Inaptitude : quand la Cour de cassation reconnait que l’employeur a rempli ses obligations de reclassement

Jurisprudence
RH Licenciement

Quand la Cour de cassation reconnait les circonstances d’une inaptitude, des efforts de reclassement de l’employeur, et permet de reconnaître fondé sur une cause réelle et sérieuse un licenciement pour inaptitude.

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé, le 3 août 2009, en qualité de poseur responsable technique.

A l'issue d'un examen unique le 5 juillet 2013, le médecin du travail déclare le salarié inapte à son poste ainsi qu'à tous postes dans l'entreprise.

Licencié le 29 juillet 2013 pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement, le salarié saisit la juridiction prud'homale de diverses demandes. 

La Cour d'appel d'Angers, par arrêt du 14 novembre 2017, déboute le salarié de sa demande, ce que confirme la Cour de cassation comme suit :

  • Ayant relevé que le médecin du travail, interrogé par l'employeur postérieurement à la déclaration d'inaptitude, avait répondu qu'il n'y avait pas de solution de reclassement à proposer au salarié dans l'entreprise ;
  • Et retenu que la recherche menée par l'employeur n'avait pu aboutir favorablement compte tenu de la taille de l'entreprise et des termes de l'avis d'inaptitude ;
  • Il était constaté que l’employeur n'avait pas manqué à son obligation de rechercher avec loyauté le reclassement de son salarié ;
  • Et qu’en conséquence, le licenciement pour inaptitude physique reposait sur une cause réelle et sérieuse.

Extrait de l’arrêt :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen, que pour juger que la société (…) n'avait pas manqué à son obligation de reclassement, l'arrêt attaqué a retenu, par motifs propres et adoptés, que le médecin du travail, qui ne s'était pas rendu dans l'entreprise, avait répondu à l'employeur qu'il n'avait pas de solution de reclassement à proposer, que la lettre de licenciement énonçait qu'aucune possibilité de reclassement n'avait pu être trouvée, et que l'entreprise était de petite taille ; qu'en statuant par ces motifs impropres à établir que la société …)eût effectué des recherches de reclassement concrètes et sérieuses au besoin en transformant les postes de travail et en proposant au salarié d'aménager son temps de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;

Mais attendu qu'en relevant que le médecin du travail, interrogé par l'employeur postérieurement à la déclaration d'inaptitude, avait répondu qu'il n'y avait pas de solution de reclassement à proposer au salarié dans l'entreprise, la cour d'appel, qui a retenu que la recherche menée par l'employeur n'avait pu aboutir favorablement compte tenu de la taille de l'entreprise et des termes de l'avis d'inaptitude, et qui a constaté que ce dernier n'avait pas manqué à son obligation de rechercher avec loyauté le reclassement de son salarié, a légalement justifié sa décision ;

Cour de cassation du , pourvoi n°18-10684

Commentaire de LégiSocial

Rappelons quelques notions importantes concernant la reprise du paiement des salaires en l’absence de licenciement au terme du délai de 1 mois…

Absence de licenciement au terme d’un délai de 1 mois

Reprendre le paiement du salaire

Dans ce cas particulier, si aucun licenciement n’a été prononcé dans un délai d’un mois, l’employeur doit alors reprendre le paiement des salariés au bénéfice de son salarié déclaré inapte totalement (pour un accident du travail ou un accident de trajet mais aussi pour toute autre origine). 

Article L1226-4

Modifié par LOI n°2012-387 du 22 mars 2012 - art. 47

Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.

Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail.

En cas de licenciement, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l'indemnité mentionnée à l'article L. 1234-9. Par dérogation à l'article L. 1234-5, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice.

Article L1226-11

Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.

Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail.

Reprendre le paiement sauf si l’inaptitude n’est pas connue

Lorsque l’inaptitude a été prononcée par la médecine du travail, à l’initiative du salarié mais qu’elle n’a pas été portée à la connaissance de son employeur, l’obligation de paiement à l’expiration du délai d’un mois n’est pas applicable.

Cour de cassation du 19/05/2004 arrêt 02-46098 D 

Le décompte du délai d’un mois

Le délai de un mois court à compter de la déclaration d'inaptitude du médecin du travail (en principe après le second examen médical, sauf en cas d’urgence pour lequel un seul examen médical est requis). 

Cour de cassation du 28/01/1998  arrêt 95-44301 

Et si l’employeur ne paie pas ?

L’employeur pourra alors être condamné en justice à payer au salarié les sommes dues.

Le salarié pourra aussi prendre acte de la rupture du contrat de travail qui sera requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

Cour de cassation du 29/09/2004  arrêt 02-43746