Contexte de l'affaire
Une salariée est engagée le 3 avril 2000 en qualité de VRP.
Le 20 juillet 2004, elle est victime d'une chute dans un escalier de l'entreprise et placée en arrêt de travail pour accident du travail.
A l'issue de deux examens de reprise des 9 et 24 mai 2006, elle est déclarée définitivement inapte à son poste par le médecin du travail qui préconise, dans son dernier avis, un reclassement "sur un poste sédentaire sans déplacement en véhicule léger et sans marche prolongée, donc type de travail en bureau".
Convoquée par lettre du 29 mai 2006, à un entretien préalable fixé au 12 juin suivant, elle est licenciée le 21 juin 2006 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
La salariée saisit la juridiction prud’homale de plusieurs demandes, notamment une qui concerne l’indemnité qui lui a été versée, chiffrée comme l’indemnité compensatrice correspondant à la durée du préavis légal.
Estimant le caractère « indemnitaire » de la somme versée, la salariée estime qu’elle doit bénéficier à ce titre d’une exonération de cotisations sociales.
La Cour d'appel de Fort-de-France, dans son arrêt du 13 mars 2015, déboute la salariée de sa demande.
La Cour de cassation suit l’arrêt de la cour d’appel, estimant que :
- Selon le dernier alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail intervenant à l'initiative de l'employeur sont assujetties aux cotisations sociales dès lors qu'elles constituent une rémunération imposable en application de l'article 80 duodecies du code général des impôts ;
- Qu’il en résulte que l'indemnité compensatrice versée aux salariés licenciés pour inaptitude à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, nonobstant son caractère indemnitaire, est soumise à cotisations dans la mesure où, en application de l'article 80 duodecies du code général des impôts, elle est assujettie à l'impôt sur le revenu.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la condamner à rembourser à la société une somme à titre de trop-perçu sur l'indemnité compensatrice de préavis, alors, selon le moyen, que l'indemnité prévue à l'article L. 1226-14 du code du travail, au paiement de laquelle l'employeur est tenu en cas de rupture du contrat de travail d'un salarié déclaré, par le médecin du travail, inapte à son emploi en conséquence d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, et dont le montant est égal à celui de l'indemnité prévue à l'article L. 1234-5 du code du travail, n'a pas la nature d'une indemnité compensatrice de préavis ; qu'en jugeant le contraire, pour condamner Mme X... à rembourser à la société (…) la somme de 2 185,02 euros au titre du montant des cotisations sociales dues par l'employeur sur l'indemnité compensatrice de préavis, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-14 du code du travail ;
Mais attendu que, selon le dernier alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail intervenant à l'initiative de l'employeur sont assujetties aux cotisations sociales dès lors qu'elles constituent une rémunération imposable en application de l'article 80 duodecies du code général des impôts ; qu'il en résulte que l'indemnité compensatrice versée en application de l'article L. 1226-14 du code du travail aux salariés licenciés pour inaptitude à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, nonobstant son caractère indemnitaire, est soumise à cotisations dans la mesure où, en application de l'article 80 duodecies du code général des impôts, elle est assujettie à l'impôt sur le revenu ; que le moyen n'est pas fondé ;
Commentaire de LégiSocial
Profitons du présent arrêt pour rappeler quelques notions importantes concernant cette indemnité versée en cas d’inaptitude professionnelle et impossibilité de reclassement.
Inaptitude consécutive à une maladie ou accident professionnel
Aucun préavis
Dans ce cas précis, le salarié ne doit pas effectuer de préavis.
Il doit percevoir néanmoins :
- Une indemnité d’un montant égal à l’indemnité légale de préavis.
Article L1226-14
La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.
Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.
Les dispositions du présent article ne se cumulent pas avec les avantages de même nature prévus par des dispositions conventionnelles ou contractuelles en vigueur au 7 janvier 1981 et destinés à compenser le préjudice résultant de la perte de l'emploi consécutive à l'accident du travail ou à la maladie professionnelle.
Article L1226-16
Les indemnités prévues aux articles L. 1226-14 et L. 1226-15 sont calculées sur la base du salaire moyen qui aurait été perçu par l'intéressé au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail provoquée par l'accident du travail ou la maladie professionnelle.
Pour le calcul de ces indemnités, la notion de salaire est définie par le taux personnel, les primes, les avantages de toute nature, les indemnités et les gratifications qui composent le revenu.
Indemnité ≠ indemnité compensatrice de préavis
- Cette indemnité n’a pas la nature d’une indemnité compensatrice de préavis ;
Cour de cassation du 15/06/1999 arrêt 97-15328
- De ce fait, le salarié n’est pas en droit de demander le paiement de l’indemnité compensatrice de préavis prévue par la Convention collective ;
- L’indemnité versée n’étant pas une indemnité compensatrice de préavis légale (même si la valeur est identique), la date de rupture du contrat de travail n’est pas repoussée ;
- L’indemnité d’une valeur égale à l’indemnité compensatrice de préavis sera calculée sur la base des 3 derniers mois de salaire (article L 1226-16 du Code du travail) ;
- Le montant de cette indemnité ne doit pas être pris en compte dans le calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés.