Des temps de déplacement, en relation avec l’emploi occupé, doivent être rémunérés

Jurisprudence
RH Temps travail effectif

Contraindre le salarié à effectuer des déplacements professionnels doit se traduire par une rémunération de l’employeur, c’est ce que rappelle la Cour de cassation dans cette affaire.

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé en qualité d'agent de surveillance, selon un contrat CDD 31 mars au 30 septembre 2015.

Au terme de ses relations contractuelles, il saisit la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir paiement de sommes au titre des frais professionnels. 

Le conseil de prud'hommes de Pau, à l’occasion de son jugement du 10 avril 2017, donne raison au salarié.

Mais l’employeur décide de se pourvoir en cassation. 

La Cour de cassation confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Pau, rejette le pourvoi, et indique que : 

  • Le salarié, rattaché au siège de la société, avait toujours été affecté à des sites variés dont la distance était très supérieure à la distance entre son domicile et le siège de la société et relevé que les nombreux déplacements de courte durée mais à des distances considérables du siège de l'employeur ne permettaient pas l'utilisation des transports en commun ;
  • Il en ressortait que les déplacements du salarié, inhérents à son emploi, étaient effectués pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur ;
  • Qu’ils ne pouvaient alors être assimilés à des trajets habituels domicile-travail, et devaient en conséquence être indemnisés. 

Extrait de l’arrêt :

Mais attendu qu'ayant constaté que le contrat de travail spécifiait que le salarié était rattaché au siège (…) de la société et que l'intéressé avait toujours été affecté à des sites variés dont la distance était très supérieure à la distance entre son domicile et le siège de la société et relevé que les nombreux déplacements de courte durée mais à des distances considérables du siège de l'employeur ne permettaient pas l'utilisation des transports en commun, le conseil de prud'hommes, qui a fait ressortir que les déplacements du salarié, inhérents à son emploi, étaient effectués pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur et a retenu, à bon droit, qu'ils ne pouvaient être assimilés à des trajets habituels domicile-travail, en a exactement déduit qu'ils devaient être indemnisés ; que le moyen, qui, en sa première branche, manque par le fait qui lui sert de base, n'est pas fondé ;

Cour de cassation du , pourvoi n°17-19779

Commentaire de LégiSocial

C’est un arrêt fort éclairant que rend présentement la Cour de cassation, qui dans son argumentation indique clairement que les temps de déplacement du salarié, dans l’affaire présente, ne pouvaient en aucun cas être assimilés à du temps de déplacement domicile-lieu de travail, dont nous rappelons quelques notions à cette occasion.

Définition générale depuis la loi travail

  1. Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif ;
  2. Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière.
  3. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail n'entraîne aucune perte de salaire.

Article L3121-4

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif.

Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail n'entraîne aucune perte de salaire.

Ne pas confondre avec le temps de mission

La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail ne doit pas entraîner de perte de salaire. Il s’agit en l’occurrence de temps de déplacement dans le cadre d’une mission, à rémunérer comme temps de travail effectif « La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail n'entraîne aucune perte de salaire. » 

Prise en compte du handicap

Est également proposé l’article L 3121-5 (auparavant consacré aux astreintes) qui instaure une nouvelle disposition selon laquelle, le temps de trajet majoré du fait d’un handicap peut faire l’objet d’une contrepartie sous forme de repos. 

Article L3121-5

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Si le temps de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail est majoré du fait d'un handicap, il peut faire l'objet d'une contrepartie sous forme de repos. 

Contreparties

Dans le cadre du champ de la négociation collective, l’article L 3121-7 (auparavant consacré au régime d’astreinte) confirme qu’une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche prévoit des contreparties lorsque le temps de déplacement professionnel mentionné à l'article L. 3121-4 dépasse le temps normal de trajet.

Article L3121-7

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V) (…)

Une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche prévoit des contreparties lorsque le temps de déplacement professionnel mentionné à l'article L. 3121-4 dépasse le temps normal de trajet. 

Dispositions supplétives

Dans le cadre du champ des « Dispositions supplétives », l’article L 3121-8 indique que les contreparties prévues à l’article L 3121-7 sont déterminées par l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent.

Article L3121-8

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

A défaut d'accords prévus aux articles L. 3121-6 et L. 3121-7 : (…)

3° Les contreparties prévues au second alinéa de l'article L. 3121-7 sont déterminées par l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent.