Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 20 décembre 1999, et promu dans les fonctions de technicien de maintenance par avenant du 10 janvier 2006, le faisant bénéficier d'une prime d'équipe par journée travaillée en équipe tournante.
En raison d’un arrêt maladie, son activité professionnelle est interrompue du 25 mars au 26 avril 2009, puis au titre d’un accident du travail du 12 décembre 2009 au 5 mars 2010 et enfin du 28 mars au 31 décembre 2010 pour rechute d'accident du travail.
Le salarié saisit la juridiction prud’homale, estimant ne pas avoir été rempli de ses droits en matière de garantie conventionnelle de maintien du salaire.
Selon le salarié, dans le cadre du respect des dispositions conventionnelles, il devait bénéficier du versement d’une indemnité en cas de maladie ou d'accident en complément des prestations de sécurité sociale et éventuellement du régime de prévoyance auquel participe l'entreprise, calculée :
- De façon à ce que l'indemnité perçue par le mensuel représente les appointements nets à plein tarif pendant le 1er mois et la moitié du 2ème mois ;
- Puis les ¾ des appointements mensuels nets pendant la période d'un mois qui suit.
Selon le salarié, la prime d’équipe dont il aurait bénéficiée s’il avait travaillé, devait être incluse dans le calcul conduisant au maintien de sa rémunération.
Extrait de l’arrêt :
Attendu, selon ce texte, que l'indemnité versée au salarié en cas de maladie ou d'accident en complément des prestations de sécurité sociale et éventuellement du régime de prévoyance auquel participe l'entreprise, doit être calculée de façon à ce que l'indemnité perçue par le mensuel représente les appointements nets à plein tarif pendant le premier mois et la moitié du deuxième mois et les trois quarts des appointements mensuels nets pendant la période d'un mois qui suit ; qu'il en résulte qu'en l'absence d'exclusion, une prime d'équipe qui aurait été perçue par le salarié s'il avait continué à travailler, doit être incluse dans l'assiette de calcul de l'indemnité complémentaire due par l'employeur ;
Dans son arrêt du 24 juin 2015, la Cour d'appel de Lyon déboute le salarié de sa demande.
Elle estime en effet, qu’après avoir examiné les bulletins de paie, cette prime due par application de l'avenant du 1er décembre 2005, était versée au salarié en période travaillée, retient que la convention collective ne prescrit pas l'intégration des primes d'équipe dans le salaire à maintenir.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour exclure de l'assiette de calcul de l'indemnité complémentaire la prime d'équipe contractuelle, la cour d'appel, après avoir constaté à l'examen des bulletins de paie que cette prime, due par application de l'avenant du 1er décembre 2005, était versée au salarié en période travaillée, retient que la convention collective ne prescrit pas l'intégration des primes d'équipe dans le salaire à maintenir ;
Mais la Cour de cassation ne partage pas l’avis de la cour d’appel.
Constatant que la prime contractuelle était payée en période travaillée, il en résulte que le salarié l’aurait perçue s’il avait continué à travailler.
Elle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, partant du principe que la convention collective ne dressait pas en détail la liste des éléments de salaire à inclure ou non dans le calcul, et on ne pouvait pas en déduire que tout élément de rémunération non cité comme entrant dans le calcul devait être exclu.
Extrait de l’arrêt :
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la prime contractuelle était payée en période travaillée, ce dont il résultait que le salarié l'aurait perçue s'il avait continué à travailler, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le pourvoi de l'employeur :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Commentaire de LégiSocial
Profitons de la présente affaire pour rappeler quelques règles concernant le maintien de la rémunération nette du salarié à 100%.
Obligation de respecter les dispositions conventionnelles
Si des conventions collectives déterminent un maintien de salaire plus favorable que celui prévu par la loi de mensualisation, l'employeur est tenu par ces dispositions.
Dans certains cas, les textes s'engagent sur un maintien du « net » (ce qui correspond au net après retenues).
La Cour de cassation a confirmé dans un arrêt, que l'employeur avait la possibilité d’appliquer cette méthode en l’absence de précision de la convention collective qui n’indique pas clairement si le maintien s’entend « maintien du brut » ou « maintien du net ».
Cour de cassation du 11/03/1997 arrêt 94-40869 D
Le principe de base
L’objectif est de parvenir à une égalité entre le net à payer sans l’arrêt maladie et le net à payer durant l’arrêt maladie, par un ajustement sur la ligne du brut.
Les calculs sont délicats, et beaucoup d’entreprises font appel aux logiciels de paye afin de réaliser des « payes inversées » pour pouvoir faire les bons calculs.
De plus les calculs sont différents si le salarié est en dessous ou au dessus du plafond mensuel de SS.
Il s’agit donc de neutraliser les incidences de l’exonération de charges sociales des indemnités journalières (pour ne pas arriver à la situation rencontrée lorsque l’entreprise applique le maintien du salaire brut).
Il faut donc « recalculer » les IJSS brutes versées par la Sécurité sociale façon « salaire ».
Bulletin de paie à réaliser
Schématiquement, il faudra arriver à la situation suivante
Salaire de base habituel | |
IJSS brutes recalculées en tenant compte du taux de cotisations salariales habituellement pratiqué dans l’entreprise | |
Salaire brut | |
Cotisations salariales | |
Net après retenues | |
IJSS nettes (valeur identique à celle que la sécurité sociale détermine) | |
Net à payer | |
Rémunération selon la méthode « maintien du salaire net » |
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Exemple chiffré
Soit un salarié non cadre ayant des cotisations salariales à hauteur des cotisations obligatoires en vigueur en 2017 (hors mutuelle).
Le maintien du salaire à 100% du net se réalise en respectant les étapes suivantes :
- détermination des IJSS brutes versées par la sécurité sociale ;
- détermination des IJSS nettes correspondantes ;
- recalcul des IJSS brutes en prenant en compte le taux de cotisations salariales en vigueur, c'est-à-dire 22,21 % ;
- incorporer en haut du bulletin les IJSS brutes recalculées ;
- insérer en bas du bulletin les IJSS nettes déterminées par la Sécurité Sociale.
IJSS brutes « recalculées » = IJSS nettes versées par la sécurité sociale / (1 – taux de cotisations salariales applicables sur le bulletin de paie du salarié).
Fiches pratiques
Pour terminer, rappelons que plusieurs fiches pratiques vous proposent sur notre site plusieurs exemples chiffrés et concrets comme suit :
- Exemple chiffré numéro 1 : maintien de salaire en cas d’arrêt maladie et maintien 100% du net strict, accessible en cliquant ici ;
- Exemple chiffré numéro 2 : maintien de salaire en cas d’arrêt maladie et maintien 100% du net, accessible en cliquant ici.
Lire aussi : Connaissez-vous le principe du maintien de salaire « 100% du net strict » en 2017 ? Fiche pratique
Nouvelle fiche pratique consacrée au maintien de salaire par l’employeur en cas d’arrêt maladie, nous abordons aujourd’hui le maintien dit « 100% du net strict ». A l’origine… des arrêts ...
Lire aussi : Comment maintenir la rémunération nette habituelle d'un salarié en maladie en 2017 ? Fiche pratique
Après avoir abordé dans une précédente fiche pratique, le maintien de l’employeur selon les dispositions légales, la présente fiche pratique vous propose le chiffrage du maintien de l’employeur, selon des ...