Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 1er février 1988, en qualité de chef de bureau.
Il est nommé, le 1er mars 2008, directeur de succursale.
Par la suite, le salarié est licencié, son employeur le dispensant d’effectuer sa période de préavis.
Le salarié décide de saisir la juridiction prud'homale de plusieurs demandes, notamment une concernant la contrepartie financière au titre de la clause de non-concurrence.
Il estime en effet que son employeur a tardivement renoncer à son application, au motif que le licenciement lui a été notifié fin décembre 2010 et que ce n’est qu’en février 2011 qu’il a indiqué au salarié son intention de renoncer à l’application de la clause de non-concurrence.
La Cour d’appel de Versailles, dans son arrêt du 3 décembre 2015, déboute le salarié de sa demande.
Constatant que le licenciement avait été notifié le 17 décembre 2010, avec dispense de préavis, et que la société avait notifié au salarié le 21 février 2011 par lettre, de sa décision de libérer le salarié de la clause de non-concurrence, ce courrier s’était « parfaitement inscrit dans le prolongement de la disposition contractuelle que le salarié avait acceptée ».
En conséquence, le salarié ne saurait être en droit de réclamer le paiement de la contrepartie financière à ce titre.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, l'arrêt, après avoir constaté que le salarié avait été licencié le 17 décembre 2010 et dispensé de l'exécution de son préavis, retient, par motifs propres et adoptés que la société lui a notifié le 21 février 2011 sa décision de le libérer de la clause de non concurrence, c'est-à-dire postérieurement à la rupture de son contrat de travail, opérée fin décembre 2010 et que ce courrier s'est parfaitement inscrit dans le prolongement de la disposition contractuelle que le salarié avait acceptée ;
Mais la Cour de cassation ne partage pas le même avis, confirmant une ancienne jurisprudence (que nous vous rappelons dans la partie commentaire).
Elle apporte à cette occasion des précisions importantes sur la date à laquelle l’employeur doit renoncer à la clause de non-concurrence :
- En cas de rupture du contrat de travail avec dispense d'exécution du préavis par le salarié ;
- L'employeur, doit, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l'intéressé de l'entreprise ;
- Nonobstant stipulations ou dispositions contraires.
Extrait de l’arrêt :
Attendu qu'en cas de rupture du contrat de travail avec dispense d'exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l'obligation de non-concurrence, la date d'exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité sont celles du départ effectif de l'entreprise ; qu'il en résulte que l'employeur, qui dispense le salarié de l'exécution de son préavis doit, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l'intéressé de l'entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires ; (…)
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. X... en paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 3 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;
Commentaire de LégiSocial
Le présent arrêt de la Cour de cassation est l’occasion de rappeler un arrêt similaire du 22 juin 2011.
Présentation du contexte
Deux salariés signent le 19 septembre 2002, à effet du 1er octobre 2002, un contrat de travail incluant une clause de non-concurrence ainsi libellée :
"(...) l'employeur (...) vous paiera à partir de la cessation effective du contrat de travail et tant que cet engagement restera en vigueur, 25 % de la rémunération en espèces qui vous aura été versée par l'employeur durant les 12 mois civils précédant la cessation de votre emploi (...). Cette indemnité vous sera versée en mensualités de montant égal, le premier versement étant effectué à la première date de paiement des salaires suivant la date effective de la cessation du contrat de travail».
Licenciés le 23 mars 2004 avec dispense d'exécution de leur préavis de 3 mois, les salariés saisissent la juridiction prud’homale.
La Cour d’appel, dans son arrêt du 28 juin 2005, indique que la clause de non-concurrence avait pris fin le 25 mars 2004.
Arrêt de la Cour de cassation
Mais la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, estimant que la clause de non-concurrence commence à s’appliquer à la date de notification du licenciement et non à l’expiration du préavis comme le prétendait l’employeur dans cette affaire.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu qu'en cas de licenciement du salarié avec dispense d'exécution de son préavis, la date de départ de l'obligation de non-concurrence, la date d'exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité, sont celles du départ effectif du salarié de l'entreprise ;
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 22 juin 2011
N° de pourvoi: 09-68762 Publié au bulletin