Contexte de l'affaire
Une salariée est engagée par une société, qui exerce une activité de soutien et d'accompagnement psychologique par téléphone, en qualité de psychologue clinicienne, statut cadre, en vertu d'un contrat CDD à temps partiel modulé pour une période de 3 mois du 15 octobre 2008 au 15 janvier 2009, date au delà de laquelle la relation de travail s'est poursuivie en contrat CDI.
A l’issue d'un arrêt maladie du 24 décembre 2009 au 26 février 2010, la salariée est déclarée inapte à tous postes dans l'entreprise.
Elle est licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre du 14 juin 2010.
La salariée saisit la juridiction prud’homale, présentant plusieurs demandes notamment au titre d'un maintien de salaire pendant son arrêt maladie et de rappel de salaire subséquent.
Elle réclame notamment l’intégration des rémunérations versées, à l’occasion d’interventions effectuées pendant des périodes d’astreinte.
Elle revendique cette rectification, au vu des termes de l'article 43 de la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (Syntec) qui prévoit qu’en cas de maladie, le salarié ouvre droit aux « sommes nécessaires pour compléter ce que verse la sécurité sociale, et, le cas échéant, un régime de prévoyance, (...) jusqu'à concurrence de ce qu'aurait perçu, net de toute charge, le cadre malade ou accidenté s'il avait travaillé à temps plein ou à temps partiel, non compris primes et gratifications ».
Dans son arrêt du 23 juin 2015, la Cour d'appel de Paris déboute la salariée de sa demande, estimant que n’est pas fondée l’intégration des sommes versées à l’occasion d’interventions durant les astreintes, ces salaires ayant un caractère variable en fonction de leur nombre et de leur durée.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour rejeter la demande de la salariée en maintien de salaire durant son arrêt maladie, l'arrêt retient que sa réclamation, en ce qu'elle est basée sur la moyenne des douze derniers mois de salaire en incluant les astreintes à domicile qui font l'objet d'une rémunération variable chaque mois en fonction du nombre d'intervention de la salariée et de leur durée, seule considérée comme du temps de travail effectif, n'est pas fondée ;
Mais la Cour de cassation ne partage pas le même avis, et décide de casser et annuler l’arrêt de la cour d’appel sur ce point.
Compte tenu du fait que :
- Les interventions pendant les astreintes sont assimilables à du temps de travail effectif ;
- Donnant lieu au paiement d’une rémunération qui doit être inclus dans la rémunération à prendre en considération au titre du maintien conventionnel de salaire lors d’un arrêt maladie.
Extrait de l’arrêt :
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la salariée percevait chaque mois une rémunération variable au titre des astreintes à domicile, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement, en ce qu'il rejette la demande de Mme X... au titre du maintien de salaire pendant les mois de janvier et février 2010, l'arrêt rendu le 23 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Commentaire de LégiSocial
Profitons de l’affaire présente pour rappeler la définition de l’astreinte, depuis la loi travail.
La définition
C’est désormais au sein de l’article L 3121-9 que nous est proposée la définition d’une période d’astreinte (article auparavant consacré aux équivalences).
Nous remarquerons que les termes « a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise » sont désormais remplacés par « doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise.».
Au sein du même article est intégré un nouveau paragraphe confirmant que :
- La période d'astreinte fait l'objet d'une contrepartie, soit sous forme financière, soit sous forme de repos.
Nous remarquerons également que la définition de l’astreinte, donnée par le présent article L 3121-9, précise bien que l’astreinte ne se déroule pas sur le lieu de travail (certains arrêts de la Cour de cassation semblent avoir été pris en considération en l’espèce).
Article L3121-9
Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)
Une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise.
La durée de cette intervention est considérée comme un temps de travail effectif.
La période d'astreinte fait l'objet d'une contrepartie, soit sous forme financière, soit sous forme de repos.
Les salariés concernés par des périodes d'astreinte sont informés de leur programmation individuelle dans un délai raisonnable.
Interventions durant les astreintes
Selon les termes de l’article L 3121-9, doit être considérée comme temps de travail effectif, l’intervention effectuée durant une période d’astreinte.
Précisons que ce temps d’intervention comprend, y compris l’intervention elle-même, le trajet « aller et retour » du salarié pour se rendre sur le lieu où sa présence est requise.