Licenciement pour inaptitude non professionnelle : l’indemnité doit prendre en compte la durée du préavis

Jurisprudence
Paie Indemnité de licenciement

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé le 5 septembre 1989 en qualité de tôlier chaudronnier.

Victime d’un accident de trajet survenu le 9 juin 2011, il est par la suite déclaré inapte à son poste par le médecin du travail à l'issue de deux examens du 1er et du 20 mars 2013.

Le 18 juin suivant, il est licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Mais le salarié saisit la juridiction prud’homale, aux fins d’obtenir un complément d’indemnité de licenciement, estimant que la période de préavis (à laquelle il aurait eu droit s’il n’avait été licencié pour inaptitude) n’avait été prise en compte dans le calcul de l’ancienneté. 

Dans un premier temps, la Cour d’appel de Versailles déboute le salarié de sa demande, dans son arrêt du 19 janvier 2016.

Elle estime en effet que l’inaptitude d’origine non professionnelle n’ouvre pas droit au paiement d’une indemnité de préavis, et que la demande de complément d’indemnité de licenciement doit être rejetée. 

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour rejeter la demande en paiement d'un complément d'indemnité de licenciement prenant en compte la durée du préavis, l'arrêt retient que dès lors que l'inaptitude du salarié est étrangère à un accident du travail, l'indemnité de préavis n'est pas due au salarié puisque qu'il n'est pas en mesure de l'effectuer ;  

Mais la Cour de cassation casse et annule, à juste titre, cet arrêt.

Elle rappelle qu’en cas d’inaptitude d’origine non professionnelle, le salarié doit obtenir la prise en compte de la période de préavis dans l’ancienneté servant à calculer l’indemnité de licenciement. 

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors que la durée du préavis devait être néanmoins prise en compte pour le calcul de l'indemnité légale de licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; 

PAR CES MOTIFS : 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. X... en paiement d'un complément d'indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 19 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ; 

Cour de cassation du , pourvoi n°16-13883

Commentaire de LégiSocial

La présente affaire est l’occasion de rappeler quelques notions de base concernant le licenciement pour inaptitude et principalement l’attitude à adopter en matière de préavis. 

Inaptitude consécutive à une maladie ou accident non professionnel

Les conditions ont été modifiées suite à la publication de la loi 2012-387 du 22/03/2012 (Loi relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives, JO 23/03/2012).

Ainsi, lorsqu’un salarié fait l’objet d’un licenciement pour une inaptitude qui n’a pas d’origine professionnelle, le Code du travail indique que :

  • Le préavis n’est pas exécuté ;
  • Le contrat de travail est donc rompu à la notification du licenciement ;
  • Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l’indemnité ;
  • Aucune indemnité compensatrice de préavis n’est versée.

Inaptitude consécutive à une maladie ou accident professionnel

Dans ce cas précis, le salarié ne doit pas effectuer de préavis. 

Il doit percevoir néanmoins :

  • Une indemnité d’un montant égal à l’indemnité légale de préavis (article L 1226-14) ; 

Article L1226-14

La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.

Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.

Les dispositions du présent article ne se cumulent pas avec les avantages de même nature prévus par des dispositions conventionnelles ou contractuelles en vigueur au 7 janvier 1981 et destinés à compenser le préjudice résultant de la perte de l'emploi consécutive à l'accident du travail ou à la maladie professionnelle. 

Article L1226-16

Les indemnités prévues aux articles L. 1226-14 et L. 1226-15 sont calculées sur la base du salaire moyen qui aurait été perçu par l'intéressé au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail provoquée par l'accident du travail ou la maladie professionnelle.

Pour le calcul de ces indemnités, la notion de salaire est définie par le taux personnel, les primes, les avantages de toute nature, les indemnités et les gratifications qui composent le revenu.

  • Cette indemnité n’a pas la nature d’une indemnité compensatrice de préavis ;

Cour de cassation du 15/06/1999 arrêt 97-15328 

  • De ce fait, le salarié n’est pas en droit de demander le paiement de l’indemnité compensatrice de préavis prévue par la Convention collective ;
  • L’indemnité versée n’étant pas une indemnité compensatrice de préavis légale (même si la valeur est identique), la date de rupture du contrat de travail n’est pas repoussée ;
  • L’indemnité d’une valeur égale à l’indemnité compensatrice de préavis sera calculée sur la base des 3 derniers mois de salaire (article L 1226-16 du Code du travail) ;
  • Le montant de cette indemnité ne doit pas être pris en compte dans le calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés.