Contexte de l'affaire
Une salariée est engagée le 21 septembre 1998 en qualité de coiffeuse.
Son employeur lui refusant de lui régler un rappel d'heures supplémentaires au motif que cette somme devait s'imputer sur celle qu'elle lui devait au titre de communications téléphoniques interdites, la salariée saisit la juridiction prud'homale aux fins d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat et le paiement des heures supplémentaires dues.
La Cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 21 janvier 2016, donne raison à la salariée mais l’employeur décide de se pourvoir en cassation.
En effet, l’employeur conteste la décision de la cour d’appel au motif que :
- Le rappel d’heures supplémentaires représentait une somme modique ;
- Et que la salariée avait grandement tardé pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail (plus de 3 ans).
Extrait de l’arrêt :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts, de dire le licenciement nul et de le condamner à verser à la salariée des sommes au titre de la rupture du contrat de travail et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à la salariée dans la limite de six mois, alors, selon le moyen, que le juge ne peut prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail qu'en cas de manquement de l'employeur suffisamment grave empêchant la poursuite du contrat de travail ; que l'absence de paiement d'un montant limité d'heures supplémentaires, réalisées plus de trois ans avant la demande en résiliation judiciaire, ne saurait constituer un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail, peu important la raison invoquée par l'employeur pour refuser de payer ce rappel de salaire ; qu'au cas présent, la cour d'appel a prononcé la résiliation du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur au seul motif que ce dernier a effectué une compensation illicite en s'abstenant de verser à la salariée une somme de 826,27 euros au titre de 56,5 heures supplémentaires réalisées entre 2009 et 2011, soit moins de 19 heures par an ou 1,5 heure par mois ; qu'en se fondant sur ce seul manquement de l'employeur, cependant qu'il ressortait de ses propres constatations que cette somme, lissée sur trois ans, apparaissait modique et que la salariée avait attendu le 5 février 2013 pour saisir la juridiction prud'homale et se prévaloir d'un tel manquement de l'employeur aux fins d'obtenir la résiliation de son contrat de travail
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel en tous points.
Les juges de la Cour de cassation retiennent le fait que :
- L'employeur avait refusé de payer des heures de travail effectuées par la salariée au motif qu'elle aurait abusivement utilisé le téléphone de l'entreprise sans en apporter le moindre justificatif, et que cette compensation imposée constituait une sanction illégale ;
- Ce manquement de l'employeur était suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu qu'ayant retenu par motifs propres et adoptés que l'employeur avait refusé de payer des heures de travail effectuées par la salariée au motif qu'elle aurait abusivement utilisé le téléphone de l'entreprise sans en apporter le moindre justificatif, et que cette compensation imposée constituait une sanction illégale, la cour d'appel a pu décider que le manquement de l'employeur était suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Commentaire de LégiSocial
Profitons de l’affaire présente pour rappeler que l’absence de paiement d’heures supplémentaires peut avoir des conséquences fâcheuses, quelques jurisprudences sont là pour le rappeler…
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