Comment traiter la clause de non-concurrence en paie ?

Fiche pratique
Gestionnaire de paie

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Cet article a été publié il y a 8 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

Nouvelle fiche pratique consacrée à la clause de non-concurrence.

Nous abordons cette fois son traitement spécifique en paye, et vous proposons à ce propos un exemple concret et chiffré qui devrait vous permettre de mieux gérer ce bulletin de paye un peu particulier selon nous… 

Quelques rappels…

Versement de l’indemnité 

L’indemnité est due sans que le salarié ait besoin de prouver l’existence d’un quelconque préjudice.

Cour de cassation 31/03/1998 arrêt 96-43016

Elle ne dépend pas de l’ancienneté du salarié, même si cette dernière peut avoir une certaine influence combinée avec d’autres éléments. 

Le montant de l’indemnité ne peut pas être diminué en cas de licenciement pour faute lourde du salarié. 

Date de paiement de l’indemnité 

Elle est versée dès le départ effectif du salarié en cas de dispense de préavis.

Cour de Cassation du 15/07/1998 arrêt 96-40866

Il n’est pas possible de prévoir le versement d’une indemnité au-delà de la période concernée par la clause de non concurrence.

Si cela était le cas, la clause de non concurrence serait nulle.

Exemple concret

Présentation du contexte

  • Nous supposons un salarié cadre, quittant l’entreprise le 29 février 2016 ;
  • Au titre de sa clause de non-concurrence, son employeur s’est engagé à lui verser une quote part de sa rémunération mensuelle brute, estimée à 50% de sa valeur moyenne sur les 12 derniers mois ;
  • Le montant de la contrepartie est ainsi fixée à 1.700,00 € brut par mois.

Congés payés

Dans son arrêt du 23 juin 2010, la Cour de cassation considère que la contrepartie financière versée au titre de la clause de non-concurrence, ayant la qualité d’une indemnité compensatrice de salaires, ouvre droit à ce titre à congés payés.

Extrait de l’arrêt :

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande tendant au paiement d'une indemnité de congés payés calculée sur la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence, l'arrêt énonce que seul le travail effectif ouvre droit à congés payés ; que dès lors, la contrepartie financière de la clause de non-concurrence versée par l'ancien employeur pour une période non travaillée ne peut donner lieu à une indemnité de congés payés ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence ayant la nature d'une indemnité compensatrice de salaires, ouvre droit à congés payés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande tendant au paiement d'une indemnité de congés payés calculée sur la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence, l'arrêt rendu le 5 septembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;

Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 23 juin 2010 
N° de pourvoi: 08-70233 Publié au bulletin 

Il nous semble prudent d’indiquer l’indemnité de congés payés sur une ligne séparée du bulletin de paie, permettant ainsi au bénéficiaire de constater qu’elle est bien envisagée par l’entreprise, dans le respect de la jurisprudence.

Présentation du bulletin de salaire

Contrepartie financière au titre de la clause de non-concurrence

1.700,00 €

Indemnité compensatrice de congés payés

170,00 €

Salaire brut du mois

1.870,00 €

Régime fiscal et social de l’indemnité

La compensation financière versée au titre de la clause de non concurrence a valeur de salaire.

Elle est donc :

  • Soumise aux cotisations sociales, y compris la CSG et la CRDS ;
  • Imposable au titre de l’impôt sur le revenu.

Nota : les taux de cotisations applicables sont ceux du moment du versement.

Plafond de sécurité sociale applicable

A ce niveau, l’indemnité versée doit être traitée comme un salaire d’activité, l’entreprise appliquant ainsi le plafond déterminé selon la périodicité de son versement, soit un plafond mensuel « plein » pour un versement mensuel.

Régime des sommes isolées

Selon la circulaire ARRCO-AGIRC du 7/11/2007 (circulaire 2007-19), l’indemnité doit être considérée comme une « somme isolée ».

Néanmoins, compte tenu de la disparition du régime des sommes isolées au 1er janvier 2016, ce traitement n’est désormais plus nécessaire.

Saisie sur rémunération

Toujours selon le même raisonnement, la contrepartie financière versée au titre de la clause de non-concurrence étant assimilée à un salaire, elle est donc saisissable selon les mêmes procédures et dans les mêmes proportions que celui-ci.

Réduction FILLON

  • Notre question

Nous avons interrogé les services de l’URSSAF, afin de savoir si une réduction FILLON pouvait éventuellement être calculée au titre de la contrepartie financière.

Selon nous, tenant compte du fait que cette contrepartie est versée sans qu’il y ait un lien avec un travail effectif ou fourni, l’éligibilité au titre de la réduction FILLON n’est pas envisageable.

  • La réponse des services de l’URSSAF

Les services de l’URSSAF nous confirment la position suivante :

  • Même si la contrepartie financière est effectivement assujettie aux cotisations et contributions sociales, elle n’a ni pour objet ni pour fondement la rémunération de la présence du salarié dans l’entreprise en fonction d’un travail fourni par celui-ci ;
  • De ce fait, l’indemnité de non-concurrence n’ouvre pas droit au calcul de la réduction FILLON.

Extrait réponse des services de l’URSSAF, en date du 2 janvier 2015

02/01/2015 14:22 Référence : 2015-01-10 (…)

Votre demande concernait la réduction Fillon pour un salarié bénéficiant du paiement d’une contrepartie financière dans le cadre d’une clause de non concurrence.

L’indemnité de non concurrence versée chaque mois après la rupture du contrat de travail, même si elle est assujettie à cotisations et contributions sociales, n’a ni pour objet ni pour fondement la rémunération de la présence du salarié dans l’entreprise en fonction d’un travail fourni par celui-ci.

Une indemnité de non concurrence ne peut donc effectivement pas ouvrir droit à la réduction Fillon.

Taux réduit allocations familiales et CICE

Selon nous, il convient d’appliquer un raisonnement identique à celui que nous venons d’exposer en matière de réduction FILLON.

Ainsi, peu importe la valeur de l’indemnité versée, celle-ci n’ouvre pas droit :

  • Au taux réduit d’allocations familiales ;
  • Au calcul du CICE.

Attestation Pôle emploi

L’indemnité doit apparaître sur l’attestation Pôle emploi dans le cadre 7.1 (salaires des 12 derniers mois) ou 7.2 (primes et indemnités de périodicité différente).

Prescription

La Cour de cassation, dans son arrêt de 2002, confirme que l’indemnité relève du délai de prescription des salaires.

Extrait de l’arrêt :

Attendu cependant que la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence a, quelle que soit la qualification contractuelle que lui donnent les parties, la nature d'une indemnité compensatrice de salaire dont l'action en paiement se prescrit par cinq ans, conformément à l'article 2277 du Code civil ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions ayant condamné l'employeur à payer au salarié une somme à titre de contrepartie financière à la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 19 novembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Cour de cassation chambre sociale 
Audience publique du jeudi 26 septembre 2002 
N° de pourvoi: 00-40461 Publié au bulletin 

Rappelons que le délai est désormais fixé à 3 ans, suite à la publication de la loi de sécurisation de l’emploi de 2013.

Article L3245-1

Modifié par LOI n°2013-504 du 14 juin 2013 - art. 21

L'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.