Quand la Cour de cassation précise le calcul du taux horaire des heures supplémentaires…

Jurisprudence
Heures supplémentaires

Publié le
Mis à jour le
Télécharger en PDF

Contexte de l'affaire

Préambule

Nous avons traité l’affaire présente sur notre site, sur un autre aspect, par le biais d’une publication intitulée « Le licenciement pour inaptitude devient sans cause réelle et sérieuse si l’employeur est fautif ».

Cette fois, c’est sur un autre aspect de l’affaire que nous vous proposons la présente jurisprudence commentée… 

La présente affaire concerne 3 salariés, exerçant les fonctions de VRP.

Ils sont licenciés le 3 mai 2012 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Mais ils décident de saisir la juridiction prud’homale, estimant que les commissions qui leur étaient versées devaient être intégrées dans le calcul des heures supplémentaires. 

Dans un premier temps, la Cour d’appel de Lyon déboute les salariés de leur demande, dans son arrêt du 9 juillet 2015. 

Tout en rappelant la règle selon laquelle les éléments de rémunération « dont les modalités de fixation permettent leur rattachement direct à l'activité personnelle du salarié doivent être intégrés dans la base de calcul des majorations pour heures supplémentaires», la cour d’appel estime que le taux horaire à retenir est celui de la « rémunération fixe » et que le calcul des commissions est totalement « déconnecté de l’horaire de travail ».

Extrait de l’arrêt :

Attendu que les éléments de rémunération dont les modalités de fixation permettent leur rattachement direct à l'activité personnelle du salarié doivent être intégrés dans la base de calcul des majorations pour heures supplémentaires ;
Attendu que pour évaluer le montant des sommes dues aux salariés au titre des heures supplémentaires, l'arrêt retient que le taux horaire à retenir est celui résultant de la rémunération fixe, le calcul des commissions étant totalement déconnecté de l'horaire de travail ; 

Mais la Cour de cassation ne partage pas du tout l’avis de la cour d’appel.

Elle estime en effet que :

  1. Le montant des commissions avait pour seule base les résultats obtenus par les salariés ;
  2. Et par voie de conséquence, devaient être pris en compte dans le calcul du taux horaire sur lequel s’applique ensuite la majoration au titre des heures supplémentaires. 

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle retenait que le montant des commissions avait pour seule base les résultats obtenus par les salariés, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; (…)

PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce (…)

Cour de cassation du , pourvoi n°15-25066

Commentaire de LégiSocial

L’intégration de certains éléments dans le calcul des heures supplémentaires est un aspect assez particulier du traitement de la paie que nous vous proposons d’aborder dans la présente partie « commentaires ». 

Le taux horaire de base qui doit être pris en compte pour le calcul du taux horaire majoré (à 10% ou 25% ou 50%) tient compte (ou non) de certains éléments.

Éléments pris en compte

Certaines primes : 

Celles qui constituent la contrepartie directe du travail fourni, et celles inhérentes à la nature du travail (positions reconnues de nombreuses fois par la jurisprudence) comme les primes suivantes :

  • Prime de danger, d’insalubrité, de froid, de situation géographique sur les chantiers du bâtiment ;
  • Primes de polyvalence, de risque ;
  • Prime de vol pour un pilote ;
  • Prime pour travail le dimanche, un jour férié, travail de nuit ;
  • Prime de dépaysement ;
  • Prime de détachement ou d’emploi à l’étranger ;
  • Prime de production liée au rendement individuel ou collectif ;
  • Prime d’assiduité (cas particulier car l’administration rejette la prise en compte de cette prime selon la circulaire de la DRT 94-4 du 21 avril 1994 mais la jurisprudence la reconnait dans son arrêt du 26/10/1979 et son arrêt 78-41113, notre outil prend en compte les 2 possibilités). 

Les avantages en nature

Éléments à exclure

Les primes suivantes sont à exclure : 

  • Prime exceptionnelle ;
  • Prime de vacances ;
  • Primes d’ancienneté ;
  • Prime de 13ème mois ;
  • Primes de déplacement, de transport ;
  • Primes d'intéressement ;
  • Primes de participation ;
  • Primes de productivité (prime indépendante du travail des salariés) ;
  • Primes de mariage, de naissance, de médaille du travail ;
  • Sont également exclues toutes les sommes représentatives des frais professionnels.

Exemple chiffré

Un salarié bénéficie du paiement de 5 heures supplémentaires dans le mois, majorées au taux de 25%. 

Sa rémunération de base est supposée fixée à 1.900,00 €, à laquelle s’ajoute :

  • Une prime de danger de 500,00 € ;
  • Une prime pour travail du dimanche de 400,00 € ;
  • Un avantage en nature de 200,00 € ;
  • Une prime à caractère exceptionnel de 500,00 €.

Calcul des taux horaire majoré :

  • 24.72 € =  [(1.900,00 + 500,00+400,00+200,00)/151,67]*1.25  

Pour info….

Pour information, dans l’affaire que nous abordons aujourd’hui, l’employeur est condamné à payer :

  1. Au 1er VRP, la somme de 15.040,36 € d’heures supplémentaires (plus 10% au titre des CP) ;
  2. Au 2ème VRP, la somme de 12.798,12 € d’heures supplémentaires (plus 10% au titre des CP) ;
  3. Au 1er VRP, la somme de 64.231,17 € d’heures supplémentaires (plus 10% au titre des CP) ;
  4. Ce qui fait un total général 101.276,61 € (ICCP comprise). 

Extrait de l’arrêt :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce (…)

- qu'il condamne la société (…) à payer à (...) la somme de 15 040,36 euros bruts au titre des heures supplémentaires, outre 1 504,04 euros de congés payés afférents,
- qu'il condamne la société (…) à payer à (...) la somme de 12 798,12 euros bruts au titre des heures supplémentaires, outre 1 279,81 euros de congés payés afférents,
- qu'il condamne la société …)à payer à (...) la somme de 64 231,17 euros bruts au titre des heures supplémentaires, outre 6 423,12 euros de congés payés afférents,