Contexte de l'affaire
Un salarié est mis à la disposition d’une société de logistique, en qualité de préparateur de commandes, par plusieurs contrats d'intérim.
Par la suite, le salarié est engagé par cette société selon contrat à durée déterminée pour la période du 5 février au 4 novembre 2007, renouvelé jusqu'au 3 août 2008.
Victime d'un accident du travail le 25 février 2008 et placé en arrêt de travail jusqu'au 4 mars 2009, le salarié se voit notifié le 16 juillet 2008, la rupture de son contrat de travail pour fin de contrat à durée déterminée.
Sa réintégration, sollicitée le 2 mai 2012, est devenue effective le 8 septembre 2014.
Le salarié décide de saisir la juridiction prud’homale, aux fins d’obtenir le report des congés payés « perdus » pendant sa période d’éviction de l’entreprise.
Dans son arrêt du 9 avril 2015, la Cour d'appel de Versailles déboute le salarié de sa demande.
La Cour de cassation approuve en tous points cet arrêt, rejetant le pourvoi de ce fait.
Elle précise que la période d’éviction ouvre droit à une indemnité d’éviction mais ne permet nullement l’acquisition de jours de congés payés.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu que la période d'éviction ouvrant droit, non à une acquisition de jours de congés, mais à une indemnité d'éviction, la cour d'appel a exactement décidé que le salarié ne pouvait bénéficier effectivement de jours de congés pour cette période ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen du même pourvoi, ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel n'ayant pas modifié l'objet du litige en statuant sur les demandes formées devant elle, le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Commentaire de LégiSocial
C’est un arrêt important que rend la Cour de cassation dans la présente affaire et qui nous permet de rappeler quelques notions importantes concernant l’annulation d’un licenciement suivie de la réintégration du salarié.
Annulation du licenciement : le contrat de travail reprend
En cas d’annulation du licenciement, le salarié ouvre droit au versement d’une indemnité correspondant au préjudice subi entre la rupture du contrat et sa réintégration, dans la limite des salaires qu’il aurait perçus s’il avait été présent dans l’entreprise.
La période « d'éviction » est alors évoquée.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que la société (…) fait enfin grief aux arrêts d'avoir ordonné la réintégration de 18 salariés qui le demandaient et dit que l'employeur était redevable de la totalité des salaires depuis le jour de leur départ jusqu'au jour de ladite réintégration, d'avoir alloué diverses indemnités à 6 salariés qui ne demandaient pas, ou plus, leur réintégration alors, d'une part, que dès l'instant où il croyait devoir déclarer les licenciements nuls et de nul effet, l'arrêt attaqué devait tirer toutes les conséquences de la nullité ainsi mise en oeuvre et rétablir chacune des parties dans l'exacte situation où elle se trouvait avant l'acte annulé de sorte que viole les articles L. 121-1, L. 122-14-4, L. 321-4-1 du Code du travail ainsi que l'article 1131 du Code civil l'arrêt attaqué qui condamne l'employeur à verser tous les salaires dus à raison de la poursuite du contrat de travail sans tenir compte des avantages et indemnités perçus en exécution de l'acte de licenciement annulé ; alors, d'autre part, qu'en évaluant à différentes sommes les dommages-intérêts dus aux salariés qui n'ont pas demandé leur réintégration pour le préjudice subi du fait du licenciement sans rechercher si le montant des indemnités légales et conventionnelles versées à l'occasion du licenciement et devenues, ipso facto, sans cause, devait être imputé sur les indemnités allouées, l'arrêt attaqué a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes ;
Mais attendu qu'en décidant que les licenciements étaient nuls et de nul effet, la cour d'appel a nécessairement remis en cause les versements effectués en vertu de ces licenciements ; que, dès lors qu'elle n'était saisie d'aucune demande, même subsidiaire, au sujet de ces sommes, elle a statué dans les limites du litige ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mardi 28 mars 2000
N° de pourvoi: 98-40228 99-41717 Publié au bulletin
Période d’éviction ≠ période acquisition congés payés
Voilà comment nous pouvons résumer l’arrêt de la Cour de cassation que nous commentons aujourd’hui.
Nous pouvons en déduire que la « remise en l’état du contrat de travail d’un salarié » dont la nullité du licenciement a été prononcée n’est donc que « partielle ».
Si le salarié peut prétendre au versement d’une indemnité visant à réparer le préjudice, il n’est est pas de même pour les congés payés, la période n’est pas travaillée : aucun jour de congés payés n’est acquis.