La Cour de cassation précise le calcul de l’indemnité de congés payés conventionnels

Jurisprudence
Paie Congés payés

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Contexte de l'affaire

La présente affaire concerne plusieurs salariés d’une association qui saisissent la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'une somme au titre des congés prévus à l'article 6 de l'annexe III de la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966. 

Selon les dispositions conventionnelles, les salariés étaient en droit de bénéficier de 6 jours de congés payés supplémentaires, et ils contestaient le calcul de l’indemnité qui leur avait été versée à ce titre, l’employeur s’étant contenté d’effectuer un maintien de la rémunération durant la prise de ces jours de congés payés conventionnels. 

Selon l’employeur, il n’était pas contraint d’effectuer les 2 calculs habituels (au 1/10ème et selon la méthode du maintien de salaire), faute de précision de la convention collective. 

Dans son arrêt du 1er avril 2016, la Cour d'appel de Toulouse donne raison aux salariés, mais l’employeur décide de se pourvoir en cassation. 

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, rappelant que les dispositions de l’article L 3141-22 du code du travail (article devenu par la suite L 3141-24 par la loi travail) qui déterminent le mode de calcul de l'indemnité de congés payés sont d’ordre public et s'appliquent également aux congés supplémentaires d'origine conventionnelle. 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu que les dispositions de l'article L. 3141-22 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable, qui déterminent le mode de calcul de l'indemnité de congés payés, qui sont d'ordre public, s'appliquent également aux congés supplémentaires d'origine conventionnelle ; qu'en décidant que les congés annuels supplémentaires prévus à l'article 6 de l'annexe 3 à la convention collective devaient être rémunérés selon la règle du dixième, plus favorable dans le cas d'espèce que celle du maintien du salaire, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;

Cour de cassation du , pourvoi n°16-18109 pourvoi n°16-18110 pourvoi n°16-18111 pourvoi n°16-18112

Commentaire de LégiSocial

Profitons de la présente affaire pour rappeler quelques notions importantes concernant le calcul de l’indemnité de congés payés, selon la méthode dite au « 1/10ème » qui n’avait pas été appliquée par l’employeur présentement.

Principe fondamental

L’indemnité de congés payés est la somme que l’entreprise verse au salarié lors de la prise de congés payés. Un principe fondamental doit être respecté dans cette situation. :

  • Le salarié doit percevoir au minimum le salaire qu’il aurait perçu s’il avait été présent dans l’entreprise au moment du départ en congés !!!

Article L3141-24

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

I.-Le congé annuel prévu à l'article L. 3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.

Pour la détermination de la rémunération brute totale, il est tenu compte :

1° De l'indemnité de congé de l'année précédente ;

2° Des indemnités afférentes à la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévues aux articles L. 3121-30, L. 3121-33 et L. 3121-38 ;

3° Des périodes assimilées à un temps de travail par les articles L. 3141-4 et L. 3141-5 qui sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération en fonction de l'horaire de travail de l'établissement.

Lorsque la durée du congé est différente de celle prévue à l'article L. 3141-3, l'indemnité est calculée selon les règles fixées au présent I et proportionnellement à la durée du congé effectivement dû.

II.-Toutefois, l'indemnité prévue au I du présent article ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler.

Cette rémunération, sous réserve du respect des dispositions légales, est calculée en fonction :

1° Du salaire gagné dû pour la période précédant le congé ;

2° De la durée du travail effectif de l'établissement.

III.-Un arrêté du ministre chargé du travail détermine les modalités d'application du présent article dans les professions mentionnées à l'article L. 3141-32.

Faible augmentation de la rémunération : la méthode au 1/10ème est la plus favorable

Le calcul au dixième est réputé être le plus favorable pour le salarié lorsque l’augmentation de salaire durant la période de référence est inférieure à 4%.

La méthode est nommée « dixième » car elle correspond à :

  • 5 semaines de congés payés sur un total de 52 semaines dans l’année. 

Pourquoi plus favorable ?

  • Parce que 5/52 = 9.615%, l’administration pratique donc un arrondi supérieur en amenant le résultat à 10%.

Règle de calcul

La valeur du droit global correspond à la somme des salaires bruts versés durant la période de référence (1er juin N au 31 mai N+1) divisée par 10.

Exemple :

  • Un salarié bénéficie d’un droit global de 30 jours ouvrables ;
  • Le cumul des salaires bruts versés durant la période de référence est de 32.000€ ;
  • Les 30 jours de congés payés correspondent à 32.000€ / 10 = 3.200 €

Sommes à exclure

Toutes les sommes versées au salarié sont à prendre en compte à l’exclusion des éléments suivants :

  • Remboursements de frais professionnels (y compris la prise en charge des frais de transports collectifs) ;
  • Indemnité compensatrice de congés payés (pour congés reportés par exemple) ;
  • Sommes correspondant à la participation ou à l’intéressement ;
  • Avantages en nature dont le salarié continuerait à bénéficier pendant ses congés payés (par exemple l’avantage en nature logement, si cet élément n’était pas exclu, cela reviendrait à le payer 2 fois, voir article L 3141-25 à ce sujet);
  • Les primes allouées tout au long de l’année (y compris pendant la période de congés payés) parmi lesquelles on peut citer les primes 13ème mois, les primes vacances, les primes d’assiduité, les primes exceptionnelles**;
  • Les primes « facultatives » ou « bénévoles » ;
  • Les indemnités au titre de l’activité partielle (sauf conditions conventionnelles ou collectives plus favorables) ou de chômage intempéries ;
  • Revenus de remplacement (IJSS maladie) ;
  • Prime de partage de la valeur ajoutée (aussi appelée « prime dividendes »).

** Nota : concernant ces primes à exclure, peu importe que le versement de ladite prime soit annuel ou réparti par trimestre ou semestre.

Article L3141-25

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Pour la fixation de l'indemnité de congé, il est tenu compte des avantages accessoires et des prestations en nature dont le salarié ne continuerait pas à jouir pendant la durée de son congé.

La valeur de ces avantages et prestations ne peut être inférieure à celle fixée par l'autorité administrative.

Sommes à ajouter

L’article L 3141-24 du code du travail prévoit que des périodes assimilées à un temps de travail effectif soient prises en compte.

Il est question des salaires qui auraient été versés au salarié s’il avait été présent pendant une période assimilable à du travail effectif par la loi.

Sont donc à prendre en compte les salaires « fictifs » des absences assimilées à du travail effectif, donc au titre :

  • De l’accident du travail ou de la maladie professionnelle, dans la limite d’une année ;
  • D’une période d’activité partielle. 

Exemple : un salarié est en arrêt de travail consécutif à un accident du travail.

Tous les salaires correspondant à la durée de l’arrêt doivent être considérés à la valeur de ce que le salarié aurait perçu s’il avait été présent.

Primes et indemnité congés payés

Nombreuses sont les incertitudes concernant la prise en compte des primes dans la base de calcul de l’indemnité de congés payés.

Précisons que sont à inclure les primes suivantes : 

Primes de sujétion ou de servitude inhérentes à l’emploi :

  • prime de salissure ;
  • prime de soirée ;
  • prime de nuit ;
  • prime de froid.

Autres primes ayant la nature de complément de salaire :

  • prime de rendement ;
  • prime de production ;
  • prime d’ancienneté (sauf si elle est versée tout au long de l’année, périodes de travail et de congés confondues) ;
  • prime d’objectif liée à des résultats personnels.