Formuler des offres de reclassement dans la lettre de licenciement économique est… un peu tardif !

Jurisprudence
Paie Indemnité de licenciement

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Contexte de l'affaire

Une salariée est engagée en qualité de responsable commerciale à compter du 6 mai 1996.

Convoquée le 7 octobre 2011 à un entretien préalable en vue de son licenciement, l'intéressée saisit le 11 octobre suivant la juridiction prud'homale de diverses demandes dont une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

Elle est finalement licenciée pour motif économique par lettre du 25 novembre 2011, et décide de saisir la juridiction prud’homale, estimant que son employeur n’a pas satisfait à son obligation de reclassement. 

La Cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 18 février 2016, considère que la salariée doit être déboutée de sa demande, l’employeur ayant selon les juges satisfait à son obligation de reclassement en formulant 4 propositions dans la lettre de licenciement.

Le licenciement économique devait être déclaré fondé en conséquence.  

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour déclarer fondé le licenciement pour motif économique, l'arrêt retient que l'employeur démontre avoir satisfait à son obligation préalable de reclassement en formulant quatre propositions dans la lettre de licenciement ;

Mais la Cour de cassation ne partage pas du tout le même avis.

Elle indique en effet que les offres de reclassement n’étaient pas antérieures à la lettre de licenciement, mais figuraient dans cette dernière, de sorte que le licenciement économique s’en trouvait ainsi non fondé. 

Extrait de l’arrêt :

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que les offres de reclassement étaient non pas antérieures à la lettre de licenciement mais figuraient dans celle-ci, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et déboute Mme Y... de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 18 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°16-16060

Commentaire de LégiSocial

Profitons de la présente affaire pour rappeler quelques principes concernant l’obligation de reclassement qui pèse sur l’employeur lorsque celui-ci envisage le licenciement économique d’un salarié. 

Sur ce point précis, il convient de se rapprocher de l’article L 1233-4 du code du travail, modifié récemment par l’ordonnance Macron du 22 septembre 2017.

Efforts de formation et d’adaptation

Selon l’article précité, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Reclassement et emplois concernés

Le reclassement du salarié s'effectue :

  • Sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ;
  • Ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. 

A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. 

Communication offres de reclassement

Sur ce point précis, l’article L 1233-4 du code du travail indique que :

  • L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ;
  • Ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés ;
  • Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

 Article L1233-4 

Modifié par Ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 - art. 16

Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, le groupe est défini, lorsque le siège social de l'entreprise dominante est situé sur le territoire français, conformément au I de l'article L. 2331-1 et, dans le cas contraire, comme constitué par l'ensemble des entreprises implantées sur le territoire français.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

NOTA : 

Conformément à l'article 40 de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

V.- Ces dispositions sont applicables aux procédures de licenciement économique engagées après la publication de ladite ordonnance.

  1. - Les dispositions nécessitant des mesures d'application entrent en vigueur à la date de publication des décrets d'application, et au plus tard le 1er janvier 2018.