains cas
Il existe des cas particuliers pour lesquels la rupture de la période d’essai doit obligatoirement obéir à un formalisme.
Rupture pour faute :
Dans ce cas, la rupture doit être précédée d’un entretien préalable.
Salarié protégé :
L’employeur doit demander l’autorisation à l’inspection du travail avant de rompre la période d’essai d’un salarié protégé.
Rupture de la période d’essai : respect du délai de prévenance
La loi LMMT instaure un délai de prévenance à respecter par chaque partie concernée.
Avant la loi, la période d’essai pouvait être rompue sans délai !
Depuis le 27 juin 2008, salariés et employeurs doivent respecter un certain délai, baptisé « délai de prévenance » .
Les délais de prévenance dépendent du temps de présence du salarié dans l’entreprise.
Présence dans l’entreprise | Délai prévenance | |
---|---|---|
Rupture de l’employeur | Rupture du salarié | |
7 jours maxi | 24 heures | 24 heures |
8jours à 1 mois | 48 heures | 48 heures |
Après 1 mois | 2 semaines | 48 heures |
Après 3 mois | 1 mois | 48 heures |
Article L1221-25
Créé par LOI n°2008-596 du 25 juin 2008 - art. 2 (V)
Lorsqu'il est mis fin, par l'employeur, au contrat en cours ou au terme de la période d'essai définie aux articles L. 1221-19 à L. 1221-24 ou à l'article L. 1242-10 pour les contrats stipulant une période d'essai d'au moins une semaine, le salarié est prévenu dans un délai qui ne peut être inférieur à :
1° Vingt-quatre heures en deçà de huit jours de présence ;
2° Quarante-huit heures entre huit jours et un mois de présence ;
3° Deux semaines après un mois de présence ;
4° Un mois après trois mois de présence.
La période d'essai, renouvellement inclus, ne peut être prolongée du fait de la durée du délai de prévenance
Article L1221-26
Créé par LOI n°2008-596 du 25 juin 2008 - art. 2 (V)
Lorsqu'il est mis fin à la période d'essai par le salarié, celui-ci respecte un délai de prévenance de quarante-huit heures. Ce délai est ramené à vingt-quatre heures si la durée de présence du salarié dans l'entreprise est inférieure à huit jours.
Le délai de prévenance ne doit pas avoir pour effet de prolonger la période d’essai au-delà des maxima prévus pour l’employeur.
Le délai de prévenance se décompte à compter de la date d’envoi de la lettre recommandée (réponse ministérielle 15/04/2008) ou bien à la date de remise de la lettre si elle donnée en main propre au salarié.