Cet article a été publié il y a 9 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
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Il existe de nombreux cas de rupture du contrat de travail, parmi lesquels nous pouvons citer par exemple :
- La démission ;
- Le licenciement ;
- Par consentement des parties ;
- Suite au décès du salarié ;
- Arrivée à son terme du contrat CDD ou d’un contrat de mission (intérim);
- Rupture anticipée du contrat CDD ou d’un contrat de mission (intérim); ;
- La rupture conventionnelle ;
- Le départ volontaire à la retraite ;
- La mise à la retraite ;
- La résiliation judiciaire ;
- Consécutive à la cessation de l’entreprise ;
- En cas de force majeure.
Mais il existe également un autre mode de rupture, assez particulier, que l’on dénomme « prise d’acte de la rupture du contrat de travail » et pour lequel nous vous proposons le présent article qui aborde quelques aspects.
La prise d’acte dans le code du travail
Loi n° 2014-743 du 1er juillet 2014 relative à la procédure applicable devant le conseil de prud'hommes dans le cadre d'une prise d'acte de rupture du contrat de travail par le salarié, JO du 2 juillet 2014
Prise d’acte : les prud’hommes devront statuer dans un délai d’un mois
La loi publiée au JO du 2 juillet 2014, précise qu’en cas de rupture du contrat de travail par le salarié et de saisine du Conseil de prud’hommes :
- L'affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d'un mois suivant sa saisine ;
- La phase préalable dite de « conciliation » s’en trouve supprimée selon nous.
Un nouvel article (article L 1451-1) est ainsi inséré dans le code du travail.
Extrait de la loi :
Article unique
Au chapitre Ier du titre V du livre IV de la première partie du code du travail, il est inséré un article L. 1451-1 ainsi rédigé :
« Lorsque le conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de qualification de la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié en raison de faits que celui-ci reproche à son employeur, l'affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d'un mois suivant sa saisine. »
Article L1451-1
Créé par LOI n°2014-743 du 1er juillet 2014 - art. unique
Lorsque le conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de qualification de la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié en raison de faits que celui-ci reproche à son employeur, l'affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d'un mois suivant sa saisine.
Objectif de la loi : sécuriser la situation du salarié et de l’employeur
L’objectif visé par la loi est de sécuriser la situation du salarié, vis-à-vis notamment des allocations chômage.
La procédure, qui entre en vigueur le 3 juillet 2014, pour la prise d’acte sera ainsi similaire à celle qui est actuellement en vigueur en requalification d’un contrat CDD ou d’un contrat d’intérim en CDI.
Rappelons que ce sera également bientôt le cas en cas de requalification d’une convention de stage en contrat de travail quand la loi encadrant les stages sera publiée au JO.
- Un délai moyen qui dépasse un an
Actuellement, le délai moyen pour obtenir un jugement du Conseil de prud’hommes en cas de prise d’acte dépasse un an, parfois plus de 2 ans.
La présente loi devrait mettre fin à ce délai, même si les partenaires sociaux restent dubitatifs sur ce délai qu’ils pensent n’être que « théorique » dans la mesure où les Conseils de prud’hommes ne semblent pas être suffisamment armés pour faire face à des demandes urgents, l’avenir nous en dira plus…
Prise d’acte : un pari sur l’avenir…
Notions de principe
La prise d’acte de rupture du contrat de travail par le salarié implique que ce dernier invoque des griefs envers son employeur.
Ainsi les griefs invoqués doivent être suffisamment importants pour qu’ils puissent ensuite être reconnus « fondés » par le conseil de prud’hommes.
Démission ou licenciement sans cause réelle et sérieuse (ou nul)
Les conséquences sont importantes :
- Les griefs sont fondés : la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d’un licenciement nul ;
- Les griefs ne sont pas fondés : la prise d’acte produit les effets d’une démission.
C’est en quelque sorte une sorte de « pari sur l’avenir » que prend le salarié en rompant le contrat de travail par ce mode.
Qui est à l’origine de la prise d’acte ?
Ce mode de rupture est à la seule initiative du salarié.
