L’indemnité pour non-respect d’un préavis par le salarié n’ouvre pas droit à congés payés pour l’employeur

Jurisprudence
Paie Congés payés

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé le 1er avril 2003 et occupe en dernier lieu un emploi de coordinateur des ventes nationales.

Par lettre du  29 janvier 2009, adressée à l'employeur, l'avocat du salarié indique que son client prenait acte de la rupture de son contrat de travail.

Par la suite, le salarié saisit la juridiction prud'homale afin que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

Mais les griefs invoqués par le salarié ne sont pas considérés comme suffisants pour justifier la prise d’acte.

De ce fait, celle-ci produit les effets d’une démission et le salarié redevable d’une indemnité pour non-respect de la période de préavis.

La question qui se posait présentement était de savoir si cette indemnité compensatrice ouvrait droit à des congés payés au profit de l’employeur. 

Dans un premier temps, la Cour d’appel de Paris dans son arrêt du 16 décembre 2015 considère que l’employeur est en droit de bénéficier du paiement d’une indemnité compensatrice au titre des congés payés rapportée à la période de préavis non effectuée par le salarié. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour condamner le salarié à payer à l'employeur la somme de 1 810, 50 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt retient que l'indemnité compensatrice de préavis correspond aux appointements, y compris l'indemnité de congés payés, qu'aurait perçus le salarié s'il avait travaillé pendant cette période, que son montant est identique quelle que soit l'origine de la rupture et quel qu'en soit le débiteur, qu'au cas d'espèce le salarié n'ayant pas effectué les trois mois de préavis, c'est à bon droit que le premier juge l'a condamné à verser à son ancien employeur la somme de 18 105 euros correspondant à trois mois de salaire ainsi que la somme de 1 810, 50 euros au titre des congés payés afférents ;  

Mais la Cour de cassation ne partage pas l’avis de la cour d’appel, elle casse et annule cet arrêt estimant que l’indemnité « due par le salarié à l'employeur en cas de non-respect de son préavis n'ouvre pas droit à des congés payés au profit de l'employeur »

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi alors que l'indemnité due par le salarié à l'employeur en cas de non-respect de son préavis n'ouvre pas droit à des congés payés au profit de l'employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; 

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE (…) l'arrêt rendu le 16 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Cour de cassation du , pourvoi n°16-12524

Commentaire de LégiSocial

La présente affaire nous permet de rappeler les conséquences d’une prise d’acte produisant les effets d’une démission.

Sommes non dues

Ne sont donc pas dues les sommes suivantes :

  • Indemnité de licenciement ;
  • Indemnité compensatrice de préavis et congés afférents ;
  • Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul.

Sommes dues par le salarié

A contrario, le salarié peut être redevable du paiement de l’indemnité compensatrice de préavis, la prise d’acte rompt le contrat de travail immédiatement, le salarié n’a donc pas effectué de préavis.

 Extrait de l’arrêt

Et attendu, d'abord, qu'après avoir constaté que lors de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié le 16 décembre 2005, l'employeur n'avait pas modifié le contrat de travail, ni manqué à ses obligations, la cour d'appel a, à bon droit, analysé la rupture comme une démission ;
Et attendu, ensuite, que lorsque la prise d'acte de la rupture du contrat de travail rompt celui-ci, le salarié peut être condamné à indemniser l'employeur pour non-respect du préavis ; que la cour d'appel, qui a retenu que la prise d'acte de la rupture produisait les effets d'une démission et a condamné le salarié à indemniser l'employeur pour non-respect du préavis, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi

Cour de cassation du 4/02/2009, pourvoi 07-44142 

 Extrait de l’arrêt

Mais attendu que la prise d'acte de la rupture du contrat qui n'est pas justifiée produit les effets d'une démission ; qu'il en résulte que le salarié doit à l'employeur le montant de l'indemnité compensatrice de préavis résultant de l'application de l'article L. 1237-1 du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen :
REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du 8/06/2011, pourvoi 09-43208

Et en cas de PSE ?

Lorsque la prise d'acte de la rupture produit les effets d'une démission, le salarié peut prétendre aux mesures prévues dans un plan de sauvegarde de l'emploi relatives aux salariés démissionnaires.

 Extrait de l’arrêt

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande fondée sur les dispositions du plan de sauvegarde de l'emploi relative aux salariés démissionnaires, l'arrêt retient que si la prise d'acte injustifiée de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission, elle ne lui équivaut pas ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la rupture du contrat de travail produisant les effets d'une démission, les dispositions du plan de sauvegarde de l'emploi relatives aux salariés démissionnaires étaient applicables, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande fondée sur le plan de sauvegarde de l'emploi, l'arrêt rendu le 17 janvier 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

 Cour de cassation du 20 juin 2007, pourvoi 06-41748