Cet article a été publié il y a 8 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Qu’est ce qu’un « usage » ?
Pas de définition légale
Il n’existe pas de définition « légale » de l’usage, aucun article du code du travail à proposer.
La définition de l’usage évolue au fur et à mesure des décisions de justice (Conseil de prud’hommes et parfois Cour de cassation).
Usage= avantage
On peut définir l’usage comme un droit que l'employeur accorde de manière unilatérale et implicite à ses salariés sans que ni la loi, ni la convention collective, ni les accords collectifs ne le lui imposent.
Quelques notions importantes peuvent être citées :
- Créer un usage dans une entreprise c’est décider d’attribuer aux salariés un avantage ;
- La création de cet usage se fait dans un mode informel (c’est à dire qu’une forme particulière n’est pas nécessaire) ;
- L’usage marque ainsi la volonté implicite de l’employeur de reconnaître ou d’attribuer certains avantages aux salariés ;
- Un usage ne peut pas être moins favorable qu’une convention collective ou une loi.
Cela étant l'employeur n'a pas toujours pleinement conscience d'accorder un avantage à ses salariés.
En effet, un usage peut naître d'une pratique établie à l'initiative des salariés, sans opposition de l'employeur.
L'usage peut exister au niveau de l'entreprise ou seulement à celui d'un ou plusieurs établissements.
Il est obligatoire seulement au niveau où il a été créé.
Le salarié muté dans un établissement où l'usage en vigueur dans son établissement d'origine ne s'applique pas perd le bénéficie de ce droit
Cour de cassation du 10/01/1985 n° 81-42801
Usages : 3 conditions cumulatives
Pour que l’on puisse parler d’usage, il est obligatoire que les 3 conditions suivantes soient cumulativement (c'est-à-dire en même temps) respectées :
1 : FIXITE
Fixité dans le montant ou la façon de calculer ou de déterminer l’avantage (exemple : 13ème mois, prime selon l’ancienneté dans l’entreprise, etc.) ;
2 : GENERALITÉ
Applicable pour l’ensemble du personnel ou pour une catégorie (exemple pour les cadres uniquement mais en veillant à justifier la raison pour laquelle seuls certains salariés bénéficient de l’usage, au risque que cette attribution puisse être jugée de discriminatoire) ;
3 : CONTINUITÉ
Pratique répétée (exemple une prime versée pendant 3 mois peut ne pas être considérée comme un usage).
Ce qui veut dire aussi, que si l’une (au moins) des 3 conditions n’est pas remplie, nous ne pouvons alors pas parler d’un « usage ».
Dénonciation d’un usage
Les règles de dénonciation
Pour que l’usage soit supprimé, l’employeur doit :
- Informer institutions représentatives ;
- Informer individuellement les salariés ;
- Respecter un délai de prévenance suffisant (aucun texte ne fixe le délai qui sera apprécié par le juge).
Informer institutions représentatives
La Cour de cassation considère qu’il s’agit de la 1ère étape que doit respecter l’employeur.
Cour de cassation du 13/02/1996 n° 93-42309
L’information doit être communiquée aux délégués du personnel lors de la réunion mensuelle, mais aussi de façon individuelle et par écrit.
Bien entendu, en l’absence de représentants du personnel, cette étape n’est pas à prendre en compte, sous réserve que l’employeur ait effectivement organisé des élections professionnelles et qu’un PV de carence ait été rédigé.
Informer individuellement les salariés
La prudence, selon nous, est d’informer chaque salarié par écrit, de préférence en lettre recommandée ou lettre remise en main propre.
Les informations suivantes ont été considérées comme non licites par la Cour de cassation :
- Affichage ;
- Annonce faite lors d’une réunion du personnel ;
- Mention portée sur le bulletin de salaire.
Cour de cassation du 27/11/1990 n° 87-42404
Cour de cassation du 4/07/1995 n° 92-40076
Cour de cassation du 9/04/2002 n° 00-41783
Respecter un délai de prévenance suffisant (aucun texte ne fixe le délai qui sera apprécié par le juge)
A titre d’exemple, a été considéré comme un délai suffisant la dénonciation d’un usage en juin pour une prime 13ème mois habituellement versée sur la paye de décembre.
Cour de cassation du 27/04/1989 n° 86-45468
La Cour de cassation s’est prononcée de nombreuses fois à ce sujet, et les cas suivants ont été considérés comme constituant une dénonciation réalisée dans un délai de prévenance insuffisant.
Description de l’usage | Date dénonciation | Référence arrêt de la Cour de cassation |
---|---|---|
Versement prime de campagne versée habituellement en juillet | 30 juin | 24/10/1997 n° 96-40927 |
Prime 13ème fois versée habituellement au mois de décembre | 20 novembre | 5/02/1992 n° 88-41643 |
Prime de vacances dont les salariés bénéficient sur la paye de mai | 22 mai | 22/12/1988 n° 86-42715 |
Dénonciation par accord collectif ?
On peut aussi mettre fin à un usage par un accord collectif même moins favorable, pour autant que l’accord ait le même objet.
Extrait de l’arrêt
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si l'accord d'entreprise du 23 janvier 2002 n'avait pas mis fin aux usages litigieux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des règles et de l'accord susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de paiement de dommages-intérêts pour retard de paiement, l'arrêt rendu le 15 décembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges
Cour de cassation 5/04/2012 pourvoi n° 10-12182
Vous pouvez retrouver l’arrêt en détails, en cliquant ici.
Lire aussi : On peut mettre fin à un usage par un… accord collectif ! Jurisprudence
Un salarié est engagé le 1/01/2000 en qualité de manutentionnaire cariste. Il saisit la juridiction prud’homale d’une demande de rappel de salaire au titre de primes de rendement et de ...
Usage sur un contrat de travail
A contrario, l’usage présent sur un contrat de travail ne se supprime pas sauf à modifier le contrat de travail.
De même, une clause du contrat de travail prévoyant la renonciation par le salarié d’un usage pratiqué dans l’entreprise doit être considérée comme nulle.
Cour de cassation du 27/03/2001 n° 98-44292
Usages : effets de la dénonciation
Dénonciation licite
Si la dénonciation est licite, l’usage cesse de produire ses effets, les salariés ne peuvent en aucun cas en demander le bénéfice par la suite.
Cour de cassation du 25/02/1998 n° 85-40821
Dénonciation illicite
Si la dénonciation n’est pas faite dans les règles édictées plus haut, l’usage perdure et les salariés doivent en bénéficier bien entendu, jusqu’à une nouvelle dénonciation régulière éventuelle.
Cour de cassation du 16/12/1998 n° 95-40385