De son côté, un employeur qui estime qu’un salarié ne respecte pas ses obligations, doit prendre l’initiative de la rupture du contrat en engageant la procédure de licenciement.
Il n’est en aucun cas en droit de « prendre acte » de la rupture du contrat de travail.
Les employeurs qui souhaitent rompre un contrat de travail doivent procéder à un licenciement, car la rupture du contrat sans le respect de la procédure de licenciement s’analysera automatique comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que la cour d'appel a estimé que la rupture s'analysait en un licenciement, lequel procédait d'une cause réelle et sérieuse, dès lors que, le contrat de travail n'avait pas été modifié et que le salarié avait commis une faute en refusant un simple changement de ses conditions de travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de procédure de licenciement, la rupture par l'employeur était constitutive d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans que le juge ait à rechercher si les faits, reprochés aux salariés étaient ou non fondés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu à renvoi du chef du licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour de cassation pouvant donner au litige sur ce point la solution appropriée par application de l'article 627, alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en sa disposition rejetant la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 14 novembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;Cour de cassation du 25/06/2003 pourvoi n° 01-40235
Pour quels salariés ?
Seul le salarié en CDI peut utiliser ce mode de rupture.
Les salariés en CDD sont exclus de ce dispositif, seule la rupture anticipée du contrat est envisageable.
Prise d’acte : rupture immédiate du contrat
Une rupture immédiate sans préavis
La prise d’acte de rupture du contrat par le salarié a pour effet de rompre immédiatement sans qu’aucun préavis ne soit effectué.
Portée du préavis effectué « spontanément »
Le salarié peut accomplir (ou offrir d’accomplir) « spontanément » son préavis, sans que cela puisse remettre en cause la gravité des griefs invoqués envers son employeur.
La Cour de cassation s’est déjà prononcé sur cette circonstance particulière, et avait indiqué que le salarié devait percevoir l’indemnité compensatrice de préavis correspondant au solde du préavis non effectué, la prise d’acte produisant dans le cas présent les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu qu'ayant décidé que la prise d'acte du salarié, fondée sur la modification unilatérale de son contrat de travail, produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, qui a condamné l'employeur à verser au salarié une indemnité compensatrice correspondant au solde du préavis non exécuté, n'encourt pas les griefs du moyen ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Cour de cassation du 2/06/2010 pourvoi 09-40215
Nota :
Lorsque le salarié prend acte de la rupture et si les griefs sont fondés, l’ancienneté prise en compte pour le calcul de l’indemnité de licenciement est celle acquise à la date de prise d’acte.
Si le salarié effectue un préavis et que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’ancienneté doit prendre en compte la période de préavis effectuée, même partiellement.
Une rupture du contrat qui s’impose à l’employeur
La prise d’acte de rupture du contrat de travail s’impose à l’employeur, qui ne peut s’y opposer, mais n’est pas dans l’obligation d’en accuser réception.
Extrait de l’arrêt :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée (conseil de prud'hommes de Paris, 26 juillet 2006), que Mme X…, engagée à compter du 5 juillet 1997 par la société Y…, a pris acte de la rupture de son contrat de travail et saisi le juge des référés afin d'obtenir la délivrance d'un certificat de travail et d'une attestation ASSEDIC ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'ordonnance d'avoir accueilli ses prétentions, alors, selon le moyen : (…)
Mais attendu que la prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail ; que, constatant que l'employeur refusait de remettre à la salariée le certificat de travail et l'attestation ASSEDIC, la formation de référé a statué à bon droit ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Cour de cassation du 04/06/2008 pourvoi 06-45757
Rétractation du salarié
La rétractation du salarié n’est pas envisageable lorsque la prise d’acte a été portée devant le juge.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu que la prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur entraîne la rupture immédiate du contrat de travail ; qu'il s'ensuit qu'elle ne peut être rétractée et que le moyen qui invoque, en ses deux premières branches, la dénaturation d'une prétendue rétractation par le salarié de sa prise d'acte de la rupture est inopérant ;
Cour de cassation du 14/10/2009 pourvoi 08-42